« Je retenterai de passer demain »
Le long des barbelés qui enserrent la zone portuaire, Tomas se marre. « Pas de chance cette nuit. Je retenterai demain. Enfin, s’ils ne nous ont pas virés d’ici là… » Cet Erythréen de 20 ans sait bien qu’il lui reste peu de temps pour convertir les 300 € qu’il a laissés à un passeur en véritable aller simple pour l’Angleterre. Les autorités françaises s’apprêtent, en effet, à démanteler la « jungle » de Calais, où vivent entre 5 700 et 10 000 migrants selon les estimations. Les premiers bulldozers auraient pu débarquer ce lundi matin. Mais le projet a été retardé par un recours en justice déposé par onze associations. En attendant, on ne parle que de ça sur la lande de dunes. « La France est accueillante. Vous nous donnez des médicaments et de la nourriture, reconnaît Khalid, un Soudanais de 32 ans. Mais ce n’est pas mon but… » Ces dernières semaines, les associations l’ont prévenu qu’il allait être évacué, en bus, vers un centre d’accueil et d’orientation. Aux quatre coins de l’Hexagone, 164 de ces petites structures abritent déjà 6 000 migrants qui souhaitent, in fine, demander l’asile. « On sent un vrai changement, assure Pascal Brice, directeur de l’Office français de protection des réfugiés. Ils sont de plus en plus nombreux à vouloir rester en France. » Pas Khalid. « Moi, je reviendrai ici pour passer en Angleterre. Dans un jardin ou sous un arbre ? Je ne sais pas où je dormirai, mais je n’ai pas peur. » Selon les associations, une trentaine de « nouveaux » migrants se présentent chaque jour à l’entrée de la « jungle ». « Tant que Douvres se trouvera en face de Calais… », résume, fataliste, un humanitaire.