Jérusalem, creuset des tensions
Le conflit israélo-palestinien s’est toujours cristallisé sur la ville trois fois sainte
Les premiers heurts n’ont pas tardé. Jeudi, des Palestiniens ont affronté des soldats israéliens et brûlé le portrait du président américain pour protester contre la décision prise par ce dernier, la veille, de reconnaître Jérusalem comme la capitale d’Israël. D’autres violences ont été rapportées à travers toute la Cisjordanie et dans la bande de Gaza tandis que le Hamas s’est prononcé pour une nouvelle intifada. « Jérusalem cristallise la question du conflit israélo-palestinien, à savoir la solution à deux Etats et du partage du territoire, analyse Elisabeth Marteu, docteure en science politique et spécialiste du Proche-Orient. C’est un symbole, puisque le propre même de la ville est d’être divisée. » Une ville qui est aussi « le berceau commun des trois religions monothéistes, dont se réclament une grande majorité des habitants de la planète », souligne Vincent Lemire, historien spécialiste de Jérusalem. Depuis l’émergence de la communauté internationale et du droit afférent au début du XXe siècle, elle est au centre de toutes les attentions.
Ville monde
Véritable ville monde où se mêlent de nombreuses religions, peuples et groupes socio-économiques, la cité est particulièrement exposée. Alors, « quand il y a une décision unilatérale comme celle prise par Donald Trump, ça déstabilise très fortement la situation locale », poursuit Vincent Lemire. Les dirigeants palestiniens revendiquent Jérusalem-est, occupée, puis annexée, par Israël en 1967, comme la capitale de l’Etat auquel ils aspirent. Israël proclame tout Jérusalem, ouest et est, capitale « éternelle et indivisible ». L’historien estime pourtant que « Jérusalem est une “capitale impossible” au sens d’une capitale exclusive d’un seul Etat ». « La ville n’a jamais été un centre politique, une capitale. Elle a toujours été une ville de province dans des empires supranationaux », précise-t-il. Avant de s’interroger : « Comment faire de Jérusalem la capitale exclusive d’un seul Etat quand 40 % de sa population n’est pas citoyenne de cet Etat ? » Selon Elisabeth Marteu, beaucoup de Palestiniens pensent, qu’un jour, « la situation tournera en leur faveur ». Mais, « au regard du développement de la colonisation, de la radicalisation du gouvernement israélien et d’une partie des mouvements politiques israéliens, on ne voit pas comment il pourrait y avoir une entente sur Jérusalem et les lieux saints ». « Il y a des solutions, mais ça reste une question de volonté politique. »