« On ne doit laisser aucun élève de côté »
Un enfant en CE1 sur deux rencontre des difficultés en calcul mental. C’est l’un des enseignements des évaluations des CP et CE1, dévoilés en exclusivité à « 20 Minutes » par le ministre de l’Education.
C’est l’heure du verdict pour les évaluations nationales des élèves au début de CP et CE1. Le ministre de l’Education Jean-Michel Blanquer dévoile à 20 Minutes les premiers résultats, qui ne sont globalement pas positifs.
Quel bilan pouvez-vous dresser des évaluations de CP et CE1 ?
Les premiers résultats montrent que 23 % des élèves en début de CP ont des difficultés à reconnaître les lettres et le son qu’elles produisent. Et aussi que 8 % ont des difficultés à reconnaître les nombres dictés. Concernant les élèves en début de CE1, 30 % lisent moins de 30 mots par minute, alors que l’objectif national est de 50 mots. Un sur deux (49 %) a des difficultés en calcul mental et 47 % en ont pour résoudre des problèmes. Ces résultats, cohérents avec ce que nous indiquent les enquêtes internationales Pirls, Timms et Pisa, montrent des points de faiblesse qui ne sont pas irrémédiables, parce qu’ils sont repérés tôt.
A quoi attribuez-vous les fragilités de ces élèves ?
Ce n’est pas le seul critère qui inter- fère, mais les difficultés sociales et familiales peuvent expliquer certains retards. On sait qu’un enfant de 4 ans issu d’une famille défavorisée a entendu 30 millions de mots en moins qu’un enfant issu d’une famille aisée. C’est à l’école d’apporter à cet enfant ce que sa famille n’a pas pu lui donner. On ne doit laisser aucun élève de côté.
Quelles mesures allez-vous prendre pour rectifier le tir ?
Ces évaluations donnent aux enseignants une vision précise des compétences de chaque enfant en début d’année et leur fournissent un panorama de la classe, qui va les aider à programmer leurs séquences péda- gogiques. Ils disposeront d’un kit pédagogique sur Eduscol pour faire avancer les élèves sur les différents sujets, ce qui ne leur retirera pas leur liberté pédagogique. Les heures d’aide personnalisée doivent aussi être utilisées en ciblant les domaines de compétences dans lesquelles l’enfant a besoin d’être renforcé. Le dédoublement des classes de CP et CE1 dans l’éducation prioritaire va nous permettre d’agir à la racine de la difficulté. Et l’instruction obligatoire dès 3 ans [mesure figurant dans le projet de loi présenté ce lundi au Conseil supérieur de l’éducation] va mettre l’accent sur l’école maternelle et sur l’acquisition du langage. La réforme de la formation initiale et continue des enseignants va nous permettre aussi de renforcer leurs compétences.
Que répondez-vous aux enseignants qui estiment que ces évaluations sont inutiles puisqu’ils font déjà des diagnostics pédagogiques ?
Ce n’était pas le cas de tout le monde, et ces évaluations n’étaient pas toujours effectuées de manière complète.
« 23 % des élèves en début de CP ont du mal à reconnaître les lettres et le son qu’elles produisent. »
« Ces tests ont été conçus par les meilleurs spécialistes et de manière scientifique. »
Selon certains syndicats d’enseignants, beaucoup d’enfants ont buté sur des questions piégeuses. Les résultats des tests sont-ils donc représentatifs du niveau réel des élèves ?
Oui, car ces tests ont été conçus par les meilleurs spécialistes des différents domaines et de manière scientifique. Ils n’ont pas été créés pour faire échouer les élèves, mais dans un esprit de bienveillance. Ils ne servent pas à classer les élèves, mais c’est un levier pour leur réussite.
L’autre risque pointé est que certains enseignants aient la tentation d’organiser les apprentissages en fonction de ces évaluations et non des compétences à acquérir…
Ces évaluations coïncident avec les compétences fondamentales à acquérir. De plus, les apprentissages ne sont pas cloisonnés, mais sont tous reliés entre eux. Par ailleurs, cela laisse une immense marge de manoeuvre sur la nature des activités pédagogiques.