20 Minutes (Toulouse)

«Vernon Subutex» passe le crash texte

L’adaptation de l’oeuvre de Virginie Despentes est présentée ce vendredi au festival CanneSerie­s avant sa diffusion sur Canal +, lundi

- Anne Demoulin

Un événement très attendu. L’adaptation à l’écran de la trilogie de romans culte « Vernon Subutex », de Virginie Despentes, va faire l’ouverture de la 2e édition du festival CanneSerie­s (jusqu’au 10 avril, à Cannes) ce vendredi, avant sa diffusion sur Canal+, dès lundi. Cette minisérie, comme les livres, devrait parler à toute une génération. L’adaptation a été confiée à Cathy Verney, déjà à l’oeuvre dans « Fais pas ci, fais pas ça » et « Hard ». « Le roman est vraiment le portrait d’une génération oubliée, sacrifiée, qui a perdu ses idéaux », estime celle à qui Virginie Despentes a donné « carte blanche ». La minisérie, en neuf épisodes de trente minutes, reprend l’intrigue des deux premiers tomes. «On voulait cette liberté de rythme propre à la dramédie, prendre le temps de raconter une errance, la chute de Vernon », explique Cathy Verney, qui signe aussi la mise en scène.

« Ce qui est sériel dans le roman, c’est ce mec à la rue qui va aller dormir de canapé en canapé chez des potes», souligne la réalisatri­ce. La série suit donc Vernon Subutex, disquaire au chômage, en quête d’un endroit où dormir, et dresse au travers de son errance le portrait d’une génération qui a grandi devant «Les Enfants du rock» et se réveille embourgeoi­sée ou sur le carreau, vingt ans plus tard.

« Le rock, c’est vivre vite et mourir jeune. Alors comment vieillir quand on a hurlé : “Les gars, on va vivre vite, on vous emmerde tous, et on va claquer” ? C’est ça, leur mélancolie à tous », considère Philippe Rebbot, qui interprète Xavier, un des membres de la bande de Vernon Subutex. En revenant dans leur vie, « Vernon a le pouvoir de les reconnecte­r avec ce qu’ils étaient, il les rallume. Ils se souviennen­t grâce à Vernon qu’ils ont été quelque chose d’autre que ce qu’ils sont devenus », s’enthousias­me Cathy Verney. « Lui n’a pas changé. Il les regarde comme ils étaient avant », renchérit-elle.

Romain Duris, qui campe le vagabond mélomane, a été adoubé aussi bien par la romancière que par la réalisatri­ce. « Romain cristallis­e cette époque des années 1990 et cette jeunesse perdue, explique-t-elle. Depuis Le Péril jeune, on l’a vu grandir et il y a une proximité. Prendre Romain Duris, c’est déjà raconter cette époque : il est chargé de cela, il appartient à cette époque, il fait partie de cette mémoire collective. On l’aime ou on ne l’aime pas pour ça. » «Vernon Subutex est le témoin d’un moment, d’une époque », estime l’intéressé. Et de poursuivre : « C’est vrai, les personnage­s que j’ai incarnés dans Le Péril jeune ou dans la trilogie de L’Auberge espagnole sont aussi les témoins d’une réalité, d’un moment. L’Auberge espagnole décrit le moment où Erasmus explose. J’ai retrouvé cela avec “Vernon Subutex” », explique-t-il encore.

« Virginie Despentes a capté le regard désenchant­é d’une génération, mais il y a aussi quelque chose d’universel, sur la mémoire, le temps qui passe », poursuit la réalisatri­ce. « L’histoire pourrait aussi bien se dérouler dix ans plus tard à l’avènement de la musique électroniq­ue », confirme le producteur Emmanuel Daucé.

Bref, Cathy Verney signe une dramédie drôle et tendre qui, comme le roman, nous rappelle que, comme le dit la citation – tantôt attribuée à Groucho Marx, tantôt à Terry Pratchett –, «dans chaque vieux, il y a un jeune qui se demande ce qui s’est passé».

«On voulait prendre le temps de raconter une errance, la chute de Vernon.»

Cathy Verney, réalisatri­ce

«Vernon Subutex est le témoin d’un moment, d’une époque. »

Romain Duris, acteur

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La scénariste et réalisatri­ce Cathy Verney, sur le tournage de la minisérie.
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Romain Duris joue le rôle-titre, un disquaire au chômage.

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