20 Minutes (Toulouse)

L’écoféminis­me défend les femmes et la nature

Et si la libération sexuelle des femmes et la protection de la planète étaient un seul et même combat ?

- Jean-Loup Delmas

« Bouffe ma chatte, pas la planète », « Enculez- nous, pas le climat » , « Protégez les zones humides »… La Marche pour le climat, le 16 mars, a vu émerger des slogans mêlant libération sexuelle des femmes et crise environnem­entale. Et alors que d’autres marches sont annoncées un peu partout en France ce vendredi, 20 Minutes s’est penché sur le mouvement écoféminis­te, qui mêle défense de la nature et défense des femmes.

Contre le capitalism­e patriarcal

Pour Jeanne Burgart-Goutal, philosophe qui travaille depuis des années sur le sujet, « il s’agit d’une lutte selon laquelle la défense de l’environnem­ent et l’émancipati­on des femmes nécessiten­t de combattre un oppresseur commun ». En l’occurrence le capitalism­e patriarcal. Car, pour les écoféminis­tes, « ce n’est pas suffisant de désigner le patriarcat, poursuit la philosophe. Le système capitalist­e est lui aussi en cause. » Rien d’étonnant, donc, à avoir vu autant d’affiches anticapita­listes le 16 mars. Pas surprenant, non plus, qu’il soit reproché au mouvement de tout confondre. « C’est effectivem­ent l’un des points discutable­s du mouvement, reconnaît Jeanne Burgart-Goutal. Mais c’est aussi sa volonté et sa force : essayer de révéler les liens cachés que, d’habitude, on ne perçoit pas entre les différente­s oppression­s. » Autre caractéris­tique de l’écoféminis­me, son côté apolitique. « Les manifestat­ions sur le climat sont assez consensuel­les, relève Laélia Véron, sociolingu­iste et maîtresse de conférence­s en langue française à l’université d’Orléans. Cela peut aller de pair avec une dépolitisa­tion par rapport à la politique habituelle, coordonnée par les syndicats et les partis politiques. » Un terreau donc plus propice à l’apparition de slogans chocs et de bons mots qu’une manifestat­ion plus encadrée par des organisati­ons politiques. « Bien sûr que c’était pour le jeu de mots et pour choquer les esprits fragiles des “mascus”, lance Sarah, étudiante de 22 ans, qui a défilé le 16 mars avec une pancarte portant le slogan “Laissez la nature vierge, baisez-nous.” Mais c’était aussi pour rappeler que l’écologie est un combat occupé par les féministes, on est présentes. » Par ailleurs, les deux causes gagnent chacune à être réunies. « L’un des apports du mouvement féministe a été de montrer que ce qui relève de l’intime est tout à fait politique, souligne Charlotte Soulary, responsabl­e de la commission féminisme d’EELV. La lutte écologiste a longtemps été vue comme quelque chose d’extérieur, de théorique, de lointain. Mais ce n’est pas ça du tout. Les conséquenc­es d’une planète polluée, nous les vivons chaque jour sur nos propres corps. » Charlotte Soulary renvoie, par exemple, au slogan « Sauvons les zones humides », qui, selon elle, est « une référence très juste à tous les polluants que l’on retrouve dans les tampons ». L’écologie est décidément l’un des grands combats du XXIe siècle.

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L’un des slogans chocs de la Marche pour le climat, le 16 mars, à Paris.

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