Handicap invisible, intégration difficile
Lorsqu’il n’est pas flagrant, il est rarement pris en compte
« Oublié, ignoré et maltraité. » Pour décrire la perception qu’a la société du handicap invisible, Jean-louis Garcia, président de l’association pour adultes et jeunes handicapés (Apajh), n’y va pas par quatre chemins. Cette notion, « qui concerne 80 % des personnes en situation de handicap », rassemble, comme son nom l’indique, tous les handicaps qui ne se voient pas. « Dès que l’on nous parle d’accessibilité, nous savons que c’est en pensant aux personnes en fauteuil roulant, poursuit Jean-louis Garcia. Mais le handicap peut aussi être mental, psychique ou encore découler d’une maladie invalidante. » Invisibles, ces handicaps sont donc trop fréquemment oubliés quand il s’agit d’adapter des logements, des entreprises ou des bâtiments publics. «Si l’on installe un ascenseur, en quoi cela va-t-il vous aider si vous êtes schizophrène?» lance Jean-louis Garcia. Selon Bertrand Quentin, philosophe et auteur des Invalidés. Nouvelles réflexions philosophiques sur le handicap (éditions Érès), qui paraît ce jeudi, le handicap invisible peut créer chez les personnes concernées « un malaise plus profond, aux effets très insidieux», que le handicap visible. «On pourrait se dire que c’est plus facile pour être inclus dans la société mais, en réalité, pas tant que ça, note-t-il. Certes, un handicap physique manifeste crée une difficulté immédiate, car il ne peut pas être caché. Mais, sur le long terme, l’entourage peut s’y habituer pour ne voir que la personne.»
Alors que, dans le cas du handicap invisible, la personne concernée « risque de ne pas oser en parler, ce qui peut créer des difficultés, des incompréhensions quant à ses comportements inattendus, que l’on ne peut pas décoder, faute de connaître son handicap », complète-t-il.
Adapter le poste de travail
Gérard Lefranc, directeur de la mission handicap du groupe Thales, précise qu’en raison de sa volonté de prendre en compte le handicap invisible, l’entreprise « aborde la question du handicap dès l’entretien d’embauche. Nous pourrons mettre en place des éléments de compensation ou d’adaptation. » Or, « avec ces adaptations du poste ou des conditions de travail, le handicap invisible deviendra visible ». Pour cette raison, « nous n’imposons rien, assure-t-il. Tout se fait en accord avec le salarié. »
Evoquer son handicap peut être difficile et risqué, dénonce Jean-louis Garcia, de l’apajh : «Lors d’un recrutement, parler de son handicap peut ouvrir des droits, mais aussi fermer des portes. Car certaines entreprises rechignent à s’adapter ou privilégient des handicaps auxquels elles peuvent plus facilement s’adapter. » Des discriminations… invisibles.
« En parler peut ouvrir des droits, mais aussi fermer des portes.» Jean-louis Garcia, Apajh