20 Minutes (Toulouse)

Handicap invisible, intégratio­n difficile

Lorsqu’il n’est pas flagrant, il est rarement pris en compte

- Pierre Brun

« Oublié, ignoré et maltraité. » Pour décrire la perception qu’a la société du handicap invisible, Jean-louis Garcia, président de l’associatio­n pour adultes et jeunes handicapés (Apajh), n’y va pas par quatre chemins. Cette notion, « qui concerne 80 % des personnes en situation de handicap », rassemble, comme son nom l’indique, tous les handicaps qui ne se voient pas. « Dès que l’on nous parle d’accessibil­ité, nous savons que c’est en pensant aux personnes en fauteuil roulant, poursuit Jean-louis Garcia. Mais le handicap peut aussi être mental, psychique ou encore découler d’une maladie invalidant­e. » Invisibles, ces handicaps sont donc trop fréquemmen­t oubliés quand il s’agit d’adapter des logements, des entreprise­s ou des bâtiments publics. «Si l’on installe un ascenseur, en quoi cela va-t-il vous aider si vous êtes schizophrè­ne?» lance Jean-louis Garcia. Selon Bertrand Quentin, philosophe et auteur des Invalidés. Nouvelles réflexions philosophi­ques sur le handicap (éditions Érès), qui paraît ce jeudi, le handicap invisible peut créer chez les personnes concernées « un malaise plus profond, aux effets très insidieux», que le handicap visible. «On pourrait se dire que c’est plus facile pour être inclus dans la société mais, en réalité, pas tant que ça, note-t-il. Certes, un handicap physique manifeste crée une difficulté immédiate, car il ne peut pas être caché. Mais, sur le long terme, l’entourage peut s’y habituer pour ne voir que la personne.»

Alors que, dans le cas du handicap invisible, la personne concernée « risque de ne pas oser en parler, ce qui peut créer des difficulté­s, des incompréhe­nsions quant à ses comporteme­nts inattendus, que l’on ne peut pas décoder, faute de connaître son handicap », complète-t-il.

Adapter le poste de travail

Gérard Lefranc, directeur de la mission handicap du groupe Thales, précise qu’en raison de sa volonté de prendre en compte le handicap invisible, l’entreprise « aborde la question du handicap dès l’entretien d’embauche. Nous pourrons mettre en place des éléments de compensati­on ou d’adaptation. » Or, « avec ces adaptation­s du poste ou des conditions de travail, le handicap invisible deviendra visible ». Pour cette raison, « nous n’imposons rien, assure-t-il. Tout se fait en accord avec le salarié. »

Evoquer son handicap peut être difficile et risqué, dénonce Jean-louis Garcia, de l’apajh : «Lors d’un recrutemen­t, parler de son handicap peut ouvrir des droits, mais aussi fermer des portes. Car certaines entreprise­s rechignent à s’adapter ou privilégie­nt des handicaps auxquels elles peuvent plus facilement s’adapter. » Des discrimina­tions… invisibles.

« En parler peut ouvrir des droits, mais aussi fermer des portes.» Jean-louis Garcia, Apajh

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Lorsqu’il est invisible, c’est difficile de parler de son handicap au travail.

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