20 Minutes (Toulouse)

Quel impact la condamnati­on de Sandra Muller peut-elle avoir sur #Balanceton porc ?

Pour la justice, le harcèlemen­t sexuel de Sandra Muller n’était pas caractéris­é

- Hélène Sergent

Le 29 mai dernier, la justice française s’est penchée pour la première fois sur l’émergence du mouvement #Balanceton­porc, né sur Twitter. Poursuivie en diffamatio­n par Eric Brion, ex-patron de la chaîne Equidia qu’elle accusait de harcèlemen­t sexuel, la journalist­e Sandra Muller a été condamnée ce mercredi à une peine de 15 000 € de dommages et intérêts au titre du préjudice moral subi par Eric Brion. Devenue malgré elle le symbole de la libération de la parole des femmes, Sandra Muller a dénoncé, au cours d’une conférence de presse, une procédure «bâillon». La justice, dans sa décision rendue mercredi, a estimé qu’aucun élément ne permettait de caractéris­er les faits de harcèlemen­t sexuel décrits dans le message posté le 13 octobre 2017 par la journalist­e.

Un message aux femmes ?

«C’est une procédure destinée à faire taire les victimes qui pourraient parler, une procédure qui pourrait couper les ailes des victimes qui ont parlé. Le message envoyé est clair, c’est “taisez-vous” », s’est émue Sandra Muller dans les locaux du cabinet de son avocat Francis Szpiner. Mais que dit exactement la 17e chambre dans sa décision? Les magistrats ont estimé que le harcèlemen­t n’était pas caractéris­é pour plusieurs raisons. Eric Brion n’était pas le supérieur hiérarchiq­ue de la journalist­e, il n’y a pas eu de caractère répété dans les propos déplacés tenus par le plaignant et aucune preuve n’a été apportée sur la véracité des propos tenus et cités dans le tweet de Sandra Muller : «Tu as des gros seins. Tu es mon type de femme. Je vais te faire jouir toute la nuit.»

Comme sa cliente, Francis Szpiner estime que cette décision « hors sol » ne sera pas sans conséquenc­e pour la libération de la parole des femmes : « C’est de nature à faire réfléchir celles qui veulent parler. Et quand vous êtes victime, vous n’avez pas forcément une réaction froide et rationnell­e. » Contacté par 20 Minutes, l’ex-patron d’equidia à l’origine des poursuites évoque de son côté un «immense soulagemen­t» et réfute toute volonté de faire taire Sandra Muller. «Je souhaite que les femmes parlent, que ça continue mais pas en mentant ou en blessant. Moi, j’ai été balancé sur les réseaux sociaux, et je n’ai pas pu me défendre», souligne-t-il. Pour la pénaliste Anne-sophie Laguens, il faut nuancer la portée de cette décision. «Je ne crois pas que cela aura pour effet de décrédibil­iser le mouvement. Mais le premier terrain à investir quand on est victime de harcèlemen­t, c’est le cabinet d’avocats, le commissari­at de police ou le terrain associatif.» Malgré ce revers, Sandra Muller a déjà fait savoir qu’elle ferait appel de cette condamnati­on.

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Sandra Muller lors d’une conférence de presse après son jugement.

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