La machine à prévoir les blessures
Une étude pour réduire le risque et la durée des douleurs est menée par le Stade toulousain
Un peu de gel, puis une sonde échographique qui vagabonde sur la cuisse endolorie de Pierre Fouyssac, le troisquarts centre du Stade Toulousain. A priori, l’étude menée depuis la semaine dernière dans les locaux d’ernest-wallon, en collaboration avec le CHU de Toulouse et l’entreprise japonaise Canon, n’a rien de révolutionnaire. Pourtant, ses initiateurs placent beaucoup d’espoirs dans ce travail autour de «la solidité du tissu musculaire blessé ». L’objectif : prévoir au mieux la date de reprise du rugbyman souffrant, et prévenir la rechute. Tout sauf du luxe, dans un sport où certains pros passent autant de temps à l’infirmerie que sur la pelouse. «Il s’agit de trouver le moment où l’on peut dire au sportif : “Voilà, tu peux reprendre à haut niveau, sans risque de récidive”», explique le Pr Nicolas Sans, chef du pôle imagerie médicale au CHU. A ce jour, dans le sport de haut niveau, il y a déjà des examens médicaux bien sûr, mais aussi pas mal de «pifomètre», à base de ressenti de la part du sportif et du staff. Un coup de pression du coach, et voilà notre ailier a priori remis d’une déchirure relancé dans le grand bain du Top 14 ou de la Pro D2. Avant de se blesser de nouveau… « Le but n’est pas de raccourcir les délais mais d’être le plus pertinent possible», assure Philippe Izard, responsable médical du secteur professionnel chez le champion de France. Et pour cela, l’échographe haut de gamme présent dans les installations du club intègre une arme : un élastographe. Ce bijou technologique quantifie la dureté du muscle blessé (dans 99 % des cas sur un membre inférieur) en kilopascals. Comme chaque joueur est différent, le résultat est comparé à la jambe saine. A rythme régulier, l’action de courte durée (environ dix minutes) est répétée jusqu’à ce que les valeurs du muscle lésé et de son jumeau en bon état correspondent. Au fil des examens, les exercices de reprise (musculation, courses…) sont adaptés à l’état du convalescent, jusqu’à la reprise totale.
« On voudrait étendre ce qu’on fait pour les pros aux catégories de jeunes du Stade Toulousain, avance Philippe Izard. Il n’est pas exclu que dans un avenir un peu plus lointain, on puisse intégrer d’autres associations de notre club omnisports, voire d’autres structures. » Cette étude pourrait également trouver une application chez l’individu lambda. « Pour déterminer la date d’un retour au travail, un changement de poste et déterminer des séquelles», détaille le médecin. Il faudra alors se souvenir que tout est parti, ou presque, de la cuisse de Pierre Fouyssac.
L’objectif : prévoir au mieux la date de reprise du rugbyman souffrant et prévenir la rechute.