20 Minutes (Toulouse)

Aligner une équipe, une sacrée mission pour les Tonga

Opposés aux Français dimanche, les iliens ont eu du mal à construire leur groupe

- De notre envoyé spécial au Japon, William Pereira

C’est l’un des gestes de ce début de Mondial : un plaquage lunaire du Tongien Zane Kapeli sur l’anglais Billy Vunipola. Y avait-il un peu d’amertume dans ce contact ? Peut-être. Y en avait-il dans la réaction du coach des Tonga, Toutai Kefu, à la déclaratio­n de Vunipola sur son sentiment d’appartenan­ce au peuple tongien, en dépit de son choix de représente­r le XV de la Rose ? Assurément : « Il a dit ça ? Il devrait jouer pour nous, alors.» On comprend sa frustratio­n. Composer un groupe de 31 joueurs pour cette Coupe du monde a été une galère sans nom, et ça se ressent dans les résultats, avec deux défaites en deux matchs, avant d’affronter les Bleus dimanche. «C’est un défi auquel on est toujours confrontés, avec des joueurs qui se voient offrir un meilleur contrat pour rester [dans leur club] plutôt que d’aller au Mondial, expliquait le coach adjoint des Tonga, Pita Alatini, au site néo-zélandais Stuff. Ils ont besoin de prendre soin de leur famille.» Siua Maile, du haut de ses 22 ans, a aussi une famille à nourrir. A peine marié, papa depuis un mois, le talonneur a pourtant mis de côté son job de couvreur en Nouvelle-zélande pour représente­r les Tonga au Japon. Si son employeur ne l’a pas renvoyé, il l’a prévenu : il ne lui versera pas un kopeck pendant cette parenthèse internatio­nale. Une décision qui a poussé le club amateur de rugby de Shirley à lancer une collecte de fonds pour aider son joueur. Cagnotte ou pas, le bonhomme aurait quoi qu’il arrive fait ses valises pour le Japon, tant l’opportunit­é est tombée de nulle part. Siua Maile a été repéré par le staff grâce à une bouteille à la mer jetée sur Facebook. « Ça peut paraître marrant, mais c’est vraiment ce qu’il s’est passé, il nous fallait trouver un talonneur, racontait Dan Cron, membre du staff tongien. On l’a rencontré en arrivant à l’aéroport, sauf que personne ne savait à quoi il ressemblai­t!»

La façon dont le joueur a été repéré ressemble à celle utilisée pour son coéquipier Zane Kapeli. «Notre plus grande faiblesse est aussi notre plus grande force, reprend Dan Cron. On peut faire venir des joueurs dont personne n’a jamais entendu parler et les préparer à disputer des matchs internatio­naux de niveau mondial. Quand il a fallu trouver quelqu’un en urgence il y a un an, on a vu une vidéo de lui [Kapeli] à la lutte pour récupérer trois ballons aériens, et j’ai tout de suite su que Zane valait quelque chose. » En novembre 2018, le troisième ligne tongien célébrait sa première cape contre la Géorgie. Un an plus tard, il se retrouve sous les projecteur­s pour son plaquage sur Vunipola et suscite déjà l’intérêt de Bordeaux. Le rêve américain sauce Pacifique.

« On peut faire venir des joueurs dont personne n’a jamais entendu parler. » Dan Cron, coach adjoint tongien

 ??  ?? Les joueurs des Tonga sont de retour. Pour nous jouer un mauvais tour?
Les joueurs des Tonga sont de retour. Pour nous jouer un mauvais tour?

Newspapers in French

Newspapers from France