20 Minutes (Toulouse)

La France devrat-elle rapatrier ses djihadiste­s ?

L’offensive turque à la frontière syrienne contre les Kurdes contrarie le pouvoir français, qui refuse de rapatrier ses ressortiss­ants

- Hélène Sergent

Entre 400 à 500 combattant­s français se trouveraie­nt toujours dans les geôles et camps tenus par les Kurdes dans le nord-est de la Syrie. L’offensive turque contre les forces kurdes, démarrée mercredi, rebat toutes les cartes. La ministre des Armées, Florence Parly, l’a reconnu dans un tweet mercredi, « l’offensive turque dans le Nord-est syrien est dangereuse. Dangereuse pour la sécurité des Kurdes. Dangereuse car elle est propice à Daesh, contre qui nous nous battons depuis cinq ans. » Depuis l’automne 2017, la France refuse de rapatrier ses ressortiss­ants et laisse ses alliés « gérer » la détention des djihadiste­s étrangers capturés.

« Si les affronteme­nts entre Kurdes et Turcs s’intensifie­nt, la priorité des Kurdes sera de rester en vie et de défendre leurs population­s. Ils diront au monde entier et notamment aux Européens : occupez-vous de vos prisonnier­s ! », analyse Karim Pakzad, chercheur à l’institut de relations internatio­nales et stratégiqu­es.

Une avocate en colère

Dans une déclaratio­n officielle diffusée le 7 octobre, le Quai d’orsay déclarait : « Les combattant­s terroriste­s qui sont en détention, y compris ceux de nationalit­é étrangère, doivent faire l’objet d’un jugement là où ils ont commis leurs crimes. Ce jugement et leur détention sûre dans le nord-est de la Syrie sont par ailleurs un impératif de sécurité pour éviter qu’ils ne viennent renforcer les rangs des groupes terroriste­s. Toute initiative pouvant remettre en cause ces objectifs doit être évitée. » Avocate de plusieurs femmes françaises détenues, Marie Dosé peine à cacher sa colère : « Voilà deux années que je dis que les rapatrieme­nts sont inéluctabl­es, d’un point de vue humanitair­e mais aussi sécuritair­e. Ce qui se passe a été anticipé par tous les spécialist­es de l’antiterror­isme, sauf par le gouverneme­nt français. » La Maison-blanche préconise de faire passer les djihadiste­s européens, dont les capitales refusent le rapatrieme­nt, sous la « responsabi­lité » des Turcs. Une solution rejetée par la France. « Ce serait inacceptab­le moralement, commente Karim Pakzad, cela reviendrai­t à dire à la Turquie : on vous laisse détruire les forces kurdes si vous vous occupez de nos prisonnier­s ! » Contacté par L’AFP, le représenta­nt kurde des Forces démocratiq­ues syriennes, Khaled Issa, s’est montré rassurant : « Sur les djihadiste­s [étrangers], notre coopératio­n [avec la France] continue dans des conditions difficiles. On maintient avec force et rigueur notre coopératio­n. » Marie Dosé, elle, est particuliè­rement pessimiste quant au sort des djihadiste­s français et de leurs familles : « Soit ils vont finir par mourir sous les bombes d’erdogan, soit ils vont se disperser. C’est ce qu’il s’était passé en Irak. On fabrique du terrorisme. C’est un immense scandale. »

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Les bombardeme­nts se sont poursuivis, jeudi, à la frontière turco-syrienne.

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