20 Minutes (Toulouse)

«La positivité, c’est une arme »

EXCLUSIF. Avant de se produire au Vélodrome ce soir et samedi, le rappeur Soprano évoque sa ville, Marseille, et les messages qu’il souhaite faire passer.

- Propos recueillis par Mathilde Ceilles, à Marseille

C’est un moment historique pour le rap français, et pour l’homme, modeste Marseillai­s issu des quartiers Nord devenu une superstar. Ce vendredi et samedi, Soprano remplit deux stades Vélodrome d’affilée, et le premier concert sera même diffusé en direct sur TMC (21 h 15). Auprès de 20 Minutes, le rappeur revendique sa manière de faire de la politique et se veut le porte-voix des quartiers populaires.

N’est-ce pas un symbole pour vous de remplir le Vélodrome, quand on sait le mal qui a été dit du rap dans le passé ?

Depuis le début de ma carrière, je voulais casser ces clichés-là. C’est un grand mot, la musique urbaine ! Il y a des artistes qui sont caillera, d’autres qui sont poétiques, d’autres, c’est des lovers, d’autres sont plus engagés sociétalem­ent parlant…

Que répondez-vous à ceux qui disent que vous ne faites plus du rap ?

C’est simplement parce que je ne parle pas mal. Aujourd’hui, un rappeur, il faut qu’il dise qu’il a vendu de la drogue. Il faut qu’il dise qu’il est méchant, qu’il insulte les mères, les femmes. Moi, je ne suis pas comme ça ! Je suis un père de famille, un mari. J’ai 40 ans et des responsabi­lités. Moi, j’essaie d’envoyer un message positif. Ce n’est pas pour les ados, mais pour les beaucoup plus jeunes. Leur montrer qu’un mec qui vient des quartiers peut faire quelque chose sans être obligé de penser au trafic. Aujourd’hui, il y a vraiment deux mondes en fait, en particulie­r à Marseille. Il y a un côté dela ville qui est magnifique. C’est superbe, et les touristes y viennent. Et puis il y a un autre Marseille, avec des jeunes qui sont totalement coupés de la réalité du centre-ville.

En parlant de Marseille, vous qui dites vous méfier de la politique, pourquoi avoir signé la tribune du Monde très critique envers Jean-claude Gaudin après l’effondreme­nt de la rue d’aubagne ?

Je me méfie de la politique, je fais de la musique. Mais là, ce n’était pas pareil. C’était pour que les familles comprennen­t que je les soutiens. C’est important de le montrer lors de cet événement malheureux. On ne peut pas être gentillet, rester comme ça alors qu’on sait très bien, et ça fait des années, que tous ces bâtiments sont dans cet état. Mais c’était surtout pour appuyer sur le fait que les familles sont soutenues.

Oui, mais la tribune ne parlait pas vraiment de ça. C’était une critique virulente envers la gestion de la ville…

Quand c’est arrivé, on était tous énervés, car ça faisait longtemps que c’était comme ça. Il faut donner un coup de pied dans la fourmilièr­e ! En fait, là, ça dépasse l’artiste. Là, c’est le petit Saïd du Plan d’aou [son quartier d’origine] qui a parlé, parce qu’il était révolté, fatigué de voir ça ! Je pense que c’est pareil pour Akhenaton [rappeur du groupe IAM] et les autres artistes qui ont signé. C’était un ras-le-bol. C’était pour sonner l’alarme. Oh, qu’est-ce qui se passe ?

Donc vous en faites bien, de la politique, Soprano ?

Je fais de la politique avec ma musique. Et ma politique est simple, c’est l’humanisme. J’essaie de ramener de la positivité. Car la positivité, c’est une arme. On amène tellement de négativité qu’il y a des familles qui vivent avec la peur. Elles abandonnen­t car elles se disent que, dans tous les cas, c’est mort, c’est foutu. Alors que, quand quelqu’un arrive, positif, avec des projets, et qu’il dit à chaque fois, à la télévision, dans les interviews, qu’il vient des quartiers, ça booste… Le fait d’entendre cette phrase, c’est simple, de ne pas renier d’où tu viens, ça donne de la force à ceux qui y sont encore. Ils se disent : « Regarde ! On va y arriver! Peut-être que les politiques ne nous aideront pas, qu’ils ne nous ont jamais écoutés, mais par ses actions, il a réussi à le faire ! Pourquoi on n’y arriverait pas nous aussi ? » Le Vélodrome, ce sera un énorme meeting politique, positif, où l’on sera tous des phénix et où l’on va montrer qu’on peut réussir !

« A Marseille, certains jeunes sont coupés de la réalité du centrevill­e. »

« J’essaie de ramener de la positivité, car c’est une arme.»

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 ??  ?? Ce vendredi et samedi, le Marseillai­s Soprano va donner au Vélodrome deux concerts exceptionn­els, dont l’un (ce vendredi) sera diffusé en direct sur TMC.
Ce vendredi et samedi, le Marseillai­s Soprano va donner au Vélodrome deux concerts exceptionn­els, dont l’un (ce vendredi) sera diffusé en direct sur TMC.

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