Les discours haineux dans l’oeil du collectif Sleeping Giants
Le collectif Sleeping Giants lutte contre les paroles de haine dans les médias
Ils s’appellent les Sleeping Giants, en référence à ces forces en sommeil qui, quand on les réveille, deviennent puissantes. Depuis quelques jours, ce collectif de citoyens, qui lutte contre le financement des discours de haine, est sous le feu des projecteurs. Il a réussi à faire plier plusieurs annonceurs, qui ont retiré cette semaine leurs spots publicitaires diffusés sur Paris Première durant l’émission du polémiste d’extrême droite Eric Zemmour. Interpellées sur les réseaux sociaux, les marques Nutella (Ferrero), Maaf, Maif, Groupama ou PSA ont décidé de boycotter l’émission dans laquelle intervient le journaliste, condamné en septembre pour provocation à la haine raciale et religieuse.
« Notre objectif est de frapper au portefeuille les sites d’extrême droite et les émissions véhiculant des contenus haineux », indique à 20 Minutes le collectif, créé en 2016 aux Etatsunis, dans la foulée de l’élection de Donald Trump. Et cela semble fonctionner outre-atlantique, où le collectif a déjà privé Breitbart News, le site de Steve Bannon, de près de 90 % de ses revenus publicitaires. En France, les militants comptent aussi plusieurs victoires à leur actif. Plus de 1 000 annonceurs ont ainsi déjà bloqué Boulevard Voltaire, site d’extrême droite fondé par Robert Ménard.
«Notre action est ouverte à tous, explique Rachel, l’une des cofondatrices de Sleeping Giants France, qui préfère utiliser un prénom d’emprunt. Notre seul intérêt, c’est de lutter contre l’intolérance, la haine et la désinformation. » Comme elle, la plupart des militants du collectif agissent de manière anonyme. « L’anonymat est un élément important dans la philosophie des Sleeping Giants, explique Tristan Mendès France, maître de conférences associé à l’université Paris-diderot, spécialiste des cultures numériques. Leur action est comparable à cet égard à celle des Anonymous [groupe d’hacktivistes]. »
«Responsabiliser les acteurs»
Toucher au porte-monnaie les médias tenant des propos haineux ou jugés racistes, « c’est une nouvelle forme d’activisme, reconnaît Tristan Mendès France.c’est à la base une pratique plutôt anglo-saxonne, mais qui commence à rentrer dans les usages en France. L’idée n’est pas d’interdire ou de boycotter, mais de responsabiliser les acteurs économiques. » De plus en plus de citoyens semblent aujourd’hui réceptifs à cette forme de militantisme. « Nous recevons chaque jour de très nombreuses candidatures sur les réseaux sociaux d’internautes, qui voient que nos actions au quotidien aboutissent à de véritables résultats », confirme Rachel, qui tient à préciser que le collectif ne reçoit aucun financement.
«Notre objectif est de frapper au portefeuille les sites d’extrême droite. » Sleeping Giants