Encore un twist au Royaume-uni
Boris Johnson a été contraint samedi d’envoyer à Bruxelles une lettre demandant le report du divorce avec L’UE
On pensait avoir tout vu sur le Brexit, mais les Britanniques arrivent encore à nous surpendre. Samedi, leur Parlement, réuni en session exceptionnelle, devait voter pour autoriser – ou non – l’accord obtenu à l’arraché jeudi entre l’union européenne et le Royaume-uni. Un accord qui avait le mérite de régler la question de la frontière entre les deux Irlandes. Boris Johnson, le chef du gouvernement britannique, a commencé fort la journée en indiquant qu’il était temps d’avancer, qu’un report du Brexit serait coûteux et désastreux et qu’il fallait à nouveau «unir» la nation en tranchant sur ce sujet qui divise le pays depuis trois ans. C’était sans compter le député conservateur Oliver Letwin.
Ce dernier a déposé un amendement proposant qu’aucun vote ne puisse avoir lieu tant que toutes les législations inscrivant le Brexit dans la loi primaire britannique n’avaient pas été adoptées. Or, ce processus n’est prévu que pour cette semaine.
Amendement surprise
Le député a justifié son amendement par deux raisons. Premièrement, les pro-accords ont peur que même en cas de vote favorable du Parlement, les lois ne soient pas adoptées à temps, aboutissant à un «no deal» par défaut le 31 octobre – scénario redouté des milieux économiques et faisant craindre des perturbations aux frontières, des pénuries de produits alimentaires et médicaments ainsi qu’une poussée des prix, voire une récession. Deuxièmement, son amendement offre une vision moins binaire des choses : «Le Premier ministre a une stratégie, il veut pouvoir dire aux hésitants que c’est son accord ou pas d’accord (…). Je ne pense pas qu’il soit responsable de mettre ainsi la nation en danger en formulant une telle menace», a-t-il insisté. Des arguments qui ont, semble-t-il, convaincu les députés, puisque l’amendement a été voté avec 322 voix pour et 306 contre, plongeant l’avenir du Royaume-uni encore plus dans le flou.
Selon le Benn Act, une autre loi, Boris Johnson est forcé de demander un report de trois mois à L’UE, consécutivement à ce vote. C’est donc contraint que le chef de file conservateur a adressé au Conseil européen une lettre formalisant cette demande. Mais qu’il n’aurait pas signée, selon plusieurs médias britanniques. Il a en revanche envoyé une deuxième lettre, signée, elle, spécifiant qu’il ne voulait pas d’un nouveau délai. Enfin, l’ambassadeur britannique auprès de L’UE, Tim Barrow, s’est lui aussi fendu d’un courrier, précisant que le report n’avait été demandé que pour se plier à la loi. Dimanche, les ambassadeurs des 27 poursuivaient le processus de ratification du Brexit. La demande de report devrait faire l’objet de consultations susceptibles de durer «plusieurs jours». L’elysée, pour sa part, a rappelé qu’un «délai supplémentaire n’[était] dans l’intérêt de personne et qu’un accord [avait été] négocié».