L’appel au boycott des produits français par des pays musulmans peut-il avoir un impact ?
Des appels à se passer de produits français ont été lancés après les récents propos de Macron sur l’islam
Pas de confitures St. Dalfour dans les rayons des magasins qataris. Pas plus que de Babybel ou de Kiri dans ceux du Koweït. Sans parler des réservations de vols à destination de Paris, désormais suspendues dans 450 agences de voyage. Les appels au boycott de produits français se sont multipliés ce week-end dans plusieurs pays du Moyen-orient, après les propos d’emmanuel Macron, qui a promis de ne pas « renoncer aux caricatures » du prophète Mahomet lors de l’hommage rendu à Samuel Paty, cet enseignant de Conflans-sainte-honorine (Yvelines) assassiné le 16 octobre.
Plutôt un message symbolique qu’un mouvement de masse.
Outre le Qatar et le Koweït, la Turquie, l’iran et la Jordanie ont appelé à bouder les produits « made in France ». Au Pakistan, le Premier ministre, Imran Khan, s’en est pris au président français, l’accusant «d’avoir attaqué l’islam» et «blessé des millions de musulmans dans le monde». Comme ceux rassemblés à Ras-al-ain, dans le nord de la Syrie, et qui, en réaction, ont brûlé dimanche un drapeau français. Les images sont d’autant plus impressionnantes que la foule brandit, en opposition, le drapeau noir de Daesh. La preuve que l’on se trouve plutôt en face d’un message symbolique que d’un mouvement de masse. « Le boycott de produits français au Moyen-orient est une première, mais il ne faut pas le surestimer, indique Frédéric Encel, professeur de géopolitique à Sciences po, auteur des 100 Mots de la guerre (éd. PUF). On parle de cinq pays quand le monde compte 57 Etats à majorité musulmane. On parle du Qatar et de ses 3 millions habitants quand il y a 1,5 milliard de musulmans sur Terre. »
Sur le plan économique, ce boycott qui se répand essentiellement via les réseaux sociaux ne menace pas directement la France, les échanges commerciaux étant, de fait, limités. A titre d’exemple : l’hexagone n’a exporté, en 2019, « que » 600 millions d’euros de produits vers le Koweït, contre 70 milliards vers l’allemagne. «Surtout, si ce boycott se poursuit, ces pays vont subir un retour de sanctions avec un boycott de toute l’union européenne, prophétise Frédéric Encel. Ce ne serait pas vivable pour eux. »