20 Minutes (Toulouse)

Trop vite rendues, trop mal pensées

De nombreux profs de philosophi­e déplorent la piètre qualité des copies rendues par les élèves au baccalauré­at cette année

- Delphine Bancaud

Les profs redoutaien­t que les copies de philosophi­e du bac ne soient pas fameuses. Leur intuition semble avoir été confirmée. Cette année, entre la note obtenue à l’épreuve de philosophi­e et celle du contrôle continu, seule la meilleure sera retenue, à condition que le candidat ait rendu sa copie. Une mesure décidée par Jean-Michel Blanquer, ministre de l’Éducation, pour tenir compte des perturbati­ons dans les lycées provoquées par la crise sanitaire.

Des candidats « pas motivés »

Aussi, le jour de l’épreuve, le 17 juin, de nombreux témoignage­s faisaient état du départ précipité de candidats bien avant la fin de l’épreuve. « Comme nous le craignions, beaucoup de copies ont été rédigées très rapidement par des élèves qui n’étaient pas motivés par l’épreuve, car l’enjeu était trop faible », constate Nicolas Franck, président de l’Associatio­n des professeur­s de philosophi­e de l’enseigneme­nt public. Lui-même a corrigé 110 copies, qu’il a jugées « de qualité très médiocre » : « Elles étaient très bavardes, mais sans aucun contenu. J’ai senti que le plan avait été vaguement esquissé, mais que l’étape du brouillon avait été sautée. Beaucoup de candidats ont écrit au fil de la plume, fait des hors-sujets. »

André*, enseignant dans l’académie de Créteil, a constaté de fortes inégalités dans le rendu des élèves : « Sur 140 copies, j’ai pu observer que certains avaient joué le jeu, mais que d’autres savaient qu’ils n’avaient pas besoin d’obtenir une bonne note. Du coup, mes notes se sont étalées entre 2 et 18. » Les correcteur­s ont eu du mal à trouver des citations d’auteurs dans les

copies : « Elles contenaien­t peu de références philosophi­ques, et les candidats se sont beaucoup reposés sur des idées toutes faites », note Nicolas Franck. Si chaque année les correcteur­s ont droit à des références insolites, ils ont été encore servis cette année : « Un confrère a eu droit à une copie rédigée en morse, un autre, une en basque », s’étrangle Nicolas Franck. « Un candidat m’a cité Robin, l’acolyte de Batman », se désespère Benoît.

« Ce n’est pas le niveau intellectu­el des candidats qui a baissé, mais leur culture académique », précise André. Ce manque de profondeur s’explique en partie par la situation sanitaire : « Les élèves qui ont été en demi-jauge depuis novembre n’ont pas travaillé assez régulièrem­ent. Or on a besoin de temps pour construire une culture philosophi­que. » * Le prénom a été changé.

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M. Bureau / AFP L’épreuve de philosophi­e a été aménagée en raison de la crise sanitaire.
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