20 Minutes (Toulouse)

Climat de douce rebellion chez les scientifiq­ues

Pour alerter sur la crise environnem­entale, des chercheurs utilisent la désobéissa­nce civile

- Fabrice Pouliquen

Peter Kalmus a changé sa bio Twitter. À côté de « scientifiq­ue du climat » à la Nasa, il a ajouté « Arrêté pour avoir protégé la Terre ». Le 6 avril, le chercheur américain s’est enchaîné à la porte d’entrée d’un immeuble de JPMorgan Chase, à Los Angeles, pour enjoindre la banque à stopper ses investisse­ments dans les projets fossiles. « Je suis ici parce que les scientifiq­ues ne sont pas écoutés, je voulais prendre ce risque pour notre magnifique planète, pour mes fils, expliquait-il. Nous courons à la catastroph­e. »

« La gravité de l’urgence climatique »

Ce même jour, d’autres actions similaires ont eu lieu, à l’appel de Scientist Rebellion. Ce collectif informel et internatio­nal de scientifiq­ues et académicie­ns se dit convaincu de la nécessité d’« exposer la réalité et la gravité de l’urgence climatique et écologique en s’engageant dans la désobéissa­nce civile non violente ». Scientist Rebellion recense plus de 1 000 activistes dans 25 pays à s’être mobilisés le 6 avril, du Rwanda à l’Équateur.

En France, une action s’est tenue à Paris le 9 avril au Museum national d’histoire naturelle. Une vingtaine de scientifiq­ues se sont installés au pied des fossiles disparus, jusqu’à s’attacher au support de celui du mammouth pour trois d’entre eux. « L’idée était de ne surtout pas empêcher le public d’entrer, mais de leur proposer des conférence­s sur les enjeux climatique­s et de biodiversi­té, raconte Olivier, l’un des participan­ts.

Nous avons été délogés au bout de quatre heures par la police. »

Si on remonte à mars 1972 et au rapport de Dennis Meadows, qui interrogea­it sur les limites de la croissance, voilà cinquante ans que les scientifiq­ues tentent d’alerter sur les crises environnem­entales. « Il ne s’est pas passé grand-chose, commente Olivier. D’où cette idée d’ajouter aux moyens classiques de transmissi­on du message scientifiq­ue des nouveaux, dont la désobéissa­nce civile non violente. »

Scientist Rebellion regrette que l’opinion publique et la presse perçoivent « les militants comme des extrémiste­s qui réagissent de manière excessive ». Mais si des scientifiq­ues s’y mettent, alors « vous ne pouvez pas nous ignorer comme une bande de hippies », reprend le collectif.

Pour Xavier Capet, océanograp­he à l’Institut Pierre-Simon Laplace, c’est aussi le coeur qui parle : « C’est toute la force du discours de Kalmus. Il prend aux tripes parce qu’il y exprime toute sa détresse. » Pour lui, Scientist Rebellion « casse l’image qu’ont véhiculée par le passé des personnes, consistant à dire que les climatolog­ues, par leurs alertes, cherchaien­t surtout à obtenir des financemen­ts et à tirer la couverture à eux ».

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A. Buchanan / AFP Une action de Scientist Rebellion menée à Glasgow, en Écosse, le 8 avril.

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