Lucas Pouille, un Français pas comme les autres
Le Nordiste est l’antithèse du joueur français habituel, et ça dérouille
Aucun Français n’avait battu Rafael Nadal depuis JoWilfried Tsonga en 2008, il y a un siècle. La victoire de Lucas Pouille dimanche sur l’Espagnol en quarts de finale de l’US Open (6-1, 2-6, 6-4, 3-6, 7-6) en est d’autant plus retentissante. Pascal, le papa de Lucas, nous explique un peu le phénomène, 22 ans, qui démonte tous les clichés associés au tennis français. Démonstration.
Il n’a pas tout cassé en junior (pour décevoir chez les pros). La fameuse génération des mousquetaires a synthétisé ce qui fait le charme et la faiblesse du tennis français. Des résultats monstrueux chez les juniors (Gasquet surtout, Monfils aussi), pour au final des espoirs déçus chez les pros. Pouille, lui, a souvent été blessé lorsqu’il était jeune. Personne ne l’attendait tout en haut chez les pros, un confort rare dans un pays qui cherche le successeur de Noah avec une certaine impatience.
« Lucas a toujours eu la volonté de se faire mal. Et il ne se cherche pas d’excuses. »
Il a un mental de Serbe. Figurezvous que Pouille et Nadal avaient déjà « matché » à l’US Open. C’était à l’entraînement, il y a dix jours, et le Français s’était fait marcher dessus, raconte son coach Emmanuel Planque à Tennis Actu. « Il avait pris trois sets. Nadal voulait faire un 4e, j’ai refusé, car je me suis dit : “Il va nous le mettre en slip.” Il a fait la tête, mais les entraînements d’après, il y était. » Le match d’après aussi, et cela dit tout de la force mentale du bonhomme, déjà entrevue en juillet lorsqu’il avait gagné son tout premier match de Coupe Davis face au Tchèque Vesely.
Il aime se faire mal. Pour preuve, il s’est installé à Dubaï (Emirats arabes unis), où il a pu s’entraîner cet hiver comme un goret avec Roger Federer et Andy Murray. « J’y suis allé une fois pour voir, c’était incroyable de violence, se souvient Pascal Pouille. L’intensité qu’ils mettaient sur cinq heures, même tenir ça une demi-heure, déjà, ça me paraissait impensable. Mais Lucas a toujours eu la volonté de se faire mal. Et il ne se cherche jamais d’excuses. »
Il n’a jamais caché son ambition. Celle de devenir le meilleur. « Mais il y a une grande différence entre l’ambition et la prétention, rappelle son père. Jamais on n’aurait pensé, et lui non plus, qu’il allait battre un jour Nadal sur le central de l’US Open. » Pour ce qui est de Monfils, son prochain adversaire, c’est plus facile à concevoir. En Australie en 2015, Pouille avait mené deux manches à rien, avant d’être rattrapé par son manque d’expérience. L’affaire a changé, a priori.