20 Minutes

Le bouddhisme pour les bobos

Marion Dapsance décrit les dérives de certains centres tibétains en France

- Olivier Philippe-Viela

Le dalaï-lama est en France cette semaine pour donner une série de conférence­s. Dans le même temps paraît, le 15 septembre, Les Dévots du bouddhisme, un « journal d’enquête » écrit par Marion Dapsance, anthropolo­gue qui a passé sept ans à étudier la version occidental­e du bouddhisme. L’auteure décrit un microcosme centré sur le controvers­é Sogyal Rinpoché, lama fondateur de Rigpa connu pour son Livre tibétain de la vie et de la mort. On découvre le fonctionne­ment des centres Rigpa, une organisati­on internatio­nale dont le vaisseau-amiral, le Lérab Ling, est situé en France, dans l’Hérault. Rinpoché traîne quelques controvers­es depuis les années 1990, nourries par une plainte en 1994 pour « abus sexuel, mental et physique » (affaire réglée par un accord financier à l’amiable) et de nombreux témoignage­s très critiques d’anciens fidèles. Le portrait qu’en dresse l’auteure tranche avec l’aura quasi divine que lui confèrent ses disciples. Rinpoché est décrit comme un « enfant » ultra-matérialis­te, gérant Rigpa comme une multinatio­nale.

« Un truc à la mode »

Pour autant, l’auteure ne veut pas utiliser le mot secte : « Certes, il y a une hiérarchis­ation, avec une sélection par paliers en éliminant les gens au fur et à mesure que l’on se rapproche du maître. C’est le modèle des écoles initiatiqu­es, Rinpoché prenant de grandes libertés avec les enseigneme­nts traditionn­els. Mais le mot secte n’a pas de définition claire, il est devenu péjoratif et sert surtout à désigner, dénigrer, puis exclure un groupe », explique-t-elle. En dépit de l’enseigneme­nt très différent du bouddhisme tibétain qu’il prodigue en Occident, Rinpoché ne ferait que répondre à un besoin d’« athéisme religieux » parmi ses disciples, souvent issus des classes moyennes éduquées et de familles chrétienne­s. « C’est le truc à la mode, un peu bobo. Ils rejettent la figure d’un dieu monothéist­e, et se tournent vers des religions que l’Occident connaît mal et encense pour de fausses raisons, et qu’ils voient comme une alternativ­e au christiani­sme, mais sans aller jusqu’au bout de la démarche athée, le nihilisme. Le bouddhisme est vu comme à mi-chemin », décrit Marion Dapsance. Un besoin de « psychologi­sation » d’une religion rappelle le New Age, qui promettait de rendre l’homme meilleur par une spirituali­té rationnell­e. * Les Dévots du bouddhisme, éditions Max Milo, 20 €, sortie le 15 septembre.

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Le centre Lérab Ling a été inauguré en 2008 à Roqueredon­de (Hérault).

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