Le bouddhisme pour les bobos
Marion Dapsance décrit les dérives de certains centres tibétains en France
Le dalaï-lama est en France cette semaine pour donner une série de conférences. Dans le même temps paraît, le 15 septembre, Les Dévots du bouddhisme, un « journal d’enquête » écrit par Marion Dapsance, anthropologue qui a passé sept ans à étudier la version occidentale du bouddhisme. L’auteure décrit un microcosme centré sur le controversé Sogyal Rinpoché, lama fondateur de Rigpa connu pour son Livre tibétain de la vie et de la mort. On découvre le fonctionnement des centres Rigpa, une organisation internationale dont le vaisseau-amiral, le Lérab Ling, est situé en France, dans l’Hérault. Rinpoché traîne quelques controverses depuis les années 1990, nourries par une plainte en 1994 pour « abus sexuel, mental et physique » (affaire réglée par un accord financier à l’amiable) et de nombreux témoignages très critiques d’anciens fidèles. Le portrait qu’en dresse l’auteure tranche avec l’aura quasi divine que lui confèrent ses disciples. Rinpoché est décrit comme un « enfant » ultra-matérialiste, gérant Rigpa comme une multinationale.
« Un truc à la mode »
Pour autant, l’auteure ne veut pas utiliser le mot secte : « Certes, il y a une hiérarchisation, avec une sélection par paliers en éliminant les gens au fur et à mesure que l’on se rapproche du maître. C’est le modèle des écoles initiatiques, Rinpoché prenant de grandes libertés avec les enseignements traditionnels. Mais le mot secte n’a pas de définition claire, il est devenu péjoratif et sert surtout à désigner, dénigrer, puis exclure un groupe », explique-t-elle. En dépit de l’enseignement très différent du bouddhisme tibétain qu’il prodigue en Occident, Rinpoché ne ferait que répondre à un besoin d’« athéisme religieux » parmi ses disciples, souvent issus des classes moyennes éduquées et de familles chrétiennes. « C’est le truc à la mode, un peu bobo. Ils rejettent la figure d’un dieu monothéiste, et se tournent vers des religions que l’Occident connaît mal et encense pour de fausses raisons, et qu’ils voient comme une alternative au christianisme, mais sans aller jusqu’au bout de la démarche athée, le nihilisme. Le bouddhisme est vu comme à mi-chemin », décrit Marion Dapsance. Un besoin de « psychologisation » d’une religion rappelle le New Age, qui promettait de rendre l’homme meilleur par une spiritualité rationnelle. * Les Dévots du bouddhisme, éditions Max Milo, 20 €, sortie le 15 septembre.