20 Minutes

Vaincre le cancer à grands coups de bulles

La maladie vue par deux dessinatri­ces de BD

- Oihana Gabriel

L’une a apprivoisé Günther, le cancer du sein, qui l’a frappée à 29 ans. L’autre fait vivre son lymphome sous les traits de Jean-Pierre, petit crabe orange. Lili Sohn et Alice Baguet ont transformé leur expérience de la maladie en bandes dessinées cocasses. Les deux jeunes femmes viennent échanger avec le public jeudi lors de la conférence « Dessine-moi un cancer »*, à l’Institut Curie, à Paris, et passer un message fort : oui, on peut bien vivre un cancer et en rire. « Je n’ai pas choisi de vivre cette aventure, alors au moins je décide de la façon de la traverser », raconte Lili Sohn, qui a sorti le troisième tome de La Guerre des tétons en octobre. « On a déjà un truc grave à gérer, alors le mieux, c’est d’en rire », renchérit Alice Baguet, qui prépare le deuxième tome de L’Année du crabe. Avec talent, elles transforme­nt la peur en rire, racontant les traitement­s, les réactions gênées de l’entourage, les prothèses mammaires et « les cheveux qui repoussent et on dirait des poils de cul »…

Dédramatis­er

Au début, le but n’était pas d’aider les patients à mieux traverser la maladie. « Quand j’ai annoncé mon cancer à mes amis, j’avais déjà pleuré toutes les larmes de mon corps, se souvient Lili Sohn. C’était très dur de gérer leur tristesse. Alors j’ai décidé de dessiner pour en parler une bonne fois pour toutes : je dédramatis­e aussi pour eux. » Elle a vite ouvert son blog, Tchao Günther. Aucun doute, croquer la vendeuse de prothèses mammaires, le papa aux réactions un poil sexistes, se transforme­r en Vénus de Milolo pour exorciser la perte d’un sein ont allégé cette année pas toujours facile. Peut-on rire du cancer ? Au vu du succès des deux auteures, le public semble en demande de cette attitude positive. « Ce n’est pas en le racontant que c’est devenu drôle, je l’ai vécu avec des paillettes, tranche Lili Sohn. Mon but, c’est que les gens se disent, finalement, ce n’est pas si grave. Même si ça n’a pas toujours été une partie de plaisir. » Et d’un coup, les gros mots comme hormonothé­rapie et monoboob font bien moins peur. Et les réactions du public ne sont pas toujours celles qu’elles attendent. « Dire que c’est possible de vivre bien son cancer, ça peut être vécu comme une agression pour certains, reprend Alice Baguet, qui a eu un cancer du sang à 19 ans. Parfois, le regard triste et l’ambiance de drame sont justifiés quand on évoque cette maladie, parfois non. Mais peu de gens le disent… et tout le monde n’est pas prêt à l’entendre. » * Conférence « Dessine-moi un cancer », jeudi 15 décembre, à 18 h à l’Institut Curie, 12, rue Lhomond, à Paris.

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