Poutou mène de front la lutte et sa campagne
A Blanquefort, le représentant du NPA lutte aussi pour conserver son emploi
Philippe Poutou nous a donné rendez-vous devant le siège de Ford Aquitaine Industrie, à Blanquefort, près de Bordeaux (Gironde). Le candidat du Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) à la présidentielle est remonté comme un coucou. Les dirigeants de l’entreprise américaine, qui l’emploient depuis 2000 à la maintenance, ont reporté une rencontre décisive pour l’avenir de ce site en sursis. Trois mille salariés il y a quinze ans, à peine 950 aujourd’hui, qui se demandent ce qu’ils vont devenir après mai 2018. C’est à cette date que l’engagement du constructeur sur le maintien de l’emploi en Gironde deviendra caduc. Ils sont à peine une quarantaine à avoir répondu à l’appel de la CGT. « Les gens ont le cul dans la graisse, ils savent qu’ils ne trouveront jamais un meilleur job ailleurs et, pourtant, ils ne se bougent pas, peste un participant. Heureusement qu’il y a Philippe et les autres pour se battre. » Pendant des années, Ford représentait tout pour les 16 000 habitants de Blanquefort, comme Michelin à Clermont, ou Peugeot à Sochaux. « Quand ça allait bien au début, les premières grèves, c’étaient des trucs à 20 dans les vestiaires pour les salaires, une fois par an », se marre Philippe Poutou. Et puis la lutte est devenue plus sérieuse, les licenciements succédant aux licenciements.
Pas de mélange des genres
Poutou n’est pas encore un homme politique, mais il commence à se faire une réputation de dur à cuire dans le coin. « On a beaucoup travaillé pour tenter de sauver le maximum d’emplois, se souvient Francis Wilsius. Philippe est parfois très extrême dans ses revendications, mais il a l’intérêt du collectif en lui », témoigne cet ex-salarié devenu conseiller régional et qui a décidé de parrainer le candidat du NPA. « Parce que c’est normal qu’un ouvrier puisse se présenter, toutes les catégories doivent être représentées à ce rendez-vous. » Qu’en pense Ford, qui le laisse travailler deux jours par semaine afin qu’il puisse mener campagne ? « Sa candidature n’a pas vocation à influencer la politique de Ford ou le travail des collaborateurs, qui, pour certains, ne savent même pas qu’il travaille chez nous », tranche un porte-parole de la firme. Personne, en revanche, pour reprocher au candidatouvrier un mélange des genres. « Il a parfois du mal à admettre que dialoguer, ce n’est pas se rendre complice, sourit Jean-Luc Gassies, élu de la CFTC. Mais il s’investit énormément, sans faire de prosélytisme pour son parti. » « Je crois pas avoir pris la grosse tête, reprend Philippe Poutou. Faut dire que c’est compliqué quand on fait 1 % ! »