Cinq jours qui font la différence
L’année lombarde est une pratique des banques méconnue qui peut vous coûter cher
Ce terme ne vous dit probablement rien, mais il parle à votre portefeuille. L’année lombarde est une pratique, vieille de plusieurs siècles et toujours d’actualité, consistant à calculer une année bancaire sur 360 jours au lieu de 365. Une différence de cinq petits jours, en apparence négligeable, mais qui peut affecter certaines échéances et, sur un crédit long, porter préjudice au client. Par exemple, sur un prêt de 100 000 €, au taux de 2,5 % par an. Divisés par 360 jours, les intérêts journaliers seront de 6,94 €, mais 6,84 € avec une base à 365 jours. Ramené à un prêt sur plusieurs années, l’impact peut être significatif. « L’année lombarde était utilisée par les banquiers italiens au Moyen Âge. Pour simplifier les calculs, on arrondissait les années à des mois de 30 jours et des années de 360 jours », raconte Me Yann Gré, avocat à Créteil. Interdite en France depuis 1995 et dénoncée par le Parlement européen trois ans plus tard, l’année lombarde reste pourtant en usage, aujourd’hui encore, dans de nombreuses compagnies, selon Me Gré. « L’un de mes clients, qui a obtenu gain de cause, va réaliser une économie de 300 000 euros d’intérêts sur trente ans », expose précisément l’avocat.
La preuve mathématique
Comment détecter cette pratique et s’en défendre ? Jusqu’en 2016, des clauses sur les contrats de prêt précisaient la méthode de calcul des intérêts, à présent disparues. « On peut repérer des échéances brisées [d’une longueur inégale aux autres] et faire le calcul soi-même, ou faire appel à des experts », égrène Me Gré. Une fois l’erreur constatée, le recours devant la justice s’impose. Attention : le délai de prescription fixée par le législateur est de cinq ans. Quant aux banques, elles auraient plutôt tendance à se défendre au cas par cas et privilégier le statu quo, souligne Delphine Ghighi, avocate spécialiste du contentieux bancaire. « Elles évitent de transiger sur tout ce qui pourrait remettre en cause la façon dont sont rédigés leurs contrats et engendrer un risque sériel. » L’enjeu pour elles est de ne pas encourager une multiplication des procédures. Pour obtenir gain de cause, le client devra donc faire appel à des conseils juridiques avisés, se doter d’un dossier solide avec des dates précises et apporter la preuve mathématique de son préjudice.