Le gouvernement doit corriger le tir
Le nouveau plan de lutte contre la radicalisation est présenté ce vendredi
Tout verrouiller pour éviter les écueils des prédécesseurs. A la veille de la présentation, ce vendredi à Lille, du nouveau plan de prévention de la radicalisation, son contenu restait totalement inconnu. Très dense, la stratégie lancée en mai 2016 sous le précédent gouvernement mélangeait 80 propositions de lutte contre le terrorisme, sur le renseignement pénitentiaire ou la détection de la radicalisation. Certaines se sont soldées par de cuisants échecs, poussant les acteurs de terrain et les autorités à une plus grande confidentialité.
« On est parti bille en tête en 2015, avec un gouvernement forcé de montrer qu’il était en capacité de gérer le phénomène, reconnaît Philippe Rigoulot, directeur de la Maison des adolescents, à Nîmes (Gard). Et c’est parti tous azimuts avec les dérives que l’on connaît : détournement de fonds, fermeture d’un centre d’accompagnement, etc. » Préfet et directeur général de l’Assemblée des départements de France, Pierre Monzani, lui, estime qu’« en 2015, la mobilisation sur le sujet de la radicalisation a été sans précédent. Pourtant, il y a eu une époque où ceux qui en parlaient étaient accusés de favoriser la haine. La sensibilisation et une forme de prise de conscience ont désormais pris le pas en la matière. »
Evaluer le précédent plan
Esther Benbassa, sénatrice EELV de Paris, a passé des mois avec sa collègue Catherine Troendle (LR) à évaluer la politique mise en place par l’Etat. Leur rapport, rendu public en juillet, évoquait la « panique » et la « précipitation » des autorités. Aujourd’hui, l’élue dénonce la stratégie de « communication » du gouvernement actuel : « Au lieu de remédier aux écueils, on se lance dans un nouveau plan. Mais c’est une affaire trop importante pour la sacrifier à la com- munication politique. » Une attaque balayée par l’exécutif, qui assure que tout ce qui a été mis en place précédemment a été scruté pour élaborer ce nouveau plan porté par le Premier ministre Edouard Philippe.
Si l’essentiel des annonces devrait concerner le volet préventif et éducatif, l’expérimentation des quartiers d’évaluation de la radicalisation (QER) pourrait être étendue dans plusieurs pri- sons. Philippe Rigoulot, en lien avec des adolescents radicalisés et leurs proches, espère voir dans ce nouveau plan une adaptation de la réponse de l’Etat : « On le sait, dans les mois qui viennent, il y aura de moins en moins de départs vers la Syrie ou l’Irak et davantage de gens qui se radicaliseront sur notre territoire. Il y a une réflexion à mener sur la question des retours qui reste gérée par des schémas anciens. » ■