« Shéhérazade » à bon conte
Cette lumineuse histoire d’amour entre une petite frappe et une prostituée mineure révèle deux jeunes acteurs non professionnels
Les deux adolescents de Shéhérazade, de Jean-Bernard Marlin, n’ont pas une vie facile dans les rues de Marseille. Pourtant, le petit délinquant et la prostituée s’aiment d’amour tendre. « Leur tendresse m’a motivé parce que c’est elle qui va les sauver », explique le cinéaste à 20 Minutes.
Pour ce premier long-métrage présenté à la Semaine de la critique à Cannes et récompensé au festival d’Angoulême, il a choisi deux acteurs non professionnels remarquables, Dylan Robert et Kenza Fortas, 18 et 17 ans, qu’il a sélectionnés après des semaines de casting. « Un des critères principaux pour les choisir était qu’ils puissent se plier à mes directives et qu’ils acceptent la discipline d’un tournage », se souvient-il. Dylan Robert, sorti de prison peu de temps avant le tournage, et Kenza Fortas, adolescente déscolarisée, n’ont pas eu une existence facile. Ils apportent un naturel et une énergie communicative à cette plongée dans un monde où la jeunesse est
« Kenza [Fortas] et Dylan [Robert] ont un sens de la survie acquis dans la rue.» Jean-Bernard Marlin
constamment en péril. « Je me suis inspiré des adolescents que j’ai rencontrés pendant des mois d’enquête, précise Jean-Bernard Marlin. Dylan et Kenza ont été d’une incroyable générosité dans la façon dont ils ont puisé dans leur vécu pour créer leur personnage. » Le cinéaste n’a pas choisi la facilité en tournant dans des quartiers chauds de Marseille. «On était souvent obligé de filmer à l’arrache, car des décors devenaient soudain inaccessibles en raison de problèmes entre bandes, raconte-t-il. Kenza et Dylan se sont adaptés à tout. Ils ont un sens de la survie ahurissant acquis dans la rue. » Cela se sent dans ce film lumineux où l’on s’attache à ces enfants du siècle plongés dans un monde de violence dont ils tentent de s’extraire. Il n’a pas été facile pour les deux jeunes gens de revenir à une vie normale après le film. Mais Jean-Bernard Marlin veille au grain. Il leur cherche un agent parce qu’il se sent responsable d’eux à la manière d’un grand frère se souciant de leur avenir.
« Je ne vais pas les lâcher, martèle le réalisateur, car je pense qu’ils sont suffisamment doués et travailleurs pour poursuivre une carrière de comédiens. » On espère de tout coeur que la fin optimiste de Shéhérazade rejaillira sur ces acteurs prometteurs comme sur ce cinéaste passionnant.