Une légitime défense très contestée
La proposition phare de Muriel Robin dans sa tribune est de modifier la loi afin d’offrir aux femmes battues le droit à une légitime défense différée dans le temps et non proportionnée aux coups qu’elles ont reçus. Le droit à se faire justice soi-même, en somme. Une idée à laquelle est totalement opposé le monde judiciaire.
« Revenir avec un fusil après avoir subi des gifles, ce n’est pas de la légitime défense, c’est de l’autodéfense, de la vengeance », tranche Isabelle Steyer, avocate pourtant spécialisée dans la défense des femmes victimes de violences. Et de rappeler que le Code pénal prévoit des circonstances permettant d’atténuer la peine d’une femme qui aurait ôté la vie de son conjoint violent. Les juristes reprochent surtout à Muriel Robin d’user de facilité, en faisant triompher l’émotion sur la raison auprès du grand public. «Allons au bout de sa logique. On diffère la légitime défense, mais jusqu’à quand? A-t-on le droit de se défendre trois heures après avoir reçu des coups ? Trois mois ? Trois ans ? » interroge Sophie Challan-Belval, avocate à Rouen (Seine-Maritime). Sans parler du symbole catastrophique, selon elle : «Cette proposition revient à dire que la société n’est pas capable de protéger les femmes. Que, pour être en sécurité, c’est à elles de tuer leurs conjoints. » Le ministère de la Justice, lui, précise que la légitime défense différée «n’est pas à l’ordre du jour».
Pas de quoi arrêter Murielle Robin, qui appelle à manifester samedi devant le tribunal de Paris pour faire accepter sa proposition. Dimanche à 21 h 40, 156 300 personnes avaient signé sa pétition en ligne.