20 Minutes

11-Novembre

Augustin Trébuchon, le soldat français tué à dix minutes de la fin de la Grande Guerre

- Alexis Orsini

Selon la date inscrite sur sa tombe, à Vrigne-Meuse (Ardennes), sa mort remonte au 10 novembre 1918. En réalité, Augustin Trébuchon a été abattu d’une balle dans la tête le 11 novembre, vers 10h50. Soit dix minutes avant que ne retentisse le clairon annonçant la fin du conflit. Ce coup du sort vaut au modeste berger de Lozère de 36 ans d’occuper une place singulière dans l’histoire : celle du dernier soldat tué pendant la Grande Guerre. Le chargé de liaison du 415e régiment d’infanterie représente aussi, au même titre que ses 17 frères d’armes tombés le 11 novembre, une victime honteuse pour l’armée française – d’où la falsificat­ion de leur véritable date de disparitio­n, qui aurait terni le jour de l’armistice. Cent ans après, dans Augustin (JC Lattès), le journalist­e Alexandre Duyck revient sur la destinée tragique de «Trébuch». Car, exempté, l’aîné d’une fratrie de sept orphelins aurait pu échapper à la guerre. « L’idée était de faire comprendre pourquoi il s’est engagé, lui qui n’avait rien contre les Allemands, et comment il a tenu bon quatre ans dans des conditions épouvantab­les», souligne l’auteur. Augustin Trébuchon s’est en effet retrouvé au premier plan des batailles les plus marquantes du conflit, de la Marne au chemin des Dames en passant par Verdun. Deux mois avant sa mort, apprécié pour sa fiabilité – il ne prit qu’une seule permission en quatre ans – il fut promu première classe. Mais comment raconter la vie d’un homme quand on est, en tant que journalist­e, attaché à l’exactitude des faits et que son sujet d’étude n’a laissé quasiment aucune trace? «Mis à part sa fiche matricule, on ne trouve rien sur Augustin Trébuchon, relève l’écrivain. Il n’a pas laissé de témoignage, lui qui ne savait sans doute ni lire ni écrire. Et

« Réhabilite­r la France rurale qui disparaît. » Alexandre Duyck, écrivain

son descendant n’a gardé de lui que ses deux médailles : la Croix de guerre et celle de la bataille de Verdun.» Bien que fructueux, l’entretien avec le maire de Vrigne-Meuse, «mémoire vivante de Trébuchon », lors d’un reportage pour le JDD, a seulement permis au journalist­e de recueillir la matière suffisante pour un article. Restait alors la voie du roman. Aujourd’hui, par sa «modeste plume», Alexandre Duyck tend « à réhabilite­r la France rurale qui disparaît et rendre hommage à la figure du soldat-berger ». La tombe d’Augustin Trébuchon, malgré le statut singulier de ce dernier, n’a pour l’instant jamais reçu la visite d’un président de la République.

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Cent ans après, un livre rend hommage à Augustin Trébuchon.

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