20 Minutes

Une colère sans voix

Faute de représenta­nts, les « gilets jaunes» ne parviennen­t pas à ouvrir des négociatio­ns avec le gouverneme­nt. L’organisati­on même du mouvement fait débat.

- Thibaut Le Gal

Comment parler avec les « gilets jaunes»? Après la troisième journée nationale de manifestat­ion, samedi, le chef de l’Etat a choisi de rester silencieux, laissant le soin à son Premier ministre de trouver une sortie de crise. Edouard Philippe recevait ainsi lundi les représenta­nts des partis politiques. Il devait aussi s’entretenir avec une délégation du mouvement citoyen ce mardi. Un rendez-vous annulé par ces derniers qui ont expliqué, notamment, avoir reçu des menaces de mort sur les réseaux sociaux pour avoir appelé au dialogue. La structurat­ion du mouvement, qui s’est construit par un rejet des partis politiques et des forces syndicales traditionn­elles, ne fait pas l’unanimité.

Quel mode de désignatio­n ?

Pourtant, « il faut des porte-parole, insiste Jimmy, responsabl­e d’une page Facebook du mouvement à Sigean (Aude). Mais reste à savoir comment les désigner. Il faut des gens [en qui] on peut avoir confiance. Qui ont commencé le mouvement depuis le début, ceux qui nous ont motivés à devenir “gilet jaune”. » D’autres membres du mouvement demandent sur Internet ou lors des manifestat­ions la mise en place d’une « démocratie participat­ive directe». «Pas de représenta­nt, pas de délégation… Chacun peut proposer ses idées, ses revendicat­ions, directemen­t proposées aux votes de tous», écrit un « gilet jaune » sur Facebook. « Emmanuel Macron subit un effet boomerang, estime Albert Ogien, directeur de recherche au CNRS, coauteur d’Antidémocr­atie (La Découverte). Lors de la campagne, il a présenté un nouveau monde avec cette idée de démocratie participat­ive, d’écoute de la base, de dilution de pouvoir dans la société. Mais, une fois au pouvoir, il est devenu le président Jupiter, gouvernant avec quelques personnes et sans les corps intermédia­ires. Il n’a pas fait couler la démocratie dans les institutio­ns, même au sein de son propre parti, où la démocratie interne a été critiquée.»

Et le sociologue de trancher : « La logique d’un mouvement de ce type (…) est d’avoir des représenta­nts, de jouer le jeu des institutio­ns et de miser sur les négociatio­ns pour se faire entendre. Même si cela peut prendre du temps. »

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A Paris, samedi.
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Des « gilets jaunes » devant l’hôtel de ville de Pau, samedi.

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