« J’ignorais comment me protéger »
Cyberharcèlement Après un tweet féministe, Nathalie* a reçu des menaces de viol et de mort
«J’avais déjà vécu des petites vagues de harcèlement en 2016-2017, mais, la plus grosse, c’était le 23 juillet 2017, raconte Nathalie*, 25 ans, victime de cyberharcèlement. Ce jour-là, un garçon m’a envoyé sur Twitter : “Un mignon petit bout de femme avec la tête bien pleine.” J’ai répondu : “T’es qui, déjà ?” et il m’a répondu : “On est tous l’inconnu de quelqu’un avant de devenir connu.” J’ai cité son tweet pour expliquer pourquoi je ne pouvais pas accepter un compliment sexiste qui sous-entend qu’une femme n’est pas censée être belle et intelligente. Ma réaction a été partagée dans les sphères féministes. Puis, dans celle de jeuxvideo.com et, là, ça s’est transformé en shitstorm [tempête de merde] avec menaces de viol et de mort, incitation au suicide… Je recevais vingt à trente mentions par minute. Je suis malentendante et je me souviens de ce message : “J’espère que tu te feras renverser par un camion que tu n’auras pas entendu.”
« J’ai pensé à en finir »
A l’époque je ne savais pas comment me protéger, et Twitter était complètement laxiste. J’ai fini par passer en mode privé, mais ça ne s’est jamais vraiment arrêté. Au début j’encaissais, mais, au bout de trois jours, j’ai pensé à en finir. J’avais vécu une année difficile, pour d’autres raisons, le manque d’argent, un métier très dur [aide à domicile]. Ça a fait exploser mon couple : on n’a pas été assez fort face à la violence, surtout qu’on avait une relation à distance. Au bout de dix jours, j’ai rappelé ma psychologue. Les séances m’ont vraiment aidée à prendre du recul par rapport à Twitter. Mais, quatre mois après, un mec a fait une capture d’écran d’un tweet où je conseillais à quelqu’un d’utiliser la liste stopshitstorm pour
se protéger des harceleurs notoires. Tout le monde a recommencé à me tomber dessus. J’ai craqué, j’ai créé un nouveau compte. C’est l’une des meilleures décisions que j’aie prises. Je fais beaucoup moins de militantisme, parce que je sais que ça peut me valoir du harcèlement. J’estime que ma santé mentale prime sur la cause. Avec du recul, j’aurais dû changer de compte bien plus tôt, et porter plainte. Aujourd’hui, il y a une réaction de la justice. On l’a vu avec le cas de Nadia Daam [deux des harceleurs de la journaliste ont été condamnés à six mois de prison avec sursis et 2000 € d’amende]. »