Un permis de louer contre l’insalubrité
Les bailleurs privés doivent désormais obtenir une autorisation pour mettre en location leurs biens
La Seine-Saint-Denis serre la vis. Depuis le 1er janvier, dans plusieurs quartiers de Saint-Denis, Aubervilliers et Stains, tout propriétaire bailleur privé qui souhaite mettre en location un bien doit obtenir auprès de la mairie une «autorisation préalable de mise en location». Sans elle, il s’expose à « une amende allant jusqu’à 5 000 € », précise la loi. Les trois villes, qui luttent contre la location de logements insalubres, espèrent ainsi réduire la prolifération de marchands de sommeil. «Pour nous, c’est un moyen de contrôle en plus, assure à 20 Minutes Meriem Derkaoui, la maire d’Aubervilliers, où un incendie dans un bâtiment qui n’avait aucune autorisation pour être utilisé comme logement a fait sept morts en août. Une fois la demande faite par le bailleur, nos services ont un mois pour visiter le lieu et établir si le bien répond aux critères imposés par la loi pour toute location.» Les diagnostics électricité, gaz, performance énergétique, exposition à l’amiante, etc., sont faits par la mairie. Si les critères ne sont pas respectés, le bailleur ne peut pas louer son bien. Une interdiction qui a ses limites. « C’est sûr que les marchands de sommeil ne se précipitent pas pour faire la demande», reconnaît Michel Fourcade, maire de Pierrefitte-surSeine, où la mesure, en vigueur depuis octobre 2017, n’a débouché sur l’attribution que d’une dizaine de permis de louer. «En revanche, ce qui est intéressant, c’est que, si des gens viennent se plaindre de l’insalubrité de leur logement et que l’on constate que la demande d’un permis de louer n’a pas été faite, la préfecture peut valider l’amende. Et elle peut monter jusqu’à 15000 € en cas de récidive. C’est très dissuasif. »
Encore faut-il que les locataires, souvent en situation précaire, parfois sans papiers, dénoncent leur bailleur peu scrupuleux. « Les communes doivent davantage informer les locataires sur leurs droits, insiste Eric Constantin, directeur de l’agence Ile-de-France à la Fondation Abbé-Pierre. Mais la question névralgique, c’est surtout comment accompagner les locataires dans la bataille judiciaire face à leur bailleur? Les collectivités manquent, par exemple, de moyens pour financer des équipes de juristes afin d’accompagner ces victimes, qui sont souvent les moins en capacité de porter plainte. » Maires et associations s’entendent également sur un point : ce « permis de louer » ne résout pas le véritable problème de l’Ile-de-France, à savoir le manque de logements sociaux. «Nous avons 6000 demandes par an pour 80 attributions», illustre Michel Fourcade.
« Les marchands de sommeil ne se pressent pas pour faire la demande. »
Michel Fourcade, maire de Pierrefitte-sur-Seine