«Le bilan est très positif»
La sociologue Marie Jauffret-Roustide livre les résultats de l’expérimentation dans le quartier Lariboisière
En 2016, le projet d’expérimenter à Paris, dans le quartier Lariboisière (10e), et à Strasbourg des salles de consommation à moindre risque, communément appelées « salles de shoot», avait soulevé de vives inquiétudes. Pour la sociologue Marie Jauffret-Roustide (photo), qui a coordonné le volet parisien de l’étude, le bilan est encourageant.
Qui fréquente la « salle de shoot », à Paris ?
A plus de 80 %, des hommes qui vivent, pour beaucoup, dans une très grande précarité sociale. Seuls 17,5 % d’entre eux travaillent. Ils consomment généralement du sulfate de morphine, un opiacé qu’ils s’injectent. Ils fument souvent, aussi, du crack.
Vous notez, dans votre étude, un bénéfice très net en matière de santé publique…
Oui, le bilan est très positif. Nous avons suivi pendant un an 665 usagers de drogue répartis dans quatre villes : à Paris et à Strasbourg, où des salles de consommation à moindre risque sont expérimentées, et à Bordeaux et Marseille, où il n’y en a pas. Dans ces deux dernières villes, 11 % des usagers ont déclaré avoir partagé leur matériel d’injection au cours du dernier mois, contre seulement 1% de ceux qui fréquentent les salles d’injection. Le risque de transmission du VIH ou de l’hépatite C est donc nettement diminué.
Avez-vous constaté des répercussions en matière de tranquillité publique ?
Oui, c’est également l’un des enseignements de l’étude. A Paris, entre 2016 et 2018, le nombre de seringues retrouvées autour de la salle d’injection a été divisé par trois. De même, lorsqu’on regarde les statistiques de la délinquance, on n’observe pas de dégradation.
Votre enquête montre que les riverains sont toujours partagés sur la présence de cette salle…
C’est vrai. Pour certains habitants, qui imaginaient une disparition totale de la présence des consommateurs dans l’espace public, cela reste douloureux à vivre car il y a toujours quelques usagers qui continuent à se piquer devant la salle ou dans les rues adjacentes.