Un premier tour au centre de l’abstention
Le faible niveau, historique, de la participation a eu une influence importante sur les résultats, dimanche
Un scrutin miné par un effondrement de la participation. Au premier tour des régionales ce dimanche, l’abstention atteindrait entre 66,1 % et 68,6 %, un record tous scrutins confondus en France hors référendum. Pour le reste, Les Républicains arriveraient en tête sur l’ensemble du territoire (entre 27,2 et 29,3 %) devançant le Rassemblement national (autour de 19 %), les listes conduites par le PS (entre 16,5 et 17,6 %), EELV (environ 12 % des voix) et LREM (10-11 %). Quels enseignements tirer de ce premier tour ?
L’OPPOSITION ACCUSE L’EXÉCUTIF D’ÊTRE RESPONSABLE DE L’ABSTENTION.
Tous les responsables politiques ont regretté la faiblesse historique de la participation. L’opposition a d’ailleurs mis en cause la responsabilité de l’exécutif. « Ce soir, le gouvernement a gagné, car il cherchait l’abstention massive », a fustigé le numéro 2 du RN, Jordan Bardella, sur TF1. « Il y a dans l’organisation du scrutin une responsabilité énorme du gouvernement, jamais il n’y a eu un tel cafouillage », a abondé le patron de LR, Christian Jacob, dénonçant le problème des professions de foi non reçues par certains électeurs. Des critiques balayées par Gabriel Attal, le porte-parole du gouvernement, qui a évoqué « la situation sanitaire » et rappelé que le maintien du scrutin avait été validé par « toutes les formations politiques ».
LA CONTRE-PERFORMANCE DU RN.
En tête dans six régions en 2015, le parti de Marine Le Pen ne serait en pole position qu’en Paca, où Thierry Mariani devancerait légèrement le président LR sortant, soutenu par la majorité, Renaud Muselier. Le RN enregistre 9 points de moins qu’en 2015. « Le RN n’atteint pas les scores espérés dans les Hautsde-France, en Nouvelle-Aquitaine, en Auvergne, en Occitanie, dans le GrandEst… », énumère Luc Rouban, chercheur au Cevipof. « Il semble être touché par une abstention différentielle : son électorat s’est moins déplacé que celui des blocs traditionnels, de droite et de gauche, qui se sont remis en selle. » Pour le RN, l’espoir réside en Paca, qui se jouera dans une triangulaire, après le maintien annoncé de l’écologiste JeanLaurent Felizia au second tour.
PS ET DROITE, LA PRIME AUX SORTANTS.
L’abstention semble avoir privilégié les présidents sortants, qui distancent parfois largement leurs rivaux et pourraient être réélus au second tour. Qu’ils soient socialistes, comme Carole Delga en Occitanie et Alain Rousset en Nouvelle-Aquitaine, ou LR, comme Jean
Rottner dans le Grand-Est. À droite, le patron des Hauts-de-France, Xavier Bertrand, arrive nettement en tête et devrait sauver sa peau, comme sa candidature à la présidentielle, dimanche prochain face au candidat RN. Laurent Wauquiez (LR) en Auvergne-RhôneAlpes et Valérie Pécresse (Libres) en Île-de-France, ses possibles concurrents pour 2022 à droite, font aussi la course en tête.
UNE CLAQUE POUR LREM ET LE GOUVERNEMENT.
La majorité n’espérait pas grandchose du scrutin, si ce n’est de pouvoir jouer les faiseurs de roi. Mais, dans les Hauts-de-France, malgré la présence de cinq ministres, en Occitanie et en Auvergne-Rhône-Alpes, les listes LREM sont sous les 10 % et ne pourront même pas se maintenir en vue du second tour. « On retrouve le scénario des municipales : quand ils ne s’associent pas à LR, ils paient leur manque d’implantation territoriale », résume Luc Rouban. Les ministres Modem Marc Fesneau en Centre-Val-de-Loire (16 %) et Geneviève Darrieussecq (14 %) en Nouvelle-Aquitaine font un peu mieux, mais leur troisième place ne devrait pas leur permettre de l’emporter.
« Nos résultats sont très décevants »Pas de quoi faire passer la pilule. Dans trois régions, LREM est éliminé dès le premier tour. Ailleurs, le parti dépasse à peine les 10 % . Il n’y a qu’en Bourgogne-Franche-Comté et en Bretagne que les macronistes pourront tenter de jouer les arbitres en formant une alliance.
Peu après 20 h, un soulagement amer se propage sous la verrière, alors que la pluie redouble : la tête de liste LREM en Île-de-France, Laurent Saint-Martin, cumule environ 12 % des suffrages et annonce son maintien au second tour. « Nos résultats sont très décevants, et certainement inférieurs à nos espoirs et aux derniers sondages », reconnaît le député de Paris Gilles Le Gendre. Emmanuel Macron avait indiqué qu’il ne tirerait pas d’enseignements nationaux de ces scrutins, mais son parti ne pourra s’épargner une remise en question après cette nouvelle déroute électorale.