20 Minutes

À Tallinn, le sang-froid face à la menace russe

En Estonie, où un tiers de la population est russophone, la guerre en Ukraine a ravivé la méfiance envers Moscou

- De notre envoyé spécial en Estonie, Michaël Bosredon

L’ambiance est glaciale et les rues quasiment désertes, en ce mardi matin à Tallinn, la capitale de l’Estonie. Quelques touristes se promènent dans la vieille ville, sous de légers flocons. Certains prennent des photos de l’ambassade de Russie. La virulence des messages contre la guerre en Ukraine, accrochés devant le bâtiment, montre la colère des habitants envers Vladimir Poutine, le président russe, et la solidarité avec le peuple ukrainien.

On pousse jusqu’au quartier branchouil­le de Telliskivi, « brique » en Estonien. S’il abrite aujourd’hui une « creative city » avec start-up, bars et restaurant­s, le site accueillai­t autrefois un complexe industriel soviétique. Là, Jakob nous explique que l’invasion russe en Ukraine, le 24 février, a peutêtre « davantage frappé les esprits en Estonie » qu’ailleurs en Europe, « car c’était le jour de la Fête nationale célébrant l’indépendan­ce du pays ». Jusqu’à 1991, l’Estonie était une république soviétique. Depuis, le pays balte a rejoint l’Union européenne et l’Otan, en 2004, tout en conservant une profonde méfiance à l’égard de la Russie, avec qui elle partage près de 300 km de frontière terrestre. Un peu moins d’un tiers de la population de ce petit État de 1,3 million d’habitants est russophone, et 80 000 d’entre eux ont choisi de conserver la citoyennet­é russe.

Les russophone­s « n’y sont pour rien »

Dans un café, Anna nous indique « qu’il y avait beaucoup de tension vis-à-vis des Russes dans le pays » au début du conflit, mais « ça s’est calmé. » « Je ne pense pas qu’il faille blâmer la population russophone, eux aussi sont inquiets de ce qu’il se passe, ils n’y sont pour rien », ajoutet-elle. Au sein du pays, « le conflit en Ukraine a quand même ranimé des

tensions entre ces minorités russes et les Estoniens, ou, en tout cas, refait parler des relations entre les deux communauté­s », analyse Vincent Dautancour­t, chercheur et professeur de français à l’université de Tartu. Des dirigeants craignent que la Russie lance une attaque en Estonie, au nom des intérêts des 300 000 russophone­s. Un député russe a demandé, il y a quelques jours, la « dénazifica­tion » et la « démilitari­sation » de l’Estonie, ainsi que de cinq autres pays. Des termes que Vladimir Poutine avait employés à propos de l’Ukraine.

 ?? ?? La capitale estonienne n’est qu’à 200 km de la frontière russe. M. Bosredon / 20 Minutes
La capitale estonienne n’est qu’à 200 km de la frontière russe. M. Bosredon / 20 Minutes
 ?? ??

Newspapers in French

Newspapers from France