Dark kitchens « J’ai déménagé, car ma vie était devenue un enfer »
Certains de nos lecteurs vivant près d’établissements de restauration livrée se plaignent des nuisances sonores, notamment à cause des va-et-vient des scooters
C’est le revers de la médaille. Bien aidée par les mesures de confinement, la restauration livrée a connu un boom ces dernières années*, avec comme corollaire logique, la hausse des nuisances liées aux livraisons. Un phénomène accentué par l’apparition des dark kitchens, des restaurants qui ne font que de la livraison, et même des dark stores, des supermarchés sans rayons, sauf dans les roues des livreurs. Depuis, à lire les témoignages de nos lecteurs et lectrices, certains vivent un cauchemar. C’est d’ailleurs le terme employé par Angélique, de Courbevoie (Hauts-deSeine), qui décrit des « rodéos urbains dans la rue, des descentes de parking prises pour un urinoir, des trottoirs squattés par les livreurs qui stationnent et roulent dessus ».
Conversations bruyantes et musique
Nikita indique habiter au-dessus d’une dark kitchen, et elle est témoin d’un incessant et bruyant ballet : « Même quand leurs moteurs sont éteints, les livreurs sont à l’origine de nuisances : conversations bruyantes, musiques, films sur les smartphones et, parfois, altercations entre eux. »
Même topo pour Gautier, qui habite en face d’un restaurant d’une chaîne de restauration rapide à Montparnasse (14e) : « Les nuits sont devenues très compliquées, car si le restaurant ferme aux alentours de minuit, la livraison, elle, continue jusqu’aux environs de 5-6 h. Durant toute la nuit, on peut avoir jusqu’à un ou deux démarrages de scooter toutes les deux-trois minutes.» Une situation à ce point insupportable qu’il a décidé de déménager dans « un endroit très calme en banlieue ». Même chose pour Léo, qui a quitté définitivement Paris (et la région parisienne) en grande partie après l’installation d’une dark kitchen en bas de chez lui : « Ma vie était devenue un enfer, et je ne supportais plus de voir à quel point Paris se transformait en grande zone logistique de livraison sans vie.»
Nos lecteurs avancent également leurs idées pour réduire les nuisances. « Une pizzeria à côté de chez moi est équipée de scooters électriques, souligne Sophie, de Nanterre (Hauts-de-Seine). Zéro nuisance de ce restaurant. » Mais ce n’est pas si simple, puisque les livreurs étant autoentrepreneurs, c’est à eux de s’acheter leur moyen de locomotion. Or un scooter thermique coûte bien moins cher qu’un électrique… Les lecteurs et lectrices n’oublient pas les livreurs eux-mêmes. « Les pauvres mangent par terre dans la rue faute de pouvoir s’asseoir quelque part, s’indigne Amandine.
L’hiver, ils attendent des heures dehors sans pouvoir se réchauffer. C’est honteux ! » Pour Charlotte, « il faudrait que les plateformes prennent ellesmêmes leur part dans la résolution de cette problématique, en proposant un local de rassemblement, avec toilettes, salle de pause, machine à café, point d’eau, etc. »
* Avec un chiffre d’affaires en hausse de 47 % entre 2019 et 2020, selon le cabinet Food Service Vision.