20 Minutes

L’émissaire français

- (à suivre)

Oleg Chestov ne l’avait pas tout de suite remarqué. Il s’était installé dans les tribunes, légèrement en retrait, à une place où il avait une vue panoramiqu­e sur les invités des loges VIP. Il lui avait fait un signe de connivence en croisant son regard. Tous les

gestes de l’émissaire français, un grand type réservé envoyé par le nouveau président, étaient animés d’une politesse discrète, les anciennes manières des diplomates dans un costume bureaucrat­e de mauvaise coupe.

Lorsqu’il s’était installé au Royaume, s’imaginant acheter le Prince et les autorités pour profiter d’un pays à sa botte, Chestov avait grandement sousestimé la place de la France dans les décisions de cette nation de carton-pâte. La présence de l’émissaire lui avait tout de suite rappelé son erreur stratégiqu­e, presque celle d’un débutant. Le Royaume était une chasse gardée. Rien n’y était gratuit, et surtout pas quand il s’agissait des prébendes françaises. L’émissaire était là pour s’en assurer en personne. Sans doute avait-il la mission de faire passer à l’oligarque un message : « Pas touche aux intérêts français ! » À moins que la France ne veuille se servir de lui comme source d’informatio­n ?

Le rendez-vous avait été fixé aux abords du quartier russe de Cannes, pas loin du Royaume. L’émissaire s’était préoccupé de trouver un lieu fréquenté par ses compatriot­es, qu’il se sente à l’aise. Chestov aurait préféré échanger sous les auspices de l’église orthodoxe Saint-Michel-Archange. Un endroit tout aussi discret et à deux pas de la plage Zamenhof. Il aurait tout de suite fait venir son pope conjurer cet embrouilla­mini.

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