En NBA, les Américains à côté de leur basket
Depuis 2019, aucun joueur US n’a été sacré meilleur joueur de la ligue. Et cela commence à agacer outre-Atlantique
La NBA aimerait bien « Make America Great Again », selon les mots de l’ex-président Donald Trump, pourtant pas très apprécié du monde du basket. Car le constat est sans appel : depuis 2019, aucun Yankee n’a remporté le titre de MVP, sacrant le meilleur joueur de la saison. Et ce n’est pas cette année, alors que les play-off viennent de commencer, que la donne va changer. Le trophée Maurice-Podoloff devrait se jouer entre le Serbe Nikola Jokic (Denver), le Slovène Luka Doncic (Dallas), le Canadien Shai Gilgeous-Alexander (Oklahoma City), voire le Grec Giannis Antetokounmpo (Milwaukee). Avant que Victor Wembanyama se mêle de ces histoires dans les années à venir. Et face à l’évidence, les Américains jouent même de mauvaise foi : « Jojo [Joël Embiid, titré la saison dernière], il a la nationalité américaine. » Il a aussi un passeport français et camerounais. « Mais, il est, dans une certaine mesure, un produit du système de développement américain, ayant joué plusieurs années au lycée dans ce pays », soutient Seth Partnow, ancien directeur des opérations basket chez les Milwaukee Bucks. Selon lui, « nous sommes dans un fossé générationnel entre les stars des années 2010 et la prochaine vague de leaders ».
Des Européens plus matures
« Parmi les joueurs dominants aux postes clés, comme le poste 5 [pivot], il y a peu de joueurs américains, analyse Chris Singleton, consultant beIN Sports, diffuseur de la NBA. Des joueurs grands comme Jokic ont une avance technique qui fait des différences. Les Européens qui débarquent ont une maturité que les jeunes Américains n’ont pas. » Sans doute le fait d’avoir fréquenté des championnats pros avant de traverser l’Atlantique. Ainsi, Luka Doncic a gagné l’Euroligue avec le Real Madrid. Nikola Jokic, lui, s’est frotté à des grosses écuries comme le Partizan ou l’Étoile Rouge en Serbie : de quoi forger un homme. Pas comme la NCAA, le championnat universitaire américain, où les joueurs sont
chouchoutés. «La NCAA, c’est souvent une année, et après, le joueur va en NBA, la formation est quasi inexistante, explique Singleton. Leur formation, c’est quand ils arrivent en NBA et le jeu n’est pas pareil, c’est plus physique. » Selon Seth Partnow, le problème commence même bien avant l’université. « Nous comptons les points à un âge trop jeune. Les types de tactiques et de skills qui permettent de remporter les championnats des moins de 12 ans n’ont pas grand-chose en commun avec ceux qui permettent aux joueurs d’exceller à haut niveau. De plus, on joue trop de matchs. Les jeunes joueurs ont des maladies chroniques et des blessures dues au surmenage. »
Certains grands noms du basket US se sont lancés dans une entreprise de démolition des Européens, à l’image de Gilbert Arenas, ancien meneur des Wizards : « Ils ne sont pas athlétiques, pas rapides, ils ne sautent pas haut et ce sont des points faibles en défense. » Même Paul Pierce, la légende des Celtics, a déversé son fiel : « Ils ne passent pas pour des durs à cuire, ce n’est pas dans leur culture. Ça, c’est la culture américaine. On a grandi dans les quartiers pauvres, on a joué dans la rue, on “trash-talkait”, ça pouvait partir en bagarre. » Le but étant de jouer au basket et pas à la boxe, c’est peut-être pour ça que les Américains n’arrivent plus à la cheville des top joueurs européens.