20 Minutes

En NBA, les Américains à côté de leur basket

Depuis 2019, aucun joueur US n’a été sacré meilleur joueur de la ligue. Et cela commence à agacer outre-Atlantique

- Antoine Huot de Saint Albin

La NBA aimerait bien « Make America Great Again », selon les mots de l’ex-président Donald Trump, pourtant pas très apprécié du monde du basket. Car le constat est sans appel : depuis 2019, aucun Yankee n’a remporté le titre de MVP, sacrant le meilleur joueur de la saison. Et ce n’est pas cette année, alors que les play-off viennent de commencer, que la donne va changer. Le trophée Maurice-Podoloff devrait se jouer entre le Serbe Nikola Jokic (Denver), le Slovène Luka Doncic (Dallas), le Canadien Shai Gilgeous-Alexander (Oklahoma City), voire le Grec Giannis Antetokoun­mpo (Milwaukee). Avant que Victor Wembanyama se mêle de ces histoires dans les années à venir. Et face à l’évidence, les Américains jouent même de mauvaise foi : « Jojo [Joël Embiid, titré la saison dernière], il a la nationalit­é américaine. » Il a aussi un passeport français et camerounai­s. « Mais, il est, dans une certaine mesure, un produit du système de développem­ent américain, ayant joué plusieurs années au lycée dans ce pays », soutient Seth Partnow, ancien directeur des opérations basket chez les Milwaukee Bucks. Selon lui, « nous sommes dans un fossé génération­nel entre les stars des années 2010 et la prochaine vague de leaders ».

Des Européens plus matures

« Parmi les joueurs dominants aux postes clés, comme le poste 5 [pivot], il y a peu de joueurs américains, analyse Chris Singleton, consultant beIN Sports, diffuseur de la NBA. Des joueurs grands comme Jokic ont une avance technique qui fait des différence­s. Les Européens qui débarquent ont une maturité que les jeunes Américains n’ont pas. » Sans doute le fait d’avoir fréquenté des championna­ts pros avant de traverser l’Atlantique. Ainsi, Luka Doncic a gagné l’Euroligue avec le Real Madrid. Nikola Jokic, lui, s’est frotté à des grosses écuries comme le Partizan ou l’Étoile Rouge en Serbie : de quoi forger un homme. Pas comme la NCAA, le championna­t universita­ire américain, où les joueurs sont

chouchouté­s. «La NCAA, c’est souvent une année, et après, le joueur va en NBA, la formation est quasi inexistant­e, explique Singleton. Leur formation, c’est quand ils arrivent en NBA et le jeu n’est pas pareil, c’est plus physique. » Selon Seth Partnow, le problème commence même bien avant l’université. « Nous comptons les points à un âge trop jeune. Les types de tactiques et de skills qui permettent de remporter les championna­ts des moins de 12 ans n’ont pas grand-chose en commun avec ceux qui permettent aux joueurs d’exceller à haut niveau. De plus, on joue trop de matchs. Les jeunes joueurs ont des maladies chroniques et des blessures dues au surmenage. »

Certains grands noms du basket US se sont lancés dans une entreprise de démolition des Européens, à l’image de Gilbert Arenas, ancien meneur des Wizards : « Ils ne sont pas athlétique­s, pas rapides, ils ne sautent pas haut et ce sont des points faibles en défense. » Même Paul Pierce, la légende des Celtics, a déversé son fiel : « Ils ne passent pas pour des durs à cuire, ce n’est pas dans leur culture. Ça, c’est la culture américaine. On a grandi dans les quartiers pauvres, on a joué dans la rue, on “trash-talkait”, ça pouvait partir en bagarre. » Le but étant de jouer au basket et pas à la boxe, c’est peut-être pour ça que les Américains n’arrivent plus à la cheville des top joueurs européens.

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R. Jenkins / AFP Le Slovène Luka Doncic et le Serbe Nikola Jokic sont deux des favoris pour le titre de MVP.
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