Jeep Wrangler Unlimited vs Toyota Land Cruiser Avecou sans passion
Toujours aussi efficaces sur la neige, les authentiques tout-terrain passent partout. En revanche, entre un Jeep Wrangler Unlimited et un Toyota Land Cruiser, deux philosophies bien distinctes s’opposent. L’Américain est turbulent, exubérant et récréatif
Ils ont en commun d’être discriminés fiscalement, évidemment, avec un malus de 10 500 €, mais surtout idéologiquement. A l’heure où notre société devient sectaire, nos deux 4x4 sont pourtant géniaux et même indispensables pour ceux qui ne roulent jamais très loin de la neige, poudreuse ou non, mais aussi qui tractent, qui grimpent, qui transportent. Nos deux protagonistes sont également deux évolutions ultimes de légendes vivantes et mondiales bien connues.Au petit jeu patrimonial, égalité : notre Jeep Wrangler Unlimited est la première refonte technique de ce 4x4 5 portes apparu en 2006 avec des origines en 1941. Toyota inaugure le premier Land Cruiser à peine dix ans plus tard (1951) et poursuit son développement par l’ajout d’équipements et la mise en conformité réglementaire ; notre LC actuel date pour l’essentiel de 2009 et constitue la neuvième génération. Bref, nos 4x4 semblent avoir été toujours là. Dans le détail, ils ne refusent pas la modernité, mais chacun à sa manière, assez loin des préoccupations ultra-normées du Vieux Continent, il faut bien le dire et c’est ça qui est bien. Le plus dépaysant est le Jeep, sa présentation reste atypique et personnelle. Depuis 2018, sa carrosserie est toute nouvelle en galbant légèrement ses formes rectilignes. Visuellement, l’ensemble est beaucoup plus
musclé, mais aussi très proche de l’ancienne génération. La nouveauté est donc surtout à trouver avec des phares et feux LED et surtout sous le capot avec un nouveau bloc diesel MultiJet de 2,2 litres en lieu et place de l’ancien 2,8 litres. Malgré cette carrure plus petite, le niveau de puissance à 200 ch est préservé. Même si ce n’est pas à l’ordre du jour dans ce face-à-face à la neige, en essence, c’est un 2 litres turbo qui se substitue au V6 de 3,6 litres, qui avait le mérite de donner de la voix, sur l’ancienne génération. Seule la boîte automatique est désormais possible, une bonne chose en fait grâce à ses huit rapports et à sa modernité. D’ailleurs la transmission évolue aussi avec un mode permanent pour la route qui donne au Wrangler une fonction plus routière, mais dans la limite offerte par ses deux ponts rigides. Le mode 4x2 reste aussi disponible : pas mal ! La fiche technique du Land Cruiser apparaît sur le papier plus sophistiquée bien que plus ancienne. Le Toyota dispose bien évidemment également d’un châssis séparé, mais aussi d’une suspension avant indépendante, alors que sa boîte automatique à six rapports est encore en option (2 000 €). Au fonctionnement simpliste, cette dernière présente un glissement important qui appartient à un autre âge. Ne cherchez pas de version essence : elle existe, mais n’est pas importée en France.
Un Land Cruiser plus consensuel
Si le Toyota est une vielle connaissance qui approche maintenant une décen- nie d’existence au catalogue, son moteur apparaît sur le papier d’une ancienne conception. Le D4-D affiche 177 ch avec une cylindrée de 2 755 cm3 et du côté de sa transmis-
sion, elle est permanente. Dès les premiers kilomètres pourtant notre Toyota cache très bien le poids des années. Plutôt confortable, il se conduit sur route assez facilement et dans un confort plutôt recommandable. Évidemment, il n’aime pas trop être brusqué alors que les grands débattements de suspensions et la direction très démultipliée sont ceux des authentiques franchiseurs et ne sont pas sans un certain charme désuet. A l’usage, notre Land Cruiser D4D semble capable de faire face à tout, et puis c’est aussi une navette long-courrier capable de traverser les continents confortablement n’importe quand et sur n’importe quelle surface.A la rédaction, tout le monde garde un très bon souvenir d’un Land Cruiser taillant sereinement les « miles » sur une piste perdue. Les routes françaises se montrent peu réjouissantes jusqu’à l’approche de la neige.Tout de suite, les pneumatiques ne sont pas les plus rassurants, surtout avec un poids de 2 300 kilos qu’il convient de toujours prendre en considération. Mais notre Toyota parvient toujours à ses fins en utilisant sa technologie, à l’image de son système de traction MTS ou de son Crawl qui permet de programmer une vitesse de progression et de se concentrer sur le volant et les trajectoires. Le blocage de différentiel central est enfin une aide précieuse sur la neige fraîche.
Deux monstres sacrés du tout-terrain sur la neige
En passant au Wrangler, l’arrivée de la neige est encore plus réjouissante, les pneumatiques d’origine sont plus convaincants alors que le blocage du différentiel central intégré au levier du sélecteur de gamme courte permet justement d’enlever ce blocage pour les manoeuvres, un petit détail qui fait la différence, surtout que le Wrangler n’est pas un exemple de vision facile vers l’extérieur, et notamment l’arrière. Le nouveau Wrangler adopte bien la caméra de recul, qui s’intègre au support de la roue de secours. Elle se montre assez performante pour permettre une bonne vision, mais elle est également exposée aux projections et régulièrement inutilisable sur une route salée par exemple. En revanche, la puissance des sièges et volant chauffants, qui plus est programmables automatiquement à la mise en route par exemple, est un atout pour les grands froids. Authentique tout-terrain, le Wrangler étale ses compétences sur la neige sans problème, il passe en profitant de son poids réduit par rapport au Toyota, mais apparaît aussi plus moderne grâce à sa direction plus directe et précise. Tout serait parfait si son contrôle en descente n’était pas réservé à la gamme courte et pour des
vitesses comprises entre 1 et 8 km/h, un défaut d’autant plus flagrant en montagne et sur la neige où les petites pentes sont parfois piégeuses. Bien évidemment, pour ceux qui veulent aller encore plus loin en tout-terrain, il faudra passer par la version Rubicon avec ses blocages avant et arrière, ses ponts renforcés, sa réduction plus courte, mais aussi ses pneus spécifiques.
Le Wrangler cultive la différence
Si le Jeep est très efficace, il est aussi fantastiquement dépaysant ; à son volant, la perspective est unique avec ce capot et ses ailes plates typiques. Dans le même temps, il faut reconnaître que l’espace est plutôt mesuré surtout face au Toyota et a imposé des petites bizarreries ergonomiques, à l’image des commandes de vitres électriques sur le tableau de bord, placées ici à l’évidence faute de place ailleurs. Rouler en Wrangler vous donne l’impression d’être encapsulé, il faut aimer. Sur la route, néanmoins, son confort est globalement préservé malgré la présence des deux ponts rigides, la seule critique concerne le niveau sonore sur autoroute, un peu bourdonnant et en provenance de son aérodynamisme de téléphérique.Vous dépassez les 72 dB à 130 km/h, quand le vaisseau Toyota chuchote à 69 dB. Le Wrangler possède aussi une exclusivité avec sa fonction cabriolet offerte par ses deux demi-toits démontables au niveau des places avant et son gros hard-top à l’arrière, prévoyez d’être deux ou trois pour sa dépose, mais voici un atout pour plus tard, à la belle saison.Vous l’avez compris, le Jeep est un engin de loisir qui offre de multiples possibilités, parfois interdites sur les routes en France, comme celle de pouvoir démonter ses portes. La finition est en rapport avec cette fonction loisir : il ne faut pas trop regarder dans les détails. Sur le Toyota, la présentation est plus cossue, mais cache difficilement le poids des années avec une planche de bord sans charme.
Un Land Cruiser plus sérieux
Si la neige ne départage pas réellement nos 4x4, il faut reconnaître que les performances ont clairement choisi leur camp. Plus moderne, plus puissant de 23 ch, le Jeep donne une petite leçon à son confrère. Sur l’exer-
cice ultra-consensuel des 80 à 120 km/h, au coeur de l’utilisation quotidienne, l’Américain demande moins de huit secondes quand le Japonais réalise l’exercice en plus de douze et ne se sépare pas d’une impression de mollesse en pratique. En plus de cet avantage, le Wrangler grâce à sa modernité apparaît aussi moins gourmand avec une moyenne pendant notre essai de 10,2 l/100 qui prend là aussi l’avantage sur les 11,5 litres de son concurrent. Les gros réservoirs dans les deux cas offrent des autonomies respectables. Reste l’aspect financier pour départager nos concurrents. Dans les deux cas, les tarifs proposés sont assez conséquents pour ne pas trouver de justification immédiate, si ce n’est justement de répondre à une demande de confidentialité et d’exclusivité qui en devient un atout. Néanmoins, et en toute logique par son positionnement le Jeep, en finition Overland, s’affiche à 58 050 € quand le Land Cruiser, avec sa finition haut de gamme Lounge Pack, est encore beaucoup plus cher, à 68 500 €, et avant de parler d’un malus commun aux deux à 10 500 €. Le niveau d’équipement, bien que différent avec un peu plus d’aides à la conduite pour le Land Cruiser reste
assez complet. En résumé, il ne manque rien d’indispensable dans les deux cas.
A l’heure du choix, il n’y a aucune ambiguïté, la neige n’ayant pas permis de départager deux engins incroyablement efficaces. Nos légendes vivantes du 4x4 sont finalement recommandables, mais attention, chacun dans son camp. Le Jeep offre une incroyable personnalité et apparaît beaucoup plus amusant, il incarne toutes les facettes du tout-terrain pour le loisir. Le Land Cruiser pour sa part apparaît austère, voyageur spacieux, des qualités qui ne sont pas négligeables non plus pour certains.