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La peintre et L’architecte.

- Par Sophie Pinet, photos Jason Schmidt.

C’est l’histoire d’une rencontre, à New York : celle de la plasticien­ne britanniqu­e Sarah Morris avec la dernière maison de l’architecte Paul Rudolph, qu’elle a choisie comme pied-à-terre.

Depuis deux ans, l’artiste anglaise Sarah Morris

vit dans l’oeuvre ultime de l’architecte Paul Rudolph. Un espace singulier et immaculé,

à Manhattan, avec vue sur l’East River.

Dans Le bûcher des vanités, Sherman McCoy, loup de Wall Street bientôt déchu, dont Tom Wolfe dessine le portrait, le dit lui-même : « Il y a Park Avenue, la Ve et Beekman Place. » Soit trois lignes parallèles sur la trame de la ville qui affolent les courbes du marché de l’immobilier et qui courent du nord au sud, à l’est de Manhattan, à ceci près que la troisième ne dure que deux blocs et surplombe l’East River. Beekman Place est une enclave paisible, un hameau sans commerces où les résidents se croisent au fil des promenades de leurs chiens.

Retrouver Sarah Morris à cette latitude-ci a donc de quoi intriguer, sauf lorsque l’on sait qu’à cette même adresse, l’architecte Paul Rudolph a bâti son lieu de vie, et que l’on se rappelle combien l’architectu­re plane au-dessus du travail abstrait de l’artiste américano-britanniqu­e. Cela fait deux ans que celle-ci vit entre le 5e et le 6e étage de ce qui était une maison georgienne avant que l’architecte ne pose en son sommet une sorte de Rubik’s Cube dont il occupait le penthouse. Si ce dernier a subi quelques modificati­ons, au grand dam des puristes, l’appartemen­t qu’occupe l’artiste conserve le parti pris radical de l’architecte : une immense pièce à vivre surmontée d’un coursive qui s’élargit le temps de l’espace chambre, ainsi qu’une bibliothèq­ue qui s’étend sur les deux niveaux. Voilà sur le papier. La descriptio­n de l’appartemen­t conçu par Paul Rudolph pourrait se limiter à

Entre pleine lumière le jour et scintillem­ent de la ville la nuit, une impression de vivre soit à Miami, soit dans un film.

un message de 140 signes, pourtant il comporte toutes les obsessions du maître en version immaculée, si bien que la propriétai­re a l’impression de passer ses journées à Miami lorsque le soleil l’inonde, et dans un film, une fois la nuit tombée.

Devant l’écran, Sarah apparaît en héroïne fatale avec ses cheveux gominés et son rouge à lèvres rouge façon clip de Robert Palmer, derrière l’écran, on voit les lumières du Freedom Park de Louis Kahn et celles de la ville qui scintillen­t à chaque passage de l’une des navettes reliant les deux rives. « Je ne pourrais pas vivre dans un intérieur sans angles droits. » Avant celui-ci, elle a ainsi vécu au Barbican Estate, l’immeuble de logements tout aussi brutaliste, mais londonien, de la firme Chamberlin, Powell and Bon. Mais ici, elle semble avoir trouvé son double architectu­ral, et pour rien au monde ne voudrait le quitter, conclut-elle.

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 ??  ?? 1. Dans le living, la bibliothèq­ue recouvre le mur… et n’est pas sans rappeler la peinture de la maîtresse des lieux. Devant, seules concession­s à la courbe, la table et les fauteuils Tulip d’Eero Saarinen.
2. La façade de l’immeuble
où vit Sarah...
1. Dans le living, la bibliothèq­ue recouvre le mur… et n’est pas sans rappeler la peinture de la maîtresse des lieux. Devant, seules concession­s à la courbe, la table et les fauteuils Tulip d’Eero Saarinen. 2. La façade de l’immeuble où vit Sarah...
 ??  ?? Sarah Morris dans son living, en version jour, sobrement mais efficaceme­nt meublé des classiques d’Eero Saarinen, Florence Knoll et Mies Van der Rohe. Avec comme seule source de couleurs, une de ses peintures.
Sarah Morris dans son living, en version jour, sobrement mais efficaceme­nt meublé des classiques d’Eero Saarinen, Florence Knoll et Mies Van der Rohe. Avec comme seule source de couleurs, une de ses peintures.
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 ??  ?? 1. Sarah Morris prend la pose en version bicolore, rouge et bleu.
2. Le duplex est un espace rigoureux et grand ouvert, aussi bien
sur l’extérieur que de la chambre au living. Autour d’une table Barcelona de Mies Van der Rohe, deux fauteuils du même...
1. Sarah Morris prend la pose en version bicolore, rouge et bleu. 2. Le duplex est un espace rigoureux et grand ouvert, aussi bien sur l’extérieur que de la chambre au living. Autour d’une table Barcelona de Mies Van der Rohe, deux fauteuils du même...
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