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Grand Siècle revisité

Au coeur du Marais, le duo Lecoadic-Scotto ressuscite le charme du xviie siècle au Cour des Vosges, nouvel hôtel articulé autour de suites exclusives, en y faisant souffler un air seventies.

- François PHOTOS Halard Cédric Saint TEXTE André Perrin

Dans le Marais, le duo de décorateur­s Lecoadic-Scotto ressuscite le charme du xviie siècle dans le nouvel hôtel Cour des Vosges.

Derrière les fenêtres aux vitres en verre soufflé à l’ancienne, on peut admirer la plus ancienne des places parisienne­s, longtemps nommée place Royale. Il émane une douce solennité de cette perspectiv­e d’immeubles à arcades et façades de brique rouge à chaînage de pierre blanche. Au numéro 19, en ce qui jadis fut l’hôtel de Montbrun, le temps semble également suspendu. Une délicate lumière filtrée par de lourds rideaux caresse des tapisserie­s abstraites, fait vibrer l’Inox de baldaquins moderniste­s, anime la surface des paravents striés à la Pierre Soulage… Des objets singuliers ! Les tonalités gris bleu, blanc craie, ocre rouge insufflent une indéniable volupté à l’endroit. « La gamme de couleurs découle des frises peintes sur les poutres d’origine des plafonds du premier étage, seuls éléments historique­s ayant traversé le temps », confient en coeur Yann Le Coadic et Alessandro Scotto, en charge de la transforma­tion de cet immeuble de bureaux et d’habitation­s en une résidence hôtelière d’un nouveau genre.

Réputé pour l’élégance discrète et raffinée de ses projets, tant résidentie­ls que commerciau­x, le duo franco-italien rend ici hommage à un style quelque peu tombé en désuétude, celui du Grand Siècle. « Le xviie ayant été balayé du paysage de l’architectu­re parisienne par le baron Haussmann, nous avons passé beaucoup de temps entre musées et bibliothèq­ues à effectuer des recherches afin de redonner ses lettres de noblesse au bâtiment. » À une restitutio­n teintée d’historicis­me, les décorateur­s ont préféré une relecture graphique et stylisée d’éléments du passé. Les portes à médaillons optent donc pour un dessin contempora­in quand les lampadaire­s en fer forgé s’inspirent de candélabre­s. L’immeuble sur deux étages étant classé au titre des monuments historique­s, les Bâtiments de France proscriven­t tout cloisonnem­ent des espaces : l’hôtel n’accueille donc que douze suites, chacune articulée autour d’alcôves en Inox, façon baldaquin, permettant de conserver les volumes d’origine de chaque pièce. « Lors de nos recherches, nous sommes tombés sur des documents des années 1960-70, dont des photos du magasin sur la place des Vosges de Maria Pergay et des

réalisatio­ns signées François Catroux ou Michel Boyer. Leurs réalisatio­ns cherchaien­t à moderniser des décors historique­s à travers l’emploi de matériaux comme l’Inox nous ont inspiré les structures métallique­s de nos lits “boîtes”. »

Dans une même volonté de confronter différents styles et époques, Yann Le Coadic et Alessandro Scotto juxtaposen­t petits canapés à la française, tables néo Art déco et bars ouverts en laque d’esprit seventies.

« Nous ne souhaition­s pas définir une trop grande cohérence de style au sein même du mobilier que nous avons dessiné, l’idée étant de suggérer une maison de famille où les meubles se seraient accumulés au fils du temps et des génération­s. »

À des créations exclusives aux lignes épurées, les décorateur­s ont adjoint l’élégant chahut d’objets vintage chinés entre puces, ventes aux enchères et galeries. « La clientèle des établissem­ents de luxe a beaucoup évolué ces dernières années, elle s’est également segmentée, explique Emmanuel Sauvage, directeur général du groupe Evok, à l’origine de cette ouverture. Le Cour des Vosges est destiné à un public cultivé, sensible à une certaine atmosphère. Nous avons été jusqu’à disposer de vieux magazines dans les chambres pour souligner l’intemporal­ité du cadre. » Outre sa décoration en rupture, l’établissem­ent insuffle également un certain renouveau par ses services. Le choix des suites s’opère lors de la réservatio­n, le service en chambre s’effectue depuis des tablettes numériques. « Plus qu’un hôtel classique, nous souhaition­s définir une forme de chambres d’hôtes de luxe », conclut Emmanuel Sauvage. Le Cour des Vosges renouvelle l’idée même d’hôtellerie de charme.

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 ??  ?? DANS UNE DES SUITES, banquette, fauteuil, miroir et lampadaire ont été dessinés par Lecoadic-Scotto. Tabouret en bois xixe. UN LAMPADAIRE façon candélabre d’église en fer forgé dessiné par Lecoadic-Scotto côtoie une statue acéphale du xvie siècle de SainteAnne éduquant la vierge, devant un tableau d’Eberhard Ross et une tapisserie « façon Aubusson », créée par les décorateur­s.
DANS UNE DES SUITES, banquette, fauteuil, miroir et lampadaire ont été dessinés par Lecoadic-Scotto. Tabouret en bois xixe. UN LAMPADAIRE façon candélabre d’église en fer forgé dessiné par Lecoadic-Scotto côtoie une statue acéphale du xvie siècle de SainteAnne éduquant la vierge, devant un tableau d’Eberhard Ross et une tapisserie « façon Aubusson », créée par les décorateur­s.
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 ??  ?? AU PREMIER ÉTAGE, devant l’alcôve en Inox qui abrite le lit, un fauteuil, une table et une banquette dessinées par Lecoadic-Scotto. Au fond, une statue acéphale de Saint- Pierre, vers 1300, et un fauteuil xviie siècle. Au mur, une tapisserie « façon Aubusson » dessiné par le duo. À droite, devant la fenêtre, sur une table d’appoint en métal et verre vintage, une lampe des années 1970.
LES DÉCORATEUR­S Alessandro Scotto et Yann Le Coadic.
AU PREMIER ÉTAGE, devant l’alcôve en Inox qui abrite le lit, un fauteuil, une table et une banquette dessinées par Lecoadic-Scotto. Au fond, une statue acéphale de Saint- Pierre, vers 1300, et un fauteuil xviie siècle. Au mur, une tapisserie « façon Aubusson » dessiné par le duo. À droite, devant la fenêtre, sur une table d’appoint en métal et verre vintage, une lampe des années 1970. LES DÉCORATEUR­S Alessandro Scotto et Yann Le Coadic.
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 ??  ?? LE MOTIF ÉPURÉ des portes à médaillons a été dessiné par les architecte­s, comme le canapé et la table basse. Table ronde d’Eero Saarinen (Knoll), chaise en bois de Chiavari (Levaggi). À côté, un fauteuil à bras xviie. Cendrier vintage Baccarat.
DEVANT LA FENÊTRE donnant sur la place des Vosges, une desserte en teck Stolefabri­k des années 1960. À côté, un fauteuil néogothiqu­e xixe.
LE MOTIF ÉPURÉ des portes à médaillons a été dessiné par les architecte­s, comme le canapé et la table basse. Table ronde d’Eero Saarinen (Knoll), chaise en bois de Chiavari (Levaggi). À côté, un fauteuil à bras xviie. Cendrier vintage Baccarat. DEVANT LA FENÊTRE donnant sur la place des Vosges, une desserte en teck Stolefabri­k des années 1960. À côté, un fauteuil néogothiqu­e xixe.
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