Une généreuse sensualité
Dans un singulier palais du xviiie siècle, l’architecte Giuliano Andrea dell ’Uva a rénové un appartement afin que s’y conjuguent art de vivre et plaisir de bien recevoir.
Au coeur d’un singulier palais napolitain, l’architecte Giuliano Andrea dell’Uva a rénové un appartement où il fait se conjuguer art de vivre et plaisir de bien recevoir.
« Je savais que Giuliano Andrea dell’Uva réaliserait parfaitement le type de maison dont j’avais besoin. »
—— La propriétaire Emanuela Spedaliere
L’ambiance qui règne dans le palais napolitain Oneto Maglione, situé à quelques rues du palais royal de Naples et de la place du Plebiscito, la plus importante et grandiose de la ville, est résolument contemporaine. Sa propriétaire, Emanuela Spedaliere, est une femme d’exception, directrice générale du théâtre San Carlo depuis l’arrivée de Stéphane Lissner, ancien directeur de l’Opéra de Paris qui vient de rejoindre cette prestigieuse institution. Emanuela Spedaliere a choisi de vivre au coeur de la ville, dans un palazzo dont elle aime l’histoire. Au xixe siècle, dans ces appartements nobles se tenait le salon de Teresa Oneto et Benedetto Maglione, l’un des cénacles culturels les plus fréquentés de Naples, aussi bien par les artistes que par l’aristocratie.
Spécialiste de théâtre, mais aussi de littérature et de musique de chambre, Emanuela Spedaliere s’est adressée à l’architecte Giuliano Andrea dell’Uva pour réaliser les travaux de rénovation de son habitation. « Avec mon mari, Salvino Sorrentino, nous aimons ouvrir notre maison à de nombreux invités du monde de la culture, le soir après les spectacles du San Carlo. Ce sont des rencontres stimulantes, dans une ambiance détendue et conviviale. Et c’est précisément à l’une de ces occasions que j’ai rencontré Giuliano », précise-t-elle. On connaît le talent d’architecte de Giuliano Andrea dell’Uva, mais certainement moins son goût pour les arts. « Je savais qu’il réaliserait parfaitement le type de maison dont j’avais besoin », explique la propriétaire des lieux. La construction du palais date du xviiie siècle, deux siècles plus tard, il a été restauré dans un style qui répondait au goût de l’époque.
Un jeu de contrastes
Au tour maintenant de Giuliano Andrea dell’Uva de réussir le pari de sa rénovation. Entre ses murs, l’architecte recourt aux jeux de contrastes entre classique et moderne, éléments de production industrielle et de facture artisanale, ainsi qu’entre matériaux froids comme les sols en résine et ceux anciens en bois, faïence et marbre… des fragments qui témoignent de l’histoire de cet appartement. Dès l’entrée, on est frappé par un plafond en bois tapissé de papiers polychromes datant du xviiie siècle. Rehabilité par la restauratrice Paola Castellano, sa forte connotation historique a été la passerelle vers les siècles passés. Autre signe du passé, un lambris reproduisant un faux marbre dans la cuisine, découvert lors du déplacement d’un grand placard.
Refusant de s’enfermer dans la nostalgie, Giuliano Andrea dell’Uva adapte dès lors l’architecture à un mode de vie confortable et décontracté. Il joue en harmonie la distribution des espaces pour créer une continuité d’une pièce à l’autre, et il en va de même pour le choix des matériaux. « Je voulais une grande enveloppe de blanc pour contraster avec le choix de couleurs bien précises », confie-t-il. À partir de l’entrée, un vestibule avec une véranda donne d’un côté sur un jardin de plantes grasses, citrons ou jasmins et sur la cuisine de l’autre. L’emplacement de cette dernière, avant les pièces de réception, peut sembler inhabituel, mais finalement, rien n’est mieux adapté à la vie quotidienne et aux réceptions. Suivent la salle à manger, le salon et la chambre principale, divisée à son tour en bureau et salle de bains. De là, une porte mène à un autre espace, plus intime, où se trouvent deux chambres et leur salle de bains. Giuliano Andrea Dell’Uva a fait abattre certaines cloisons pour dégager les pièces et accentuer la lumière. Les portes, ainsi que les fenêtres, n’ont subi aucune retouche, elles sont toutes d’origine, de même que les magnifiques cabochons de verre coloré. L’appartement, de nobles proportions, a été installé dans un esprit libre. Les meubles et les objets sont rares, mais soigneusement choisis, de différents styles, époques et provenances. Emanuela Spedaliere est férue d’art contemporain, qui apparaît ici sans excès, mais dans une subtile disposition. Le tout, bien à sa place dans une esthétique contemporaine non seulement fonctionnelle, mais surtout satisfaisante pour la sensibilité humaine dans ce qu’elle a de plus exigeant et de plus noble.
« Je voulais une grande enveloppe de blanc pour contraster avec le choix de couleurs bien précises. »
—— L’architecte Giuliano Andrea dell’ Uva
L’art contemporain apparaît ici sans excès, dans une subtile disposition, bien à sa place.