Un été à Sorrente
Dans une esthétique associant couleurs du paysage et matières naturelles, l’architecte Massimo Adario a revu la maison de ses étés d’enfance. Entre nostalgie et modernité réinventée.
Dans une esthétique associant couleurs du paysage et matières naturelles, l’architecte Massimo Adario a revu la maison de ses étés d’enfance.
Nous sommes à Sorrente, entourés de citronniers, sur ces terres qui ont vu naître et où perdure la production de Limoncello. Dominant la baie, la maison de famille est une ancienne limonaia face à la mer. C’est aussi une maison de vacances dans laquelle l’architecte Massimo Adario a passé les étés de son enfance et qu’il a aujourd’hui revue entièrement, inspiré par le jaune du soleil et des citrons, le bleu du ciel et de la mer aux reflets profonds et changeants. De la construction d’origine, Massimo Adario a conservé la structure, les plafonds en voûte caractéristiques des maisons du Mezzogiorno, mais il a rhabillé et réarchitecturé l’espace, modifiant les murs, les cloisons et même les portes. En doublant soigneusement les murs tout d’abord, créant une seconde peau qui les laisse respirer – nous sommes au bord de la mer – et permet d’accrocher les tableaux en cimaise ; mais, surtout, en créant un fil rouge qu’il déroule dans toutes les pièces de la maison : des carreaux de céramique déclinés dans les tons de vert, de jaune et de bleu. Une matière naturelle, artisanale, aussi italienne que le marbre, et une esthétique années 1950 revisitées que l’on trouve tout d’abord dans la cuisine-pièce de vie où, sur un fond de fresque murale de carreaux émaillés graphiques, un îlot habillé lui aussi de carreaux nous accueille dans un all-over à couper le souffle. Réalisés à la main par Francesco De Maio sur un dessin de Massimo Adario, ces carreaux sont posés sans joints visibles. Un travail de précision car la cuisson déformant les carreaux, au moment de l’assemblage chaque pièce doit être limée afin d’être calée au millimètre près ! L’architecte en a aussi paré les portes, recto et verso, les bancs de la terrasse, les bordures de plates-bandes… et même la tête de lit, articulée en trois panneaux qui s’orientent pour créer un cocon accueillant.
Si l’on décèle une volonté de sortir du tout-marbre, on retrouve l’inclination particulière de l’architecte pour cette pierre qu’il affectionne particulièrement – nous sommes en Italie – et qu’il réserve ici aux sols, aux murs de la salle de bains ainsi qu’aux encadrements de portes. Les veines minérales gris bleuté se marient avec les motifs géométriques et colorés des carreaux de céramique et les tonalités douces des murs et des plafonds. Car voyez-vous, Massimo Adario n’a pas son pareil pour délivrer des intérieurs dont l’authentique simplicité résulte d’un infini sens du détail. Les cloisons qui doublent les murs sont au cordeau – dans une maison qui n’est pas d’équerre – et répondent aussi au souhait de ne pas abîmer les arches ; elles sont donc réalisées avec des joints creux, technique délicate, tout comme les hautes portes en carreaux de céramique finement encadrées de laiton.
Rotin, marbre et céramique
Dans ce bel endroit imprégné de ses souvenirs d’enfance, l’architecte recrée une esthétique dolce vita à base essentiellement de mobilier en rotin, jusqu’au porteserviettes et au miroir de la salle de bains. Il a chiné pour cela les plus belles pièces éditées à l’époque par Bonacina 1889, et les fauteuils, le lit, le sofa et les tables de chevet sont signés de grands noms qui trouvent naturellement leur place dans cette alliance de modernité et de rétro plus qu’aboutie. S’y intègrent des rééditions, une applique de Joe Colombo pour Oluce, des lampes de chez Flos ou Servomuto, des tables en verre ou en bois qui jamais ne dérogent au style 1950-1960, y compris pour le lavabo et son pied coloré. Et lorsqu’il fait appel à des pièces de céramique décorative, leur style années 1950 ne dépare pas. Elles sont posées sur une table en laiton et carreaux de céramique multicolores, décidément leitmotiv de cette rénovation en forme de pari osé totalement réussi.
Les veines bleutées du marbre se marient avec la géométrie colorée des carreaux de céramique.
De ses souvenirs d’enfance, l’architecte recrée une esthétique dolce vita à base de mobilier en rotin.