En exil, une historienne dissidente en appelle à la conscience de la société russe
Surprise lors de vacances en Grèce par l'invasion de l'Ukraine en février 2022, l'historienne russe dissi‐ dente Tamara Eidelman s'est résolue à ne pas pou‐ voir rentrer dans son pays tant que durera le régime de Vladimir Poutine.
Avec pour tout bagage une seule valise, Tamara Eidel‐ man, 65 ans, qui a enseigné l'Histoire pendant plus de 30 ans dans un prestigieux éta‐ blissement de Moscou avant de devenir éditrice et blo‐ gueuse, a rejoint sa fille au Portugal pour un exil sans li‐ mite.
"Je pars du principe que je ne rentrerai pas. Je me bâtis une vie au Portugal", a-t-elle ex‐ pliqué lors d'un récent entre‐ tien à l'AFP à l'occasion d'une conférence près de Washing‐ ton.
"Je voudrais rentrer, mais si je passe mes journées à me demander quand, je vais de‐ venir folle", confie Tamara Ei‐ delman, qui compte plus d'1,6 million d'abonnés -dont plus d'un million gagnés depuis l'invasion -- à sa chaîne YouTube diffusant des conférences sur l'histoire de la Russie, de l'Ukraine et du monde.
Classée par Moscou "agent de l'étranger", comme des centaines de dissidents, elle fait partie de cette diaspora d'intellectuels et d'artistes russes opposée à la guerre. Pendant les premiers mois, elle s'est jetée à corps perdu dans sa nouvelle vie: la re‐ cherche un logement, la re‐ constitution de son équipe YouTube d'une trentaine de personnes, et des cours de portugais.
Mais parfois, Tamara Eidel‐ man se prenait à se dire qu'elle devrait acheter du porto pour en rapporter à sa mère et à ses amis, avant de se rappeler la douloureuse réalité.
"J'ai senti un poids énorme quand les choses ont com‐ mencé un peu à se calmer et que je me suis rendu compte que j'allais rester dans ce merveilleux pays pour un bon moment", raconte l'his‐ torienne, qui soutient l'Ukraine dans le conflit et défend la restitution de tous les territoires, y compris la péninsule de Crimée, an‐ nexée par la Russie en 2014. "Bien sûr, le régime s'effon‐