Alternatives Economiques - Hors-Série
Un vote essentiellement périurbain
La géographie du vote d’extrême droite oppose deux France, selon le politiste Joël
Gombin [1] : « L’une, à l’est d’une ligne Cherbourg- RoannePerpignan, plus favorable au Front national, l’autre à l’ouest de cette ligne, où ces scores sont beaucoup
plus faibles. » L’Ile-de-France, la région Rhône-Alpes, l’Alsace et le littoral méditerranéen à l’est de l’embouchure du Rhône sont les principaux fiefs historiques du parti frontiste. Mais depuis vingt ans, il a réalisé ses principaux progrès « dans un quadrilatère nord-est de la France, allant de la Haute- Normandie à la Franche-Comté et de la pointe
nord du pays à Sarreguemines ». Cela semble au moins en partie lié à la composition sociale de ces territoires : à l’échelle des villes, il existe une « corrélation
faible mais significative » entre la proportion d’ouvriers et l’évolution du vote FN ; or, les ouvriers sont davantage présents dans le nord du pays qu’au sud.
Si par ailleurs le FN peine toujours à s’implanter dans les grandes villes (même s’il y a réalisé des percées significatives lors des dernières élections européennes et départementales), il reste essentiellement un parti urbain. Les clivages du vote FN passent en effet moins entre cette France des métropoles et une « France périphérique » indifférenciée, comme le soutient par exemple le géographe Christophe Guilluy, qu’au sein même de cette France périphérique, entre des communes périurbaines où la progression du FN a été depuis vingt ans plus forte que la moyenne nationale, et des communes rurales où ses scores sont beaucoup plus hétérogènes. Là encore, il faut prendre garde aux généralisations hâtives.
[1] « Le changement dans la continuité : géographies électorales du Front national depuis 1992 », par Joël Gombin, dans Les
faux- semblants du Front national, par Sylvain Crépon, Alexandre Dézé et Nonna Mayer (dir.), Presses de Sciences Po, 2015.