Alternatives Economiques - Hors-Série
5. FINANCEMENT : DU MIEUX, MAIS…
« C’était une pépite, mais le fonds l’a liquidée. » Cette histoire, les spécialistes de l’industrie française la connaissent bien. Une entreprise locale qui grandit, un besoin d’argent pour passer un cap, et, faute de mieux, un fonds extérieur qui rachète, exploite l’outil sans investir, et jette le fruit après l’avoir pressé. Est-il impossible pour une usine de grandir en France ? La réalité est plus nuancée.
Les entreprises s’appuient d’abord sur l’autofinancement. Une industrie doit donc dégager des bénéfices pour pouvoir réinvestir. Or, leur taux de marge s’est nettement amélioré depuis la mise en place du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (Cice) en 2013 et le soutien mis en place par le gouvernement durant le Covid. Il s’élevait en 2021 à 34 % de la valeur ajoutée, contre 29,7 % en 2013.
Second moyen de se financer : les banques. En 2017, 85 % des dettes financières des PME étaient des crédits bancaires. Là aussi, les signaux sont plutôt au vert. La France dispose d’un réseau bancaire important, qui offre des taux d’emprunt plus faibles que ses voisins, selon l’Observatoire du financement des entreprises. Enfin, contrairement à une idée reçue, il est plutôt aisé d’obtenir un prêt. Les PME françaises affichent des taux d’obtention autour de 95 % pour les crédits d’investissement, et 90 % pour ceux de trésorerie.
Derrière ces bonnes nouvelles, quelques nuages persistent. Les différentes études sur le sujet pointent ainsi la difficulté pour les entreprises fragiles d’être renflouées, ou encore les réticences des banques à financer l’exploitation quotidienne, préférant l’investissement et l’innovation. Les patrons se tournent donc de plus en plus vers les marchés (obligations, capitalrisque…). Mais ces derniers préfèrent eux aussi les entreprises florissantes, et exigent une rentabilité trop haute pour l’industrie, gourmande en capital mais parfois peu rentable.
Pour combler les limites du marché, l’Etat a rendu le cadre fiscal favorable au renforcement en capital. Enfin, son bras financier, la Banque publique d’investissement, aide les entreprises à investir et exporter. De quoi faire passer les difficultés de financement derrière celles de recrutement dans la liste des angoisses des patrons.