Armes de Chasse

Un caillou dans la chaussure

- Bonne lecture à toutes et à tous, Laurent Bedu

Le 24 août prochain, Willy Schraen fêtera sa première année à la tête de la Fédération nationale des chasseurs. Le premier anniversai­re d’un président au style volontaire, armé d’un programme ambitieux pour sortir la chasse française d’une léthargie qui n’a sans doute que trop duré. Les chantiers lancés par notre homme sont multiples, évidents et surtout répondent à des besoins concrets, actuels et non pas à des chimères nostalgiqu­es, à des batailles passéistes perdues d’avance ou à des querelles de clocher. Simplifica­tion administra­tive pour les fédération­s, coût du permis national revu à la baisse pour les chasseurs, refonte du système d’indemnisat­ion des dégâts pour l’avenir de notre économie, création de formations à la chasse, refonte également de l’examen pour les futurs nemrods… Willy Schraen veut avancer vite et bien, y compris sur le plan politique. Et, le 14 mars dernier, lors de l’assemblée générale de la FNC, François Fillon et Emmanuel Macron, alors candidats à l’élection présidenti­elle, font le déplacemen­t, et offrent des garanties. Le premier, se présentant comme favorable à la chasse, jouera sur du velours. Le second, comme lors de toutes ses sorties, sera accueilli froidement et repartira avec des applaudiss­ements, au terme d’une interventi­on appréciée, où il aura même évoqué la possibilit­é de relancer les chasses présidenti­elles… Avec de telles profession­s de foi, tous les voyants sont au vert et on se dit que Willy Schraen pourra appliquer sereinemen­t son programme durant les mois à venir. C’est dans cette douce torpeur que, le 17 mai, se produira une violente secousse sismique… Les murs de la FNC ont tremblé, des façades souriantes se sont lézardées et certains sont sans doute tombés de leur siège. La cause de cette agitation tellurique ? La nomination de l’écologiste Nicolas Hulot au poste de ministre de la Transition écologique et solidaire. Celui-là même qui, par un de ces curieux raccourcis de l’histoire, avait soufflé à Jacques Chirac de mettre un terme aux chasses présidenti­elles. « Cette journée particuliè­re sera à l’évidence à marquer d’une pierre noire. Comment ne pas se sentir trahis et humiliés », réagissait aussitôt Willy Schraen. Certes, les chasseurs n’ont pas été les seuls heurtés par cette entrée du chantre de l’écologie héliportée dans un gouverneme­nt de la République. Les poteaux des lignes à haute tension d’EDF ont également vacillé puisque, quelques minutes seulement après cette annonce, le cours de l’action de la firme chutait de 6,57 %. Et il est probable qu’ailleurs d’autres pertes d’équilibre aient eu lieu, d’autres malaises se soient produits. Mais, pour les chasseurs, l’arrivée de Nicolas Hulot est bien plus qu’un caillou dans la chaussure tant l’homme affirme depuis longtemps sa détestatio­n de notre pratique. Pour preuve, la conseillèr­e chasse que le nouveau ministre s’est empressé de nommer est une certaine Justine Roulot, ex-membre de la ligue Roc (Rassemblem­ent des opposants à la chasse), rebaptisée Humanité et Biodiversi­té, et, plus tôt, de la LPO de Champagne. Doit-on pour autant jouer les Cassandre après l’arrivée de M. Hulot qui, selon Allain Bougrain-Dubourg, est « un signal positif adressé à la communauté scientifiq­ue, aux associatio­ns de protection de la nature » ? En clair, quelle est la capacité de nuisance d’un minis- tre ? Peut-il tout ? Décide-t-il de tout ? Non, bien sûr. Il y a évidemment dans cette nomination quelque chose qui ressemble à un symbole. Avec l’arrivée de Nicolas Hulot, le président Macron s’arroge un trophée que ni Chirac, ni Sarkozy ou Hollande n’avaient réussi à s’offrir. Et puis, on peut aussi imaginer que les vacances de monsieur Hulot seront courtes. Il aura d’autres chats à fouetter ( si le droit à la dignité animale ne s’y oppose pas) avec le G20, Notre-Dame-desLandes ou encore le dossier du nucléaire. Certes… D’aucuns prétendron­t aussi que, comme le disait Chevènemen­t, « un ministre ça ferme sa gueule ou ça démissionn­e » , et que Nicolas Hulot sera encadré par le gouverneme­nt et tenu de faire des concession­s, en clair d’entrer dans le moule. Mais rien n’est moins sûr. Si, pour Emmanuel Macron, la nomination de Nicolas Hulot constitue une belle prise, le risque existe qu’elle ne se révèle vite trop grosse, trop encombrant­e. M. Hulot aura beau jeu, si tout ne va pas comme il l’entend, de claquer la porte en affirmant qu’il ne peut mener à bien sa mission dans ces conditions et qu’il ne veut pas être un simple prétexte électoral ou un symbole, justement. Son départ sonnerait pour le gouverneme­nt comme un véritable camouflet. Une rebuffade d’autant plus négative que le néo-ministre jouit d’un crédit important auprès de l’opinion publique. Emmanuel Macron se retrouvera­it avec un opposant écologiste et médiatique libéré et dangereux. Un caillou dans la chaussure. Ce qui n’est jamais confortabl­e lorsque l’on est en marche !

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