De grandes espérances
Les Français sont de grands pessimistes. L’institut BVA a établi récemment un classement des pays en fonction de la confiance en l’avenir de leurs ressortissants. Nous y pointons à la 41e position sur 57, loin derrière les Pays-Bas, mais aussi le Nigéria ou le Pérou. Une autre étude, du cabinet de conseil Brunswick, mesurant l’optimisme des membres de 26 pays nous laissait à l’avant-dernière place, juste devant le Japon, tandis que la Colombie, le Chili, l’Afrique du Sud ou encore la Pologne trustaient les premières places. Pourtant, dans le même temps, les Nations Unies établissaient un Indice de développement humain (IDH) de chacun des 193 Etats du monde, un baromètre du bien-être social d’un pays calculé à partir du revenu national brut par habitant, de l’espérance de vie et du niveau de scolarisation des jeunes. La France se range à la 22e position. De même, le magazine US News, l’université de Pennsylvanie et l’agence Young & Rubicam ont réalisé un classement des « meilleurs » pays du monde en interrogeant 16 000 personnes. La France y figure en 8e place sur 60 ! Nous sommes, cela n’échappe à personne, une nation bien peu confiante en son avenir. Et en son sein, les chasseurs comptent peutêtre parmi les plus pessimistes. C’est dire. Si on demande à l’un d’entre nous comment il appréhende son avenir, il y a de fortes chances qu’il dresse un état des lieux des plus sombres et déprimants. Des chasseurs de moins en moins nombreux et de plus en plus âgés, une activité de plus en plus onéreuse, un petit gibier naturel de moins en moins présent et surtout une réglementation de plus en plus stricte… Vous l’aurez compris, les « de moins en moins » et « de plus en plus » vont tous dans le même sens, le mauvais. La sinistrose nous guette et les raisons de se lamenter sont légion. Pour autant si nous demandons aux autres Français ce qu’ils pensent de nous, de notre pratique, de notre pouvoir, de nos prérogatives, de notre influence au sein de la société, tous, comme un seul homme, diront que la chasse est un lobby puissant, qu’elle bénéficie du soutien des politiques, que ses avantages sont à la fois trop nombreux et trop importants. La jouissance des espaces naturels – même si nous sommes les seuls à payer pour leur usage, beaucoup oubliant qu’ils sont privés –, l’utilisation d’armes, la mise à mort d’animaux sauvages, la durée accrue de la saison de chasse sont autant d’exemples concrets qui nous sont opposés. Et effectivement, avec un peu de recul, il faut avouer que la chasse s’en sort plutôt bien ces derniers mois. Certes, nous continuons de subir de nombreuses attaques de la part de nos opposants ou des tenants du bien-être animal, qui constituent une menace de taille. Mais nous avons obtenu tour à tour la libéralisation d’un grand nombre de calibres, la légalisation de l’utilisation à la chasse des silencieux ainsi que des smartphones. Alors oui, le 14 juillet prochain, nous perdrons la vente libre, de gré à gré, d’armes entre particuliers. Oui, il faudra passer par un armurier ou un courtier pour vendre un fusil à son voisin. Oui, cela entraînera des frais et des tracasseries administratives pour des achats par correspondance ou sur des sites en ligne spécialisés. Mais de grandes avancées ont été obtenues dans le même temps. Menée par Willy Schraen, le président de la FNC, une réforme inédite et ambitieuse de la chasse se met en place. Elle est porteuse de grandes espérances. Dans un an, le permis national coûtera 150 € au lieu des 400 actuels. De quoi, espèrent les présidents de FDC qui ont voté à 92 % cette réforme, donner l’envie et les moyens à de nombreux jeunes citadins de devenir chasseurs. Cette future baisse du prix du permis a été abondamment commentée dans les médias nationaux. « Macron fait des cadeaux aux chasseurs, a-t-on pu lire ici et là, le contribuable va financer la baisse du prix du permis de chasser. » Ces confrères, ces gens bien informés, oubliant un peu vite qu’à la différence des associations écologistes et anti-chasse qui vivent des subsides de l’Etat et des dons des particuliers – ce qui revient au même –, les chasseurs, eux, s’autofinancent et non seulement ne soustraient pas d’argent aux contribuables mais indemnisent le monde agricole pour les dégâts commis aux cultures par les animaux sauvages. Autre source de satisfaction et d’espoir, en dépit d’un ministre de tutelle qui nous voue une haine tenace, la transposition de la modification de la directive européenne en une loi armes, qui sera validée le jour de la fête nationale, s’est faite sans que l’on ajoute au nouveau texte européen des contraintes supplémentaires. Emmanuel Macron s’y était engagé et il a tenu parole, alors même que pendant les discussions autour de ce texte un attentat a été perpétré sur les ChampsElysées par un fiché S qui était détenteur légal d’une arme à feu. Au moment où la FNC a à sa tête un homme déterminé et nourrissant de grands projets, le président de la République martèle que la ruralité fait partie intégrante de la société française et que la chasse a un vrai rôle à y jouer. En dépit du pessimisme inscrit dans notre patrimoine génétique, le ciel semble enfin s’éclaircir au-dessus de notre tête. La chasse française saura-t-elle profiter de ce parfait alignement des planètes ? L’avenir nous le dira. Et il n’est pas interdit d’espérer, car si la chasse a beaucoup à gagner dans les mois qui viennent, elle a finalement peu à perdre !