Armes de Chasse

6,5 Creedmoor

Dans quelques années, le 6,5 Creedmoor sera peut-être un calibre star, la cartouche parfaite pour l’approche et l’affût, plébiscité­e par des centaines de milliers d’utilisateu­rs de par le monde. Soyons avant-gardistes et examinons de près cette nouvelle p

- Dominique Czermann

La naissance d’une cartouche gagnante

L’idée de la 6,5 Creedmoor est née en 2007 de la volonté des ingénieurs et des tireurs de Hornady. A cette époque, aux Etats-Unis, les compétitio­ns High Power sont dominées par le 6XC de David Tubb normalisé par Norma sous le nom de 6XC Norma. Le 6,5-284 Norma a démontré aux tireurs américains la valeur des projectile­s de 6,5 mm à longue distance, mais l’arrivée du 6,5 x 47 Lapua, conçu pour le tir à 300 m, prouve le remarquabl­e rendement des balles de ce calibre même à vitesse « normale », surtout lorsque le vent s’en mêle. Qualité que les Scandinave­s ont intégrée depuis longtemps avec le 6,5 x 55.

Naissance du Creedmoor

Avec le .30 TC, Hornady possède un étui intéressan­t dérivé de celui du .308 Winchester. Plus court que ce dernier de quelque 2,5 mm (2,43 exactement) et plus long que celui du 6,5 x 47 Lapua de 1,77 mm, il possède un angle d’épaulement de 30 degrés favorable à la combustion de la poudre. Dave Emary, le chef balisticie­n de Hornady, et Dennis DeMille, directeur général de Creedmoor Sports, vont réduire le calibre de .308 à .264 tout en conservant la longueur totale de l’étui et l’angle de 30 degrés. Comparé à la .260 Remington très utilisée en compétitio­n type « tactical » et chambrée par de nombreux préparateu­rs, la nouvelle cartouche Hornady, qui deviendra la 6,5 Creedmoor, utilise un étui plus court de 2,9 mm et au collet plus long de 0,67 mm. La capacité interne de la .260 Remington avantage théoriquem­ent cette dernière, mais comme la longueur hors tout est la même (71 mm), les longues balles à coefficien­t balistique élevé de 6,5 mm empiètent moins dans la chambre à poudre de la nouvelle cartouche, ce qui met les deux concurrent­es sur un pied d’égalité. D’autre part, Emary dessine une chambre dont l’angle de prise de rayure est optimisé pour la précision et pour réduire l’érosion de cette zone sensible. Conçue dès le départ pour des boîtiers courts, la munition de Hornady offre l’avantage de pouvoir jouer sur la longueur maximale de la cartouche pour adapter l’enfoncemen­t des balles en fonction des chambres et des prises de rayures, variables suivant les préparateu­rs.

En 2008, la 6,5 Creedmoor est officielle­ment présentée au Shot Show et intègre le catalogue Hornady. La firme annonce même fièrement dans son manuel de rechargeme­nt qu’elle est « certaineme­nt la cartouche la plus équilibrée depuis toujours à prendre place dans [ce] manuel » . Voulue pour être la cartouche ultime pour les compétitio­ns de tir américaine­s ( « ultimate accross the course

cartridge » ) et pour détrôner la 6XC Norma, la 6,5 Creedmoor est tout d’abord disponible en deux chargement­s de tir à balle A-Max de 120 et 140 grains. En 2010, deux ans après son introducti­on en tant que cartouche de tir, la cartouche est présentée avec des chargement­s à balles de chasse. Elle vise un public susceptibl­e d’acheter une arme en .243, .308 et .270 Winchester mais aussi .25-06, .260 et 7-08 Remington, des munitions avant tout utilisées par les chasseurs américains pour le tir des whitetails, mule deers, pronghorns

mais aussi ours noirs, coyotes et autres prédateurs. Bien que ce ne soit pas son objectif premier, la cartouche doit pouvoir convenir pour les cerfs (wapiti). L’Américain chassant rarement en battue, elle est essentiell­ement orientée approche, billebaude et affût. En 2010 donc, Hornady équipe sa cartouche de deux balles relativeme­nt légères, une 120 grains GMX en alliage cuivreux et une 129 grains SST, parfaiteme­nt adaptées aux gibiers visés. Les vitesses ressortent à 890 m/s pour la GMX et 850 m/s pour la SST lorsqu’elles sont tirées dans un canon de 60 cm. Ces chargement­s sont les seuls disponible­s pour la chasse. Dès leur sortie, ils vont « faire le buzz » sur les forums où les discussion­s vont bon train, mais restent le plus souvent stériles étant donné que les interlocut­eurs les plus bavards n’ont jamais eu en main les produits dont ils débattent. Hornady va présenter des vidéos et de nombreux tests réalisés par mes confrères américains. Le 6,5 Creedmoor tarde à décoller, avant de devenir un best-seller en quelques saisons. Aujourd’hui,

Hornady propose six chargement­s pour la chasse, trois pour le tir et un mixte nuisibles/ tir. Les balles les plus lourdes sont les 140, 143 et 147 grains ELD/ELD-X. Huit ans après la présentati­on des versions chasse, la 6,5 Creedmoor est chargée par presque tous les grands et moins grands fabricants du monde. Browning, Berger, Lapua, Fede- ral, Norma, Remington, Barnes, Winchester, Swift, Sauer, Elite, Sellier & Bellot ainsi que nombre de petits fabricants américains proposentp­osent une ou plusieurs versions du Creedmoor. Cre En tenant compte de ce choix pléthoriqu­e quelle munition mu moderne peut afficher un tel succès ?

Ce petit plus

Si dd’aventure un armurier vous annannonce qu’il ne veut pas et ne venvend pas de cette munition en rairaison de l’incertitud­e de sa duréedu de vie, questionne­z-vous sur sa ccompétenc­e et l’intérêt qu’il porte à son métier. En chargement­s d’usine, la 6,5 Creedmoor fait mieux que les .260 Remington, 6,5 x 55 et 6,5 x 57 dans tous les domaines ou presque. L’offre étendue de balles diverses lui donne l’avantage tant en termes de balistique de vol que de balistique terminale. De plus, développée pour la compétitio­n, elle est intrinsèqu­ement plus précise que les autres lorsque tous les paramètres sont égaux. Où elle est un peu à la traîne face à la 6,5 x 55 des Scandinave­s, avec ses balles de 156 grains (10,4 g), c’est pour le tir des animaux lourds comme l’élan ou les grands cerfs. L’efficacité des trois cartouches de référence n’est aucunement à remettre en doute, mais la 6,5 Creedmoor possède un petit plus grâce à ses balles modernes, comme les ELD-X, et la possibilit­é de pouvoir la tirer dans un boîtier court. Si Remington avait porté plus d’attention à sa .260 et si RWS avait su faire évoluer ses 6,5 x 57 et 57 R, ces der nières se porteraien­t mieux. Le cas de la 6,5 x 55 est différent. Elle offre un choix important de balles, mais sa pression contenue, en raison des armes anciennes qui la chambre, limite ses performanc­es face au Creedmoor. Pour donner une idée de l’efficacité de la petite Hornady, effectuons une comparaiso­n à la limite de l’ab-

surde. Prenons une 6,5x68 RWS à balle KS de 126 grains et une 6,5 Creedmoor à balle SST de 129 grains. La première a fait fantasmer les chasseurs de chamois et autres gibiers de montagne, la seconde fait parler ceux qui ne la connaisse pas. Avec ses 939 m/ s annoncés, la 6,5 x 68 chute de 263 cm à 600 m, dérive de 54 cm pour un vent latéral de 10 km/ h et conserve 958 J d’énergie. La petite Creedmoor lancée à 850 m/ s chute de 274 cm, soit à peine 9 cm de plus, mais dérive seulement de 42 cm et conserve une énergie de 1148 J. Les lois qui régissent la résistance à l’avancement ( ou à la pénétratio­n dans l’air) et un meilleur coef- ficient balistique avantagent la Creedmoor. Et encore, le résultat est faussé puisque la munition RWS est tirée dans un tube de 65 cm, contre 61 pour l’américaine. Si on prend une 6,5 x 57 pour comparaiso­n, les différence­s sont encore plus marquées : énergie résiduelle de 745 J, chute de 333 cm et dérive de 63 cm… Qu’ajouter de plus ?

La meilleure des 6,5 mm ?

Bien que la 6,5 Creedmoor soit théoriquem­ent moins polyvalent­e que la .308 ou la vénérable .270 Winchester et qu’elle soit peut-être défavorisé­e pour la battue face à la 6,5 x 55 et ses balles de 156 grains, elle apparaît aujourd’hui comme la meilleure des 6,5 mm standard et une des munitions les plus équilibrée­s jamais produites. Ses dimensions optimisées dès l’origine pour les boîtiers courts et sa précision naturelle sont des arguments de poids si on recherche une munition souple et agréable à l’épaule l’épau pour le tir d’affût, d’approche ou de billebaude de tous les grands gibiers d’Europe de l’Ouest lorsque le chasseur adapte ses balles. Qui plus est, elle n’est pas ridicule pour celui qui veut s’essayer au tir à longue distance (600 m et plus) dès lors qu’il possède une carabine à canon de type varmint ou semilourd. Peut-être pas le choix idéal pour celui qui veut posséder une seule carabine, la 6,5 Creedmoor est une valeur sûre pour le chasseur qui optimise son matériel pour chacune de ses chasses. Ceux qui évoluent en zones venteuses, tirent loin et crapahuten­t beaucoup trouveront une alliée de choix. Surtout s’ils n’apprécient pas de se faire tabasser par les magnum. Pas mal pour une cartouche qui a juste dix ans d’existence et se mesure à des valeurs

éprouvées.

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 ??  ?? C’est à Hornady que l’on doit la création du calibre 6,5 Creedmoor, en 2008. Une cartouche métrique « made in USA ».
C’est à Hornady que l’on doit la création du calibre 6,5 Creedmoor, en 2008. Une cartouche métrique « made in USA ».
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 ?? © B. Berbessou ??
© B. Berbessou
 ??  ?? Barnes, à l’instar de nombreux fabricants de munitions américains, propose de nouvelles charges en 6,5 mm Creedmoor.
Barnes, à l’instar de nombreux fabricants de munitions américains, propose de nouvelles charges en 6,5 mm Creedmoor.
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 ??  ?? Cette Trophy Grade est l’un des six chargement­s Nosler en 6,5 Creedmoor. En dessous, la nouveauté Federal 2018 encore en 6,5 Creedmoor.
Cette Trophy Grade est l’un des six chargement­s Nosler en 6,5 Creedmoor. En dessous, la nouveauté Federal 2018 encore en 6,5 Creedmoor.
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 ??  ?? Hornady continue de travailler sur les petits calibres. Témoin, cette boîte de 6 mm Creedmoor, le petit frère du 6,5.
Hornady continue de travailler sur les petits calibres. Témoin, cette boîte de 6 mm Creedmoor, le petit frère du 6,5.

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