Une nouvelle Z8 battue
En 2016, Swarovski dévoilait la Z8 et son modèle battue, la 1-8x24. Deux ans plus tard, arrive une autre Z8 battue, une 0,75- 6 x 20, au champ de 56 m.
L’ optique de chasse se r éi nvente presque tous les ans. Après les réticules gravés, puis lumineux, les tourelles amovibles, les optiques reliées à un télémètre, puis à un thermomètre, un baromètre et même un calculateur balistique, et enfin la vague des superzoom, initiée en 2007 avec la Swarovski Z6, la prochaine tendance semblerait bien se dessiner, cette fois encore, du côté de Swarovski, au sein de sa gamme Z8, avec une lunette de battue d’un genre entièrement nouveau. Poutant, les Z8 arrivées il y a deux saisons seulement, comptaient déjà dans leurs rangs une lunette de battue, une 1- 8 x 24, proposée au même prix que la Z6, de même poids et avec un champ visuel de 42,50 m à 100 m. C’était déjà un summum, une des toutes meilleures optiques de sa catégorie, que le fabricant maintient d’ailleurs au catalogue. Mais il semble que cela ne suffisait pas aux ingénieurs tyroliens qui, tel Lucky Luke, innovent plus vite que leur ombre. Nos « opticiens » voulaient une lunette avec un plus grand champ visuel encore et surtout qui puisse s’utiliser à faible grossissement, comme un point rouge. Faire mieux que 42,50 m de champ ? Une gageure lorsque l’on sait que seulement deux lunettes du marché rivalisent avec ce score : la Kahles Helia 5 1- 5 x 24 avec 42,50 m également et la Leica Magnus avec 43,20 m. Les recettes habituelles pour augmenter un champ visuel consistent à diminuer la taille de l’objectif ainsi que la valeur du grossissement minimum. La première opération entraîne une moindre pénétration de lumière dans l’optique, qui peut vite devenir trop sombre. Quant à la seconde, elle ne semble plus guère envisageable puisque pratiquement tous les fabricants proposent un grossissement minimum de 1 x. La réponse de Swarovski apportée en mars dernier se nomme 0,75- 6 x 20. La plage de grossissements reste inchangée (8 x) par rapport à la Z8 de battue que l’on connaît, mais le grossissement mini passe à 0,75, au lieu de 1 x, et l’objectif à 20 mm, au lieu de 24. Avec ce grossissement inférieur à 1 x, Swarovski adapte le principe du grand angle en photographie à l’optique de chasse. Autrement dit, cette nouvelle Z8 rapetisse les sujets au lieu de les grossir afin de les faire tous rentrer dans notre champ visuel ! Mais avec la prouesse technique qu’à grossissement 6 comme
à 0,75, les lignes verticales restent des droites, elles ne se transforment pas en courbes, même en périphérie d’image, comme c’est le cas avec
un grand angle photo. Autre performance, malgré la taille réduite de l’objectif, non seulement la transmission lumineuse est inchangée, avec 93 % de la lumière entrante restituée à l’oculaire, mais l’image semble aussi claire qu’avec la précédente Z8 de battue, à l’objectif de 24 mm. Pas de doute, nous avons affaire à de la très très grande qualité. C’est en fait ce qui surprend le plus avec cette lunette plus courte que son aînée ( 27,7 cm contre 30), plus légère (495 g contre 515) et à l’objectif plus petit : une qualité optique juste bluffante. Vous dire que l’image est lumineuse, claire, nette, superbement contrastée et sans dominante colorée ne traduit qu’imparfaitement le ressenti. L’image restituée est presque supérieure à l’originale, celle observée à l’oeil nu.
Leçon de gym oculaire
Voilà que je m’apprête à écrire que cette nouvelle Z8 se révèle supérieure à l’autre Z8 battue, la 1- 8 x 24, alors que l’idée d’une 0,75 x ne me séduisait guère au départ. Pourquoi ce manque d’enthousiasme initial ? Parce que je tire les deux yeux ouverts à grossissement 1 x en battue, ce qui me permet de passer très rapidement de l’identification au tir et de bénéficier, avec mon oeil gauche (je suis droitier), d’un champ visuel illimité. Cette gymnastique oculaire rendue facile par le grossissement 1, avec une image équivalente à la réalité, devient plus rude avec un 0,75. En revanche, pour ceux, très nombreux, qui tirent en fermant un oeil, le réglage de 0,75 x leur permettra d’avoir plus de champ visuel. Mais c’est au prix d’une réduction de la taille des sujets : un sanglier apparaissant plus petit qu’il ne l’est en réalité peut devenir problématique dans les secteurs très touffus aux allées étroites où l’identification et le tir doivent être rapides. Mais que l’on ait un seul oeil ou les deux yeux ouverts, dans les deux cas, le réglage du grossissement se fait presque les yeux fermés ! Car à 1 x, un cran net vous indique que vous entrez dans un grossissement positif, ou à l’inverse, si vous tournez la bague de droite à gauche, que vous passez en mode grand angle. Ce petit cran est un détail qui change tout sur le terrain.
Autre bon point, Swarovski propose deux réticules pour cette optique. Il y a d’abord un 4A- 4A IF, IF qui est un 4 avec des branches épaisses très écartées au milieu et un point et cercle orange illuminés ( un Circle Dot débrayable : le grand cercle peut disparaître). Il y a surtout un DI ( Dot Illuminated) qui, comme son nom l’indique, est un simple point orange très visible laissant beaucoup de visibilité en se comportant comme un point rouge classique. Ces deux réticules logés dans le second plan focal sont invariants, leur taille ne change pas avec le grossissement.
L’excellence de la ligne Z8
En dépit de tous ces changements et de toutes ces innovations, cette nouvelle lunette reste une Z8 à part entière, avec toutes les caractéristiques de sa famille. Son corps optique est de 30 mm et les tourelleaux supérieur et droit commandent le réglage des impacts en site et en dérive. Chaque clic équivaut à un déplacement des impacts en cible de 1 cm à 100 m. Les tourelles parfaitement conçues rendent le réglage aisé. Deux couronnes de diamètre différent les constituent, la plus petite, reliée au mécanisme interne, est commandée par la plus grande via un système de roue crantée. La prise en main s’en trouve des plus agréables et le réglage des plus précis, avec des crans nets et perceptibles au toucher comme à l’oreille. La petite couronne est débrayée en tirant la grande vers le haut, c’est pratique pour, une fois le réglage effectué, placer les repères à zéro. Le cache-tourelleau de droite, plus long que le supérieur, permet de loger une pile de rechange. Cette idée qui se veut pratique a été adoptée sur nombre de modèles, mais se révèle souvent bien peu commode à l’usage, quand extraire la pile de ce logement demande de la patience, un couteau ou des ongles, ce dont on ne dispose pas toujours. Ici, le fond du tourelleau est réalisé dans un matériau souple : il suffit de le presser pour que la pile vous tombe dans la main, même sous la pluie ou avec des doigts gelés. Le placement de la nouvelle pile dans son logement est tout aussi facile, on dévisse la tourelle de gauche et on met la pile en place. L’illumination est inchangée également. Pour allumer le réticule, vous déplacez le curseur positionné face à vous, dans l’épaisseur du plot taillé dans la masse qui semble émerger du sommet de l’oculaire. Vous le poussez vers la droite pour une illumination nocturne, matérialisée par un croissant de lune, ou vers la gauche en mode diurne, avec cette fois un soleil. Pour chacun des deux modes, vous disposez de 32 paliers d’illumination, que vous faites défiler en pressant les curseurs + et -, placés sur le plot. Les possesseurs de Z8 ou de Z6 sont en territoire connu. Au final, cette nouvelle Swarovski nous offre non seulement une qualité optique étonnante mais un champ visuel record de 56 m à 100 m. Certains objecteront que ce score est établi avec un grossissement « négatif », de 0,75 x, et ils auront raison. Mais même à grossissement 1 x, le champ visuel est incroyable. Et puis, au risque de me répéter, la définition d’image est simplement remarquable. Cette lunette va-t-elle détrôner la Z8 de battue initiale ? L’avenir nous le dira. Ce qui est sûr, c’est que si son succès est au rendez-vous, comme pour la Z6 et son superzoom, il est probable qu’elle va créer une mode, celle des lunettes à grossissement inférieur à 1x. À suivre donc !