Il est interdit d’interdire !
On entend souvent dire : « En France, tout ce qui n’est pas interdit est autorisé. » C’est ainsi que l’on ironise parfois sur notre arsenal législatif et son omniprésence dans notre vie de tous les jours. Pourtant, il semble bien que cet adage ait vécu, ou du moins qu’il ne soit plus assez précis ou conforme avec la société française du XXIe siècle et ses nouveaux enjeux. Il manque, en effet, à notre panoplie de textes de lois une nouvelle façon d’aborder l’aspect réglementaire que les sénateurs s’apprêtent à corriger. Les parlementaires vont en effet légiférer le 1er octobre, et innover, en créant un délit d’entraves. Cinquante et un ans après Mai 68, les sénateurs vont réaffirmer « qu’il est interdit d’interdire » , du moins ce qui est légal. Rassurez-vous, il est peu probable que les locataires du palais du Luxembourg descendent dans la rue pour y arracher quelques pavés et dresser des barricades. Mais cet échange de rôles entre la jeunesse de la fin des années soixante et les vétérans de la classe politique est assez symptomatique des maux de notre société. Là où les jeunes issus du baby- boom de l’après- guerre réclamaient massivement davantage de libertés – une société plus humaine, une égalité des chances, le droit à décider de son avenir, le libre arbitre –, une partie infime, mais ô combien bruyante, organisée et médiatisée de la jeunesse actuelle, militante du droit animal, veut son exact contraire. Quant les soixante-huitards attendaient des droits, eux souhaitent nous imposer des devoirs. Lorsque Cohn-Bendit et consorts réclamaient plus de libertés individuelles, eux veulent les supprimer. Et cette minorité entend bien imposer ses idées au plus grand nombre par la force le plus souvent, en ayant recours à des exactions et des actes terroristes. Voilà pourquoi, si vous êtes boucher, vous risquez désormais de retrouver votre boutique saccagée ou, si vous travaillez dans un abattoir, un élevage de canards ou de poulets, de recevoir des menaces de mort ou de voir votre lieu de travail dégradé, ses murs recouverts de peinture rouge, voire incendié. Et pour finir, si vous êtes adepte de tauromachie ou chasseur, de voir des individus vêtus de noir et cagoulés vous empêcher de profiter de votre pratique, au demeurant légale, ou détruire vos installations. Les libertaires de 68 ont laissé la place à des liberticides qui veulent notre bien malgré nous, et tant pis si nous ne comprenons rien, c’est pour notre bien ! Ces adeptes du droit animal, anti-spécistes, animalistes, végans, peu importe leur nom, entendent nous imposer un diktat : celui d’une société où la vie d’un chaton ou d’un chiot vaut autant sinon plus que celle d’un enfant. A grand renfort de lavages de cerveaux, via les réseaux sociaux ou les émissions télé, ils forgent l’opinion, dirigent un régiment de moutons, puisque le libre arbitre doit disparaître, comme le droit à la différence. Ils rêvent d’une « société idéale » où la simple consommation de viande fait de vous un « assassin ». En osant affirmer qu’il est interdit d’interdire, les sénateurs démontrent qu’ils ont pris la mesure de cette menace. Ils ont de plus conduit la riposte avec intelligence, en donnant à ce qui était à l’origine un texte se limitant à la seule entrave à la chasse une portée plus générale qui sera mieux acceptée par l’opinion publique et qui finalement vise la même population d’éco-terroristes, des marginaux déshumanisés, qui cherchent désespérément à donner un sens à leur existence. Ce texte, s’il est voté, ce qui est des plus probables, et appliqué, ce qu’il faudra encore vérifier, est une des meilleures nouvelles concernant l’exercice de notre pratique annoncées ces dernières années. L’autre bonne nouvelle – vous en avez peutêtre bénéficié – est la diminution de moitié du prix du permis de chasser national, qui passe de 410 à 205 €. Une mesure – voulue par Willy Schraen, le président de la FNC, et soutenue par Emmanuel Macron – qui est d’ores et déjà un succès puisqu’à l’heure où nous imprimons, près de 400 000 permis nationaux ont été souscrits contre 100 000 les années passées. En retranchant les 160 000 permis bi- départementaux et temporaires devenus nationaux de fait, ce sont près de 150 000 chasseurs qui découvriront pour la première fois d’autres territoires, d’autres pratiques, d’autres gibiers et d’autres chasseurs. Autant d’occasions de renforcer des liens parfois distendus dans nos rangs. Le permis de chasser va devenir un passeport cynégétique au moment même où grâce à de nouveaux sites Internet comme cocagne.fr il est possible de trouver en quelques clics des territoires partout en France pour une journée, un week-end ou une saison. Bien sûr, ce permis national moins cher aura peutêtre un effet pervers : un recensement plus aisé des chasseurs, une fois débarrassé des cas spéciaux, des validations temporaires ou des bi-départementaux parfois enregistrés deux fois. Avec un nombre de chasseurs plus proche de la réalité, et sans doute revu à la baisse par rapport aux dernières estimations ou études, nous risquons fort de voir notre représentativité au sein de la population française et notre influence politique perdre de son importance. A l’heure où l’ONCFS laisse la place à l’Office de la biodiversité dont on peut craindre qu’il ressemble davantage à une officine écologiste qu’à un rassemblement de Raboliot, il faut se méfier du signal que pourrait donner l’annonce d’un nombre de chasseurs inférieur au million. Méfiance donc, mais ce petit bémol mis à part, réjouissons-nous de ces bonnes nouvelles en ce début de saison 2019-2020 que je vous souhaite très belle.