En conclusion
Un essai en conditions réelles
Afin d’être en mesure de juger de l’atténuation acoustique, je n’ai pas utilisé de casque électronique pour ces tirs. Pour autant, je me suis muni d’un casque de protection dit passif, un Peltor. Mener ce genre de test sans aucune protection n’est pas envisageable, même en utilisant un modérateur. Si à la chasse une seule balle ne va pas entraîner de lésion auditive, l’effet cumulatif des tirs enchaînés au stand – en l’occurrence ici une suite de 50 cartouches – représente un trop grand risque. Cette précaution dessert bien sûr la pertinence de notre test, puisque le casque fait son travail : il absorbe une partie des sons émis par chaque balle et fausse quelque peu notre jugement. C’est pourquoi, vous l’aurez sans doute noté, je fais peu de commentaires sur les performances acoustiques des modérateurs. Un appareil de mesure fiable nous aurait apporté un renfort précieux, mais les 10 000 € à débourser pour l’acquérir n’ont pas été validés par ma direction ! Un autre biais a été introduit par l’usage d’un chronographe, dont les barrières radar nécessitent une lumière suffisante pour fonctionner. Cela interdit de tirer dans un tunnel, à l’abri du vent. Or, le jour de nos essais, ce dernier soufflait de façon assez soutenue et irrégulière, parfois par rafales latérales. Certains modérateurs ont pu pâtir de ces perturbations tandis que d’autres ont pu au contraire bénéficier d’une accalmie. De même, le choix de l’équipement influence inévitablement les mesures. Le canon fin et court de la Sako 85 est plus sensible au poids d’un modérateur qu’un canon plus long et lourd, forcément plus rigide, tout comme d’autres balles nous auraient donné des résultats différents.
Gain de vitesse et de douceur
En dépit des distorsions introduites par notre protocole, ce test nous apporte des enseignements tangibles. Globalement, on observe que l’emploi d’un silencieux fait monter les impacts et ajoute quelques mètres par seconde à nos balles. Cela signifie qu’une carabine munie d’un modérateur nous procurera davantage d’allonge. C’est un bon point puisque cet accessoire se destine avant tout aux chasses silencieuses – approche, montagne et affût – où on tire plus loin qu’en battue. Autre constat, l’emploi du modérateur diminue la sensation de recul dans des proportions importantes. Les tirs effectués avant et après l’essai pour vérifier le réglage de la carabine furent bien moins doux et confortables que ceux réalisés avec un des neuf modérateurs vissé au bout du canon. Notons ici que les tirs de vérification effectués sans modérateur après le test arrivèrent en cible au niveau de la mouche, ce qui signifie que le réglage était inchangé. Les vitesses ont été mesurées à 775, 749 et 755 m/s, soit une moyenne de 760 m/s, c’est seulement 3 m/s de plus que celles réalisées trois heures plus tôt.
Comme nous l’avons exposé dans le détail, nos modérateurs sont plus ou moins légers, plus ou moins modulables. Sans surprise, les plus légers offrent de moindres performances acoustiques. Les fabricants jouent sur un compromis entre poids et efficacité : une charge moins importante facilite la progression, avec la contrepartie d’une détonation moins réduite. A vous de juger ensuite du juste compromis pour vous, entre d’un côté un supplément de poids plus ou moins sensible et une économie de bruit plus ou moins réduite. Vous avez aussi la possiblité de jouer vous-même sur ce compromis en achetant un modèle à plusieurs modules et en variant leur nombre – mais gare au réglage dans ce cas. Vous devez aussi avoir à l’esprit que les modérateurs les plus lourds et les plus longs tendent à déséquilibrer l’arme et à influencer davantage la vibration du canon, ce qui peut jouer sur la dispersion des impacts. En revanche, nos tirs en font la démonstration, il n’y a aucune corrélation entre le poids des silencieux et le placement des impacts, les modèles les plus lourds ne génèrent pas les impacts les plus bas ou les plus hauts – ces derniers sont indifféremment obtenus par des modèles lourds ou très légers. De même les silencieux qui se vissent en bout de canon, certes minoritaires dans notre essai où les manchonnés dominent, ne montrent pas de comportements proches ou identiques.
Ces tirs confirment que tous les modérateurs de notre panel sont des valeurs sûres. Ne vous focalisez pas sur les groupements dignes de carabines match enregistrés pas certains, pas plus que sur les cibles les plus dispersées : il n’est pas dit que ces résultats soient reproductibles avec votre arme ou vos balles. Alors, comment choisir ? En tenant compte de votre budget, comme toujours en pareil cas. Egalement, nous l’avons dit, en fonction du poids supplémentaire que vous consentez à emporter. Le critère de la modularité devra aussi entrer dans votre décision. Un modèle évolutif vous permet de jouer sur le compromis poids-atténuation sonore en fonction de vos chasses et sera également intéressant si vous possédez plusieurs carabines filetées. Pour ma part, en mettant de côté le critère du prix pour ne retenir que ceux du groupement, de la douceur au tir et de l’atténuation sonore, mon attirance se dirige vers le Stalon, l’Aimsport, le Freyr & Devick ou l’A- Tec. Et vous ?