Incorporated ! Les Ateliers de Rennes. Biennale d’art contemporain
Divers lieux, Rennes, Brest, Saint-Brieuc / 1er octobre - 11 décembre 2016 Avec la prolifération de biennales d’art contemporain et la nécessité d’inventer à chaque fois de nouveaux concepts permettant de justifier leur raison d’être, la réussite de tels événements semble se mesurer à l’aune de la pertinence desdits concepts et de leur adéquation avec le choix des oeuvres visant à les illustrer. Comme le note François Piron, aux commandes de cette édition, une telle manifestation, « plus que tout autre type d’exposition, se donne pour tâche de refléter et de transcrire une actualité ». Or, préciset-il, « la plupart des artistes invités à participer à cette biennale tiennent une position apparemment rétive à cette notion d’actualité ». Dans l’optique d’offrir une « lecture des affects contemporains dans leur incorporation à l’économie », Piron a « conjugué » des oeuvres – pour un nombre substantiel d’entre elles produites spécifiquement pour la biennale – qui « dévoilent la précarité, la violence, l’inquiétude du temps présent ». Les relations entre « le corps, l’organique, et les machines et technologies » y sont interrogées dans une dynamique qui aux dires du commissaire « proposerait une suspension du discours, de l’opinion, pour faire valoir l’expérience physique et sensible ». Vaste programme auquel les oeuvres présentées dans les différents sites sont donc censées répondre. Saluons l’ouverture dont Piron a su faire preuve dans le choix d’artistes appartenant à des générations, cultures et esthétiques complémentaires. Quelques « poids lourds » du… marché se voient ainsi associés à des figures émergentes ou marginales au risque de certaines situations déséquilibrées à l’image de l’installation de Michel François à la Halle de la Courrouze qui fragilise son entourage. La plupart des confrontations s’avèrent cependant stimulantes. Pour preuve, le surprenant dialogue engagé entre AnneMarie Schneider, Jorge Queiroz, Maurice Blaussyld et Laura Lamiel au musée des beaux-arts. À ces artistes « contemporains », Piron a, une fois n’est pas coutume, greffé des électrons libres et inclassables. Anna Oppermann ou Klaus Lutz par exemple, avantageusement exposés au Frac et dont le caractère bricolé des oeuvres contraste fort heureusement avec la débauche technologique de l’installation bavarde et pompeuse de Marie Gilligan montée dans une salle adjacente. On retiendra par ailleurs et dans d’autres lieux (La Criée et Lendroit éditions) les toiles beaucoup plus silencieuses de Karolina Krasouli et dans un registre au bord de la disparition l’intervention dont nous ne dirons pas plus d’Eva Barto. Ce sont sans doute à travers ces derniers gestes témoignant d’une économie de moyens que s’esquisse l’amorce d’une résistance aux rouleaux compresseurs et propositions creuses et spectaculaires dont aucune biennale d’envergure, à commencer par celleci, ne saurait se passer. The proliferation of art biennials puts the onus on each new event to find a concept to justify its existence, and its success, it seems, is best measured by the interest of said concept and the quality of its translation into artworks. At the help in Rennes, François Piron notes that this kind of show, “more than any other kind of exhibition, assumes the task of reflecting and transcribing a current situation” and yet, “the positions taken by most of the artists invited to take part in this biennial seem to run counter to this notion of topicality.” Setting out to offer a “reading of contemporary affects and their incorporation into the economy,” Piron has “combined” works that “reveal the precariousness, violence and disquiet of the present time.” (Most of them, by the way, weremade specially.) The relations between “the organic body and machines and technologies” are explored within a dynamic that, according to the curator, “offers a suspension of discourse, of opinion, in order to bring out physical and sensorial experience.” That’s quite a remit. Piron has taken a commendably open-minded approach to choosing the artists for his various locations. Among this mix of generations, cultures and aesthetics we thus find market heavyweights alongside emerging or marginal figures, sometimes entraining a real risk of imbalance, as with the installation byMichel François in the Halle de la Courouze, which makes those around it look fragile. Still, most of the confrontations are pretty stimulating: take, for example the surprising dialogue between Anne-Marie Schneider, Jorge Queiroz, Maurice Blaussyld and Laura Lamiel at the Musée des Beaux-arts. Onto these “contemporary” artists Piron has, unusually, grafted some maverick figures such as Anna Oppermann and Klaus Lutz. Advantageously exhibited at the FRAC, their DIY aesthetic contrasts nicely with the techno overkill and prolixity of Marie Gilligan’s rather grandiose installation nextdoor. Also of interest in other sites (La Criée and Lendroit Éditions) are the much quieter canvases by Karolina Krasouli and, in a register close to invisibility (which I’ll leave you to discover) the intervention by Eva Barto. These economical gestures no doubt show stirrings of resistance to the often empty and spectacular blockbuster offerings that no biennial worth its salt—this one included—can do without.
Translation, C. Penwarden