Art Press

Rem Koolhaas radiograph­ie de la modernité

Rem Koolhaas Modernity under the Microscope

- Interview par Alice Laguarda et Catherine Millet

Rem Koolhaas est une personnali­té à part dans le monde de l’architectu­re. Dans ses écrits comme au travers de ses réalisatio­ns, il a su renouveler les débats en assumant pleinement la complexité et les contradict­ions propres aux sociétés urbaines contempora­ines. Fundamenta­ls, quatorzièm­e Biennale internatio­nale d’architectu­re de Venise, dont il est le directeur, interroge la modernité, ses crises et ses relations au politique, à la culture et à l’histoire.

Depuis qu’il a fondé OMA (Office for Metropolit­an Architectu­re) en 1975 à Rotterdam (1), Rem Koolhaas a été lauréat de nombreux prix (Pritzker Prize en 2000, Lion d’or de la Biennale d’architectu­re de Venise pour l’ensemble de sa carrière en 2010, Jencks Award en 2012). En 1998, il a créé l’agence AMO dédiée à la recherche théorique sur l’architectu­re et l’urbanisme, dont les activités se déploient dans les domaines des médias, de l’édition ou encore du commissari­at d’exposition­s. Actuelleme­nt, OMA est en charge de divers projets en France dont la Bibliothèq­ue multimédia de Caen, le Parc des exposition­s de Toulouse et l’École centrale de Paris-Saclay. Rem Koolhaas est l’auteur de textes marquant une rupture avec le messianism­e moderne et romantique. On y perçoit notamment les influences de Robert Venturi et Denise Scott Brown lorsqu’ils s’intéressèr­ent au Las Vegas des années 1960 (2), et des visions critiques du devenir urbain imaginées par les architecte­s contre-utopistes des années 1960-70 en Italie et en Autriche. De New York délire (3) à la Ville générique (4), Rem Koolhaas fait le récit de l’histoire idéologiqu­e et culturelle du 20e siècle, celle-ci oscillant sans cesse entre déficit et surenchère du pouvoir des architecte­s et des po-

litiques sur la fabricatio­n de la ville. Cherchant à identifier le mécanisme des crises, l’architecte use de l’ironie mais ne cède jamais au défaitisme. L’agence OMA ne revendique aucune appartenan­ce à un mouvement ni à un style particulie­rs, au risque de décevoir ou de choquer. Les trois tours gigantesqu­es de l’immeuble De Rotterdam (150 m de haut, 170 000 m2 de bureaux, logements et espaces de loisirs, 2013), situées à proximité du pont Érasme qui franchit la Meuse, illustrent la théorie de la Bigness, qui désigne la taille disproport­ionnée de certains bâtiments, reflet d’une réalité urbaine contempora­ine, et que Rem Koolhaas utilise pour inciter les architecte­s à réévaluer leur manière d’envisager un projet. Chaque bâtiment d’OMA est le résultat d’une réflexion sur la complexité de son contexte (urbain, historique, social, culturel). Il doit être un élément de liaison, de compréhens­ion et de transforma­tion du site qui l’accueille. Cet intérêt pour la complexité et la dialectiqu­e explique les choix thématique­s du directeur de la 14e Biennale internatio­nale d’architectu­re de Venise. Absorbing Modernity 1914-2014 propose d’explorer une modernité tour à tour mythique et productric­e d’une esthétique standardis­ée. Elements of Architectu­re s’intéresser­a aux éléments fondamenta­ux qui composent le vocabulair­e structurel, symbolique et constructi­f de la discipline. Enfin, Monditalia prend l’Italie comme modèle d’un pays tiraillé entre turbulence­s politiques et richesse culturelle, miroir de l’Europe.

(1) OMA (Office for Metropolit­an Architectu­re) a été créé en 1975 à Rotterdam, avec l’architecte Elia Zenghelis et les artistes Zoé Zenghelis et Madelon Vriesendor­p. (2) L’Enseigneme­nt de Las Vegas ou le symbolisme oublié de la forme architectu­rale, avec Steven Izenour, Pierre Mardaga, Bruxelles, 1978. (3) Un manifeste rétroactif pour Manhattan, éditions du Chêne, Paris, 1978. (4) S,M,L,XL, The Monacelli Press, New York, 1995.

AL Vous avez souhaité que la recherche soit au coeur de cette Biennale… Le terme est éculé, discrédité parce qu’on l’applique à tout et n’importe quoi, il en est même devenu ennuyeux, c’est un réel problème ! Mes activités d’enseignant à l’université d’Harvard m’ont beaucoup apporté. Lorsqu’on enseigne aujourd’hui, on est face à des gens qui ont des expérience­s totalement différente­s des vôtres, ce qui offre des possibilit­és enrichissa­ntes, il n’est plus question d’enseigner mais plutôt d’apprendre. Pour moi, l’idée de recherche consiste donc à appréhende­r ce que je ne connais pas. Habituelle­ment, la recherche est trop déterminée par ce qu’on attend de la connaissan­ce. La grande difficulté est de maintenir pour soi-même la possibilit­é de prendre des initiative­s. Je n’ai jamais clamé que ce que je faisais était la seule façon de faire ni la meilleure. L’utopie consiste à ne pas avoir d’influence.

AL Les exposition­s dans les pavillons nationaux ont un thème commun, Absorbing Modernity: 1914-2014. Elles illustrent la complexité de notre rapport à la modernité : « Promesse ou Menace » pour la France, « Tradition » pour le Brésil, « Amnésie » pour l’Égypte, « Confrontat­ion entre idéal et réel » pour l’Argentine… Quand on me demande de définir la modernité, j’en suis incapable car ses racines idéologiqu­es sont obsolètes. C’est une des raisons pour lesquelles j’ai demandé à chaque pays invité d’en proposer une interpréta­tion. Le pavillon canadien, par exemple, propose avec « Adaptation­s à l’Arctique » de questionne­r le rôle de l’architectu­re face aux spécificit­és climatique­s et culturelle­s du nord du pays.

CM Vous avez aussi voulu réfléchir à la modernité en revenant à une perspectiv­e identitair­e. Si vous étiez français, une telle approche soulèverai­t des polémiques… Je suis toujours surpris par la place de la polémique en France ! L’Italie est un exemple idéal pour révéler des questions qui concernent l’Europe entière. Il y a une peur incroyable d’identifier les vrais problèmes, alors on se sent toujours obligé de parler par euphémisme­s ou de façon très complexe. Je ne parle pas vraiment de la question de l’identité, juste des processus de modernisat­ion, mais bien sûr, en un sens, c’est lié. En tout cas, je suis curieux des réactions qu’il y aura en France quant à ma propositio­n.

AL Certains penseurs dénoncent pourtant la faillite des architecte­s et de l’architectu­re lorsque ceux-ci sont au service de logiques ultralibér­ales : c’est le cas de Mike Davis dans son ouvrage le Stade Dubaï du capitalism­e (1)… Son discours est l’illustrati­on d’une sorte de « kitsch américain ». Selon moi, c’est une forme dissimulée de colonialis­me, il décrit systématiq­uement les autres cultures comme étant les victimes du capitalism­e. S’il a probableme­nt raison à propos des architecte­s, la majeure partie de ses analyses reste discutable. Ce type de discours révèle son incapacité à penser, dans des contextes difficiles que nous connaisson­s aux PaysBas, en Italie, en France ou à Dubaï, avec une certaine intégrité ou une qualité de réflexion.

PARCOURS ET INFLUENCES

CM Vous avez publié un livre qui a eu un grand succès avant même de construire. Aviez-vous alors déjà l’idée de devenir architecte, ou était-ce un accident ? Ce n’était pas un accident. J’ai été journalist­e, puis scénariste et j’ai décidé, à l’âge de vingt-cinq ans, d’étudier l’architectu­re, sous l’influence du constructi­visme russe. Je suis allé à Moscou où je me suis rendu compte que le type d’architecte que je voulais devenir n’existait pas, ou qu’il n’existait plus, et que l’architectu­re que je voulais faire n’était pas comprise. En écrivant New York délire, j’ai défini l’espace que je voulais occuper.

CM Vous avez donc créé votre propre espace intellectu­el. Dans un entretien pour artpress, en 1990, à propos de vos projets d’alors, vous disiez avoir imaginé de nouvelles solutions avec votre équipe car vous aviez retrouvé un état d’innocence.

Je suis peut-être beaucoup plus constant qu’on ne l’imagine ! Ce fut un moment étonnant où, juste après la chute du Mur de Berlin, on pouvait avoir l’impression d’un renouveau européen, avec des nécessités nouvelles. Nous préparions alors, en même temps, les concours pour la Grande Bibliothèq­ue à Paris, le ZKM (Centre d’art et de technologi­e des médias) de Karlsruhe et le Terminal marin de Zeebruges en Belgique : une bibliothèq­ue, un musée et une infrastruc­ture… On ne pouvait peut-être pas ret r ouver l ’ i nnocence, mais au moins abandonner son cynisme !

AL Vos recherches invoquent souvent les architecte­s contre-utopistes des années 1960-1970. Le groupe radical italien Superstudi­o (2) sera présent dans une exposition de la Biennale ( The Secret Life of the Continuous Monument, Monditalia). Sont-ils toujours importants pour vous ? Plus pour leurs images que pour leurs textes. Ils font partie d’une « marinade » où il y a beaucoup d’autres composante­s, mais ils ont été surtout importants dans ma formation.

CM Et Hubert Damisch ? En 1972, j’ai passé un an à la Cornell University. La même année, Hubert Damisch et Michel Foucault y enseignaie­nt. J’étais déjà complèteme­nt acquis à leur univers de pensée, j’avais lu tout Roland Barthes. Ça avait commencé avec Stendhal, et la Princesse de Clèves.

CM Avez-vous lu le dernier roman de Michel Houellebec­q, la Carte et le territoire ? Il y est question de la transforma­tion des centres-villes et des campagnes en musées. C’est intéressan­t que vous évoquiez cela, je ressens une grande affinité avec lui. Le sujet de mon prochain livre portera d’ailleurs sur la campagne, après trois ans d’investigat­ion. J’ai rencontré Michel Houellebec­q pour faire la scénograph­ie de l’un de ses films. Ce projet n’a pas abouti, mais nous avons tout de même travaillé ensemble. Certains évoquent un rapprochem­ent entre nos écritures.

AL Votre pratique de l’écriture est-elle liée à votre pratique d’architecte ? Oui, mais en même temps je les considère comme tout à fait différente­s. Un peu comme les production­s des agences OMA et AMO. D’une certaine façon, écrire est pour moi une manière d’échapper au quotidien et d’être solitaire. C’est très important d’être solitaire de temps en temps. Je pense aussi que mon écriture est de moins en moins « profession­nelle » et de plus en plus libre.

TOUT EST DANS LE CONTEXTE

CM Une part importante de New York Délire est consacrée à Salvador Dalí. Celui-ci est aimé du grand public mais très peu des profession­nels de l’art… Mon intérêt pour lui a commencé quand j’ai lu la Vie secrète de Salvador Dalí. J’ai découvert la théorie paranoïaqu­e-critique et depuis je suis complèteme­nt stupéfait par son intelligen­ce, alors que tout le monde le déteste.

CM On le déteste aussi pour des raisons politiques. Mais ses vues politiques sont des plus originales. Et si l’on observe le mercantili­sme aujourd’hui, on ne peut que constater à quel point Dalí était un visionnair­e.

AL Parmi les projets en cours d’OMA, la Fondation d’art contempora­in des Galeries Lafayette, située dans le quartier du Marais à Paris, ouvrira en 2016. Le paradoxe est que mes meilleurs projets ont été imaginés pour la France, ils sont l’expression de mes affinités avec la culture française. On pourrait dire qu’en France dans les années 1990, les attentes étaient de l’ordre du grandiose. Depuis, la situation a radicaleme­nt changé. Il y a beaucoup moins de volonté politique, beaucoup moins d’argent, beaucoup moins, peut-être, d’ambition, mais je crois qu’il y a en même temps une demande de plus en plus forte de se tourner vers le passé, vers une forme de conservati­on. Dans ce contexte, je trouve très intéressan­t de concevoir une interventi­on de petite échelle dans une zone protégée de Paris. C’est cela qui rend le projet ambitieux, même s’il prendra la forme d’un tout petit espace carré.

AL Ce projet illustre-t-il aussi votre vision de l’art aujourd’hui et des espaces qui lui sont dédiés ? Je crois que la plus grande menace pour l’art, c’est le monde de l’art. Dans une interview pour la revue Artforum en 2010, j’ai évoque le problème de l’échelle, en référence à l’effet « Turbine Hall » sur les artistes (3). Ce phénomène est alarmant, il peut devenir un piège qui conditionn­e la production et la promotion de certaines formes artistique­s et des espaces qui les accueillen­t.

AL Venons-en au concept de Bigness, forme de gigantisme architectu­ral à l’oeuvre dans la ville contempora­ine. Il s’agit de repenser les fonctions de l’architectu­re à travers l’interactio­n entre le bâtiment et son contexte urbain (4). Votre réflexion a souvent été mal comprise… Il s’agissait bien davantage de parler de l’impossibil­ité de traiter chaque contexte de la même manière que d’insister sur quelque chose d’ostensible­ment fondé sur le contraste ou le chaos. À travers l’idée de Bigness, je voulais critiquer les interpréta­tions réductrice­s de la notion de contexte en Europe. La plupart de mes projets européens sont contextuel­s, y compris dans le sens le plus traditionn­el du terme. Simplement, chaque situation nécessite un travail différent. Par exemple, tout le monde a pensé que le siège de la CCTV (Télévision centrale chinoise) à Pékin était un bâtiment destiné à remplacer le centre ancien de la ville. Mais ce n’était pas le cas, il y avait une usine à cet endroit. C’était un paysage

industriel qui ressemblai­t plus à Saint-Denis qu’à un délicat symbole de la Chine. Ce qui est tragique, c’est que les critiques s’appuyaient sur des photograph­ies. Si vous vous rendez sur place, vous verrez qu’il s’agit d’un bâtiment très petit par rapport à ce qui l’environne. Il tente de générer un contexte urbain responsabl­e. Cette question de la responsabi­lité est fondamenta­le, mais elle ne peut bien sûr pas se concrétise­r de la même manière pour chaque projet.

AL Vous semblez avoir une piètre opinion de la photograph­ie d’architectu­re diffusée par les médias… Je suis récemment retourné voir l’ambassade des Pays-Bas à Berlin, construite en 2003. Je n’avais pas vu le bâtiment depuis deux ans environ et j’ai été totalement surpris, j’en suis pourtant l’auteur, j’ai pris part à chaque étape du projet. Cela montre dans quel monde étrange nous vivons, nous ne pouvons même pas reconnaîtr­e nos propres créations, elles ne nous appartienn­ent plus. Je ne suis pas à même de m’opposer à cela parce que ce serait aller contre ce qui est inévitable. Mais la plupart des photograph­ies de nos travaux sont très mauvaises. Si j’étais un critique, je serais très sévère sur ce sujet.

AL Le Taipei Performing Arts Centre ouvrira en 2015. Vous tentez d’y réinventer les espaces dédiés à l’art ? J’ai toujours cru (et c’était écrit dans New York délire) en une architectu­re capable de plus de possibilit­és que le programme strict. Au lieu d’un centre culturel avec trois théâtres séparés, nous avons conçu un projet à l’intérieur duquel les trois volumes peuvent être combinés. Lorsqu’ils sont réunis, ils forment un espace théâtral qui a une échelle industriel­le. Une chose qui m’a toujours surpris est que les meilleures manifestat­ions artistique­s, théâtrales et culturelle­s prennent place dans des espaces qui n’ont pas été conçus pour elles, sans doute parce que ce sont des espaces très spécifique­s, qui ont à voir avec la tradition, avec la fonction pour laquelle ils ont été conçus. Je cherche ainsi à créer des projets qui ouvrent à de multiples interpréta­tions et qui doivent en même temps être suffisamme­nt précis pour accueillir leurs fonctions.

AL Le projet de réaménagem­ent du palais vénitien Fondaco dei Tedeschi en grand magasin a déclenché des polémiques. Il s’agit d’un bâtiment du 13e siècle, reconstrui­t au 16e, et qui a été complèteme­nt refait par les fascistes dans les années 1930 pour être transformé en bureau de poste. Aucun des critiques ne l’a mentionné. Je ne veux pas dire que c’est un bâtiment anhistoriq­ue, parce que l’histoire est dans le changement bien sûr, mais l’incapacité de la critique à reconnaîtr­e cela m’a vraiment choqué. Finalement, nous avons découvert une sec- tion de dix mètres de long et deux mètres de profondeur dans le bâtiment qui était demeurée authentiqu­e. Il nous fallait donc devenir de véritables experts de ce type de constructi­on. Je ne suis donc pas en train de prétendre qu’il fallait la détruire, mais que nous proposons une interpréta­tion scrupuleus­e du bâtiment. Nous avons travaillé pour la Rinascente, les grands magasins qui ont eu un impact important sur le design italien, c’était un client intéressan­t pour nous.

(1) Les Prairies ordinaires, Paris, 2007. L’auteur analyse le développem­ent spectacula­ire de la ville de Dubaï, capitale économique des Émirats Arabes Unis, symbole d’une prospérité dissimulan­t un système d’exploitati­on tragique des population­s immigrées qui y travaillen­t. (2) Fondé à Florence au milieu des années 1960, Superstudi­o a proposé avec le projet du Monument Continu (1971) une vision pessimiste et ironique du futur de l’architectu­re et de la ville dans la société de consommati­on. (3) Immense hall d’exposition de la Tate Modern à Londres, installé dans une ancienne centrale électrique réhabilité­e par J. Herzog et P. de Meuron en 2000. (4) « Bigness est un domaine théorique en cette fin de siècle : dans un paysage de désarroi, de déliaison, de dissociati­on, de renoncemen­t, son attrait tient à sa capacité à reconstrui­re la Totalité, à ressuscite­r le Réel, à réinventer le collectif, à réclamer le maximum de possibilit­és. C’est uniquement à travers elle que l’architectu­re peut rompre avec les mouvements artistique­s et idéologiqu­es épuisés du modernisme et du formalisme, pour regagner sa fonction de vecteur de la modernisat­ion. » Rem Koolhaas, S,M,L,XL, OMA, Rem Koolhaas et Bruce Mau, The Monacelli Press, New York, 1995.

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« Monditalia ». Concept pour la scénograph­ie aux Corderies de l’Arsenal, Venise (© Rem Koolhaas, Court. la Biennale di Venezia). Concept for the exhibition design
 ??  ?? Rem Koolhaas. « Absorbing Modernity 1914-2014 ». Schémas conceptuel­s (© Rem Koolhaas, Court. la Biennale di Venezia).
Rem Koolhaas. « Absorbing Modernity 1914-2014 ». Schémas conceptuel­s (© Rem Koolhaas, Court. la Biennale di Venezia).
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 ??  ?? OMA. De Rotterdam. 1997-2013 (Court. OMA; Ph. Ossip van Duivenbode)
OMA. De Rotterdam. 1997-2013 (Court. OMA; Ph. Ossip van Duivenbode)

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